Cadeaux de Noël: comment expliquer le succès du "Do it yourself", ou faire soi-même?

Un cadeau fait à la main pour Noël. Le DIY, "Do it yourself", en français, littéralement, "fais-le toi même" est une tendance des années 1970, qui avait presque disparu avec la société de consommation et qui revient en force depuis une dizaine d'années.
Elle regroupe des secteurs très variés, avec pour seul socle commun l'idée de faire soi-même: ses cosmétiques, sa décoration, ses repas mais aussi la réparation de sa voiture, de son électroménager, le rapiéçage de ses vêtements, etc.
Neuf Français sur dix ont déjà pratiqué une activité DIY selon une étude Créations et savoir-faire de 2023.
Un autre sondage, plus récent encore, atteste de cet engouement: 42 % des 25-34 ans sont adeptes du Do it yourself et le pratiquent régulièrement, affirme une enquête réalisée par Opinionway en juillet dernier.
Économies à la clé
Évidemment, les économies réalisées en faisant soi-même plutôt qu'en faisant faire sont une des premières motivations avancées. C'est dans cette idée que se sont développés les concepts de "repair café", des lieux où l'on apprend à réparer soi-même son électroménager, les garages collaboratifs, pour dépanner soi-même sa voiture, ou encore les ateliers couture, où l'on rapièce soi-même ses vêtements.
Une manière de dépenser moins, d'éviter la surconsommation, mais aussi, et cela peut surprendre, de passer un moment agréable. Car c'est sans doute la principale raison qui explique l'explosion de la tendance: toujours selon l'étude Créations et savoir-faire 2023, 94% des sondés affirment que le DIY est pour eux une activité épanouissante et qui embellit le quotidien.
Ils y trouvent le plaisir d'accomplir quelque chose, d'avoir entre les mains le résultat, palpable, de ses efforts, dans une société en quête de sens. D'où l'apparition d'un paradoxe: alors qu'il était d'abord associé à la "débrouille" pour faire des économies, le DIY est devenu un business à part entière.
Et un business qui pèse lourd sur l'économie mondiale: 800 milliards de dollars en 2024, selon les chiffres de Mordor Intelligence.
L'essor d'un business
De nombreux entrepreneurs se sont en effet rendu compte que nous étions finalement prêts à payer pour l'épanouissement que procure le DIY. On trouve donc désormais des coffrets de kits DIY pour absolument tout.
Sur le site de l'enseigne spécialisée Nature et découvertes, on compte pas moins de 200 références dans la catégorie "à faire soi-même": faire sa bière, faire ses bougies, faire sa décoration de Noël, ses chocolats, ses produits ménagers, ses cosmétiques, etc.
C'est d'ailleurs dans le secteur de la beauté que la tendance s'est d'abord développée: Aroma-Zone, né en 2000, a lancé ses recettes de produits de beauté faits maison en 2005 et en propose aujourd'hui 3000 différentes.
Dans un article de nos confrères du Figaro de mars 2024, sa PDG, Sabrina Herlory Rouget, se targuait d'avoir recruté plus d'un million de nouveaux consommateurs en 2023. Aujourd'hui, elle se partage le marché avec sa principale concurrente, MyCosmetik.
Ces marques misent sur l'aspect naturel des recettes, l'utilisation de seulement quelques ingrédients, des termes qui attirent des consommateurs de plus en plus méfiants vis-à-vis des produits chimiques présents dans les produits de beauté, qui souhaitent contrôler ce qu'ils appliquent sur leur peau... Et ce qu'ils mettent dans leur assiette, d'où le succès, en parallèle, des kits alimentaires.
Aujourd'hui, le DIY n'a plus grand-chose à voir avec le rejet de l'excès de consommation. Au contraire, il est devenu un produit de consommation à part entière, entouré d'un marketing léché, et qui se paye cher.
La recherche de l'expérience
Par exemple, un kit de sucettes en chocolat vendu sur Nature et découvertes au prix de 14,99 euros ne contient que 130 grammes de chocolat au lait. C'est un tarif plus élevé que pour un kilo de chocolat au lait en tablette vendu en supermarché. Bien sûr, le prix inclut aussi quelques ustensiles et la recette. Mais ce qui se paye là est avant tout l'expérience, plus que le produit final.
D'ailleurs, le concept d'expérience lui-même est devenu un produit marketing à part entière. En atteste le carton des plateformes qui mettent en relation artisans et particuliers pour la réalisation d'ateliers DIY et l'apprentissage d'un métier, d'un savoir-faire artisanal.
Le leader du secteur, Wecandoo, fondé en 2017, a augmenté ses résultats de 35% en 2023 par rapport à l'année précédente, avec un chiffre d'affaires qui a franchi le cap des 20 millions d’euros.
La plateforme avance le chiffre de 3000 réservations par jour pendant la période de Noël, au cours de laquelle elle réalise 40% de son chiffre d'affaires.
Des cadeaux qui mêlent découverte et partage et qui ont une seconde vertu: offrir une opportunité financière aux artisans qui ne vivent pas toujours très bien de leur artisanat.