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Tout à 1 ou 2 euros... Comment les magasins à prix unique maintiennent leurs prix contre vents et marées

Deux euros, c'est le prix auquel sont vendus tous les produits d'un magasin à prix unique.

Deux euros, c'est le prix auquel sont vendus tous les produits d'un magasin à prix unique. - PETER MUHLY / AFP

Des magasins où l'on peut tout acheter avec une simple pièce... Le concept existe depuis longtemps, mais peine à survivre. Malgré tout, quelques indépendants et une enseigne perpétuent le modèle.

Une spatule en inox, un pommeau de douche, un lot de trois paires de chaussettes ou encore une fausse petite plante verte en plastique... Le point commun entre ces quatre objets? Ils sont tous vendus au prix unitaire de deux euros, dans ce qu'on appelle des magasins à prix unique. Comment fonctionnent ces magasins? RMC Conso a interrogé Marc de Bisschop, président de l'enseigne C'est deux euros.

Un concept vieux de 90 ans

Proposer un prix unique pour tous les produits vendus dans un même magasin est loin d'être un concept nouveau. En 1932, la chaîne de magasins Monoprix est fondée et ambitionne de mettre en place ce principe, d'où son nom. Mais ce modèle économique plébiscité dans l'entre-deux-guerres ne dure pas.

Bien qu'il reste très populaire aux États-Unis et au Canada, seules quelques initiatives indépendantes et une enseigne qui regroupe 45 magasins résistent véritablement en France.

"Notre enseigne est née en 1993. A l'époque, le concept cartonnait en Espagne dans un contexte de consommation débridée. Il a fallu surmonter plusieurs crises, dont le passage à l'euro. Nous voulions conserver le repère fort qui consiste à payer son achat avec une seule pièce. 'C'est dix francs' est devenu 'C'est deux euros'", explique Marc de Bisschop.

Car pour lui, c'est là la clé du succès: un repère-prix qui permet de savoir combien on va dépenser avant même d'entrer dans le magasin, sans avoir à consulter les étiquettes, et de maîtriser son budget.

En termes de stratégie commerciale, pouvoir payer avec une simple pièce transforme aussi l'acte d'achat en quelque chose d'illusoirement indolore pour le porte-monnaie.

Des prix constants, malgré les crises

Comment maintenir sur la durée ces tarifs non seulement bas mais surtout constants, et faire en sorte que les produits s'adaptent au prix, et non l'inverse?

"C'est un énorme travail de recherche de fournisseurs et de confiance envers eux, également de négociations commerciales très rudes, souligne Marc de Bisschop. Il faut être capable de voyager partout, on a des fournisseurs essentiellement en Asie, naturellement, mais aussi en Egypte, en Turquie, etc."

Et si un produit est trop cher, un changement de matériau peut permettre de réduire les coûts. A l'inverse, s'il est trop bon marché, il est possible d'agrandir l'objet pour en faire une marchandise un peu plus onéreuse, et ainsi maintenir ce prix unique de deux euros.

"On peut aussi jouer sur les coûts marketing ou le prix de l'emballage... Pendant la crise du Covid, on a fait le pari qu'on arriverait à amortir l'évolution à la hausse de nos charges fixes. Et on l'a fait," ajoute-t-il.

Des prix bas qui séduisent de plus en plus de Français

C'est deux euros a même vu son chiffre d'affaire augmenter de 15% en deux ans. Avec l'inflation et la baisse du pouvoir d'achat, les magasins à bas prix ont conquis de nouveaux clients.

Car c'est bien sur ce créneau que se situe l'enseigne. On y trouve des ustensiles de cuisine, de la petite décoration, des accessoires, des jouets, quelques produits d'hygiène et de beauté, un peu de nourriture... En plus des produits fabriqués en usine pour son propre compte et de ses fournisseurs habituels, C'est deux euros rachète aussi des invendus et des fins de série, à la façon des destockeurs tels que Stokomani ou Noz.

"Nous avons la possibilité de stocker les produits. Donc pour obtenir les meilleurs prix, on achète à contre-courant, par exemple les collections de Noël au mois de janvier, pour les revendre l'année d'après", détaille le fondateur de l'enseigne.

Implantation en centre-ville

Ce qui distingue les magasins à prix unique des chaînes de magasins hard-discount comme Action ou Tedi? L'implantation en centre-ville, là où ces mastodontes ciblent plutôt les zones commerciales périphériques.

"La cible n'est pas la même, estime Marc de Bisschop. Nos clients sont des personnes qui passent devant nos magasins en se promenant, et qui entrent pour se faire un petit plaisir. Ils ne viennent pas pour remplir le coffre et faire des stocks, ce n'est pas du tout la même intention d'achat."

Autre différence, bien sûr, cette fameuse pièce de deux euros en écusson, qui reste d'ailleurs le moyen de paiement privilégié dans les magasins de l'enseigne: "Deux tiers des achats se font toujours en espèces chez nous, même si les paiements par carte augmentent de plus en plus. On le déplore, car on tient énormément à ce symbole."

Toutefois, le prix unique de deux euros n'est pas systématiquementmeilleur qu'ailleurs, il faut comparer. L'équilibre se fait sur des marges plus importantes sur certains produits, et moindres sur d'autres.

L'enseigne continue malgré tout de séduire, et prévoit l'ouverture prochaine de deux nouveaux magasins, dont un à Paris.

Charlotte Méritan