Ikea, But, Conforama... Ces grandes enseignes vendent à prix mini ou donnent des meubles d'occasion

Des clients chez Emmaüs Pointe Rouge à Marseille pour la braderie des meubles des JO - BFM Marseille
Près de la moitié des meubles dont les Français se séparent alimentent la seconde main, selon une étude d'Écomaison de décembre 2023, un éco-organisme qui étudie le marché de l'occasion pour organiser le réemploi, la répartition et le recyclage des meubles.
D'après cette même étude, 19% des Français achètent plus de meubles d’occasion qu’il y a 5 ans. Un chiffre qui grimpe à 26% chez les 20-39 ans.
Ces dernières années, cette tendance de consommation s'est illustrée à travers la montée en puissance de plateformes comme Vinted, leboncoin, Ebay, Rakuten ou encore La Redoute. Mais qu'en est-il des grands magasins d'ameublement? RMC Conso vous éclaire sur ce phénomène, en pleine croissance.
Prix, écologie...
Plusieurs raisons peuvent expliquer le succès de l'ameublement d'occasion. D'abord, le prix. 66% des Français achètent un meuble principalement pour son prix, dont 75% chez les 20-39 ans.
Un critère d'autant plus important en cette période d'inflation. "Le prix reste un critère décisif. Les consommateurs sont très contraints financièrement. Donc ils veulent davantage s'équiper moins cher", analyse auprès de RMC Conso, Éric Weisman Morel, directeur en charge des filières de recyclage chez Écomaison.
Les Français se tournent aussi de plus en plus vers des meubles de seconde main pour la "dimension militante et solidaire". "Quand ils se débarassent de leurs meubles, plutôt que de les jeter, les Français les vendent ou les donnent. Et pour l'achat, ils préfèrent consommer intelligemment avec du neuf de qualité et réparable. Ils ont vraiment la volonté de consommer différemment", explique-t-il.
Surtout, le frein psychologique qui empêchait les consommateurs d'acheter de l'ameublement d'occasion s'est estompé avec le temps. C'est désormais plus accepté socialement, moins honteux et plus courant, comme c'est le cas avec le marché des vêtements de seconde main. Celui-ci bénéficie, depuis ses débuts, de l'attrait pour le vintage et de la recherche de pièces uniques et originales. Selon l'étude, aujourd'hui, près de 71% des Français n’ont aucun problème à acheter un meuble d’occasion.
Enfin, "la relation aux meubles a changé", d'après Éric Weisman Morel. "Avant, les consommateurs étaient très attachés à leurs meubles, il y avait vraiment une dimension patrimoniale. Et quand ils devaient s'en débarrasser, une vraie 'thérapie de la séparation' était engagée. Maintenant, les consommateurs changent leurs meubles plus régulièrement selon leurs étapes de vie ou tout simplement par envie de changer leur intérieur. La relation est beaucoup plus utilitariste", détaille-t-il.
Ainsi, "depuis 2018, le marché des meubles d'occasion connaît un grand développement, avec une augmentation significative des volumes. La tendance a pris sa place dans le marché", affirme le directeur des filières de recyclage.
"Ikea est en avance"
Très peu de grandes enseignes d'ameublement se sont néanmoins engagées dans cette voix, sauf Ikea. "Sur ce marché, Ikea est en avance. Il n'y a pas d'équivalent", pointe Éric Weisman Morel.
C'est en 2014 que la marque suédoise franchit un cap: elle crée un espace 'Seconde Vie', qui permet aux consommateurs d'acheter ou de revendre des meubles d'occasion de la marque. Une possibilité étendue, en 2022, aux accessoires.
Depuis l'été 2024, les espaces n'existent plus seulement en magasin. "Nos clients peuvent réserver des articles depuis chez eux en se connectant sur nos espaces 'Seconde Vie' en ligne", précise à RMC Conso Gaëlle Pain, directrice des ventes Ikea France.
Comment ça marche? Ces espaces, qu'ils soient accessibles en magasin ou en ligne, vous offrent deux possibilités. D'abord, vous pouvez revendre vos meubles ou accessoires Ikea à l'enseigne. Il suffit de vous rendre sur le site pour qu’une offre préliminaire de reprise soit créée.
"Ce montant varie en fonction de trois états: 'très bon', 'bon' et 'satisfaisant'. Le prix de reprise sera évalué à moins 40% pour le 'très bon état' et à moins 60% pour l'état 'satisfaisant', par rapport au prix d'origine. Si le rachat du produit est accepté, vous recevrez une carte d’avoir Ikea d’une valeur correspondant au prix de rachat de votre produit et valable dans tous les magasins", assure-t-elle.
Par ailleurs, "les membres Ikea Family bénéficient de 20% supplémentaires sur le montant de la reprise, tout au long de l’année", ajoute Gaëlle Pain. Ikea remet ensuite en vente les produits d'occasion au prix de rachat. Vous pouvez donc acheter des meubles ou des accessoires de seconde main de la marque "à des démarques de moins 40% à moins 60% du prix neuf". L'objectif pour l'enseigne, "promouvoir des modes de vie plus abordables et plus durables".
Dans cette même logique, le groupe propose des ateliers de customisation des meubles, présents dans les magasins. "Nous encourageons nos clients à relooker leurs meubles pour leur donner une nouvelle vie", et ainsi éviter de racheter du neuf. De plus, "de la visserie et de nombreuses pièces détachées sont mises à disposition de nos clients gratuitement" afin de privilégier la réparation.
En 2024, sur les 36 espaces de seconde main, 2,7 millions de produits ont été revalorisés en France contre 2 millions l’année précédente, soit une augmentation de 35%, affirme le groupe.
Un marché encore en développement
D'autres enseignes se sont engouffrées dans cette brèche. C'est le cas des magasins But et Conforama qui "ont des conteneurs maritimes à côté de leurs magasins pour y déposer des meubles d'occasion. Les associations les récupèrent ensuite pour les vendre à des prix solidaires", souligne le directeur des filières de recyclage d'Écomaison.
Ces deux enseignes, avec Ixina également, ont engagé des coopérations digitales. "Sur sa plateforme, Geev [l'application de dons, ndlr] propose des espaces labellisés avec une sélection de meubles d'occasion", nous apprend-t-il.
Pour autant, ce marché est encore "très progressif dans les enseignes et n'est pas aussi installé que celui du textile. Beaucoup commencent à découvrir le potentiel et recherchent un modèle pour y mettre un pied, notamment les magasins de bricolage comme Castorama et Leroy Merlin", décrypte Éric Weisman Morel.
En termes de volumes de meubles d'occasions vendus, "la part la plus significative, c'est de particulier à particulier. Ensuite, ce sont les associations à travers l'emblématique réseau Emmaüs, les ressourceries et les recycleries, suivies des enseignes d'ameublement", conclut-il.
Depuis 2022, la loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire (AGEC) oblige les distributeurs à reprendre les meubles usagés. C'est la raison pour laquelle de plus en plus d'enseignes vont être contraintes de suivre le mouvement.