Impôts: a-t-on vraiment un "droit à l'erreur" et que risque-t-on en cas d'oubli sur sa déclaration?

Il ne reste plus que quelques jours pour remplir votre déclaration de revenus. - Étienne Laurent / AFP
La fin de la campagne 2025 de la déclaration de revenus approche à grand pas. En fonction du département où vous vivez, la date de fin est fixée au 22 mai, 28 mai ou 5 juin. Si vous ne l'avez pas encore remplie, peut-être allez vous le faire dans l'empressement... Et risquer de commettre de petites erreurs.
Une pension reçue que vous avez oubiée d'indiquer, un changement d'adresse non précisé, se tromper sur le montant des frais de garde de ses enfants... Des inexactitudes ou omissions qui peuvent parfois réduire votre impôt. Ce que l'administration fiscale n'appréciera pas beaucoup si elle s'en rend compte lors d'un contrôle fiscal.
Des majorations pouvant aller de 10 à 80%
Elle risque effectivement de vous infliger une majoration de votre impôt. Le site service-public.fr détaille ces sanctions auxquelles vous vous exposez en cas d'erreur qui vous octroie un avantage que vous n'auriez pas dû avoir (une réduction de votre impôt ou un avantage fiscal).
La première, c'est une majoration de 10% appliquée à l'impôt supplémentaire que vous devez payer ou au montant de l'avantage auquel vous n'avez pas droit. Mais vous devrez également vous acquitter d'intérêts de retard. Ceux-ci s'élèvent à 0,20% de l'impôt dû par mois de retard (soit 2,4% sur un an).
Attention, si l'administration fiscale arrive à dire que les erreurs et omissions que vous avez commises étaient délibérées, notamment pour des biens ou revenus cachés, il s'agit là de fraude fiscale. Les sanctions seront plus lourdes puisque la majoration peut aller de 40 à 80%, en plus des intérêts de retard, comme l'explique service-public.fr.
Vous disposez d'un droit à l'erreur
Heureusement, vous pouvez très facilement éviter ces sanctions en corrigeant votre déclaration dans les délais. C'est ce qu'on appelle le droit à l'erreur: la possibilité de régulariser sa situation sans payer de pénalité, quand on a commis une inexactitude ou une omission. Pour la déclaration de revenus, il a été mis en place en 2018 par le gouvernement.
Vous disposez de plusieurs délais pour effectuer ces corrections. Pour chacun, la modification se fait dans un espace différent.
Premier cas de figure, avant la date limite de dépôt de votre déclaration. Si vous avez validé votre déclaration mais vous rendez compte d'une omission, vous pouvez toujours la modifier dans votre espace particulier jusqu'à la date limite de votre département. Et même au-delà ! En effet, la date limite de dépôt ne signifie pas la fermeture du service de déclaration en ligne. Vous pouvez rectifier jusqu'à fin juin.
Mais il faut bien l'avouer, une fois qu'on a validé sa déclaration de revenus on préfère ne pas remettre son nez dedans... Les gens sont plus susceptibles de se rendre compte de leurs erreurs au moment de recevoir leur avis d'impôt, en général au mois de juillet. Si c'est le cas, pas de panique...
Un service de correction en ligne jusqu'en décembre
À ce moment ouvrira le service de correction de la déclaration en ligne, disponible sur impots.gouv.fr. Vous aurez la possibilité de modifier les éléments que vous avez déclarés: rectifier les montants saisis dans les cases, cocher ou décocher les cases erronées...
Ce service de correction est en général disponible jusqu'au mois de décembre. En 2024 par exemple, pour la déclaration des revenus de 2023, il avait été ouvert du 31 juillet au 4 décembre inclus.
En faisant cette déclaration rectificative spontanément, vous devrez régulariser votre situation et payer l'éventuel impôt que vous devez. Mais celui-ci ne sera pas majoré des 10% sus-mentionnés. En revanche, impots.gouv explique que vous devrez tout de même des intérêts de retard. Ils seront néanmoins réduits de 50%, et s'élèveront à 0,20% de l'impôt dû par mois de retard (soit 1,2% sur un an).
Grâce à ce droit à l'erreur et les délais qu'il offre pour corriger sa déclaration de revenus, on ne risque donc a priori pas grand chose si l'on se trompe. Depuis 2018, ce droit a d'ailleurs bénéficié à plus de 800.000 ménages.
Remis en cause par le Conseil d'État
Attention néanmoins, une décision récente du Conseil d'État vient remettre en question l'application du droit à l'erreur. Un couple qui avait déclaré des intérêts issus d'un placement s'était rendu compte trop tard avoir été victime d'une escroquerie: le placement était bidon, il s'agissait d'une pyramide de Ponzi, dont les intérêts étaient fictifs.
Le couple a donc corrigé sa déclaration de revenus juste après la date limite, en indiquant des montants plus faibles que ce qu'il avait renseigné initialement. Mais après une décision en appel en sa faveur, le Conseil d'État a finalement considéré que la charge de la preuve revenait au couple, et qu'il ne pouvait pas prouver cette baisse de revenus... Preuve effectivement impossible à apporter lorsqu'on est victime d'escroquerie.
De quoi inquiéter les contribuables: pouvons-nous toujours compter sur le droit à l'erreur en cas d'oubli? Interrogé par nos confrères des Echos, l'avocat fiscaliste Florent Ruault conseille: "Si vous avez une incertitude sur un montant, mieux vaut au moment de la déclaration déclarer un peu moins qu'un peu plus car c'est à l'administration de prouver que le montant n'est pas le bon."
Autrement dit, mieux vaudrait sous-estimer ses revenus, quitte à devoir payer un complément d'impôt par la suite, que les surestimer et ne pas pouvoir obtenir a posteriori de correction à la baisse de son impôt.
"Formulez une mention expresse pour expliquer que vous n'avez pas encore l'information. C'est en effet toujours mieux d'entretenir de bonnes relations avec l'administration fiscale," ajoute Florent Ruault. Ce qui vous permettra, en cas d'erreur, de prouver votre bonne foi.