Contrôle d’identité dans les restaurants: "Un chantage absolu" et "une clé de bras" selon un patron
Devoir vérifier les identités des clients pour pouvoir rester ouvert. C’est la contrainte que ressent Denis Reynaud, gérant de deux bars-restaurants à Paris, alors que le gouvernement envisage de demander aux établissements de contrôler les cartes d’identité de leurs clients en plus du pass sanitaire.
"Donc ce sont les restaurateurs et les patrons de bar qui vont être responsables du fait qu’il n’y a pas de faux pass sanitaire, que tout se passe bien… Ce sont bientôt les restaurateurs qui vont être responsables du Covid en France, de son développement… C’est du chantage absolu, a-t-il dénoncé ce jeudi dans "Apolline Matin" sur RMC et RMC Story. S’il faut le faire, on va le faire. On n’est pas des professions qui descendent dans la rue et on n’est pas extrêmement liés. Et ils savent très bien qu’on va faire ce qu’on nous dit. Mais là, on est en train de nous faire une clé de bras pour faire quelque chose qui n’est pas de notre ressort. On n’est pas là pour faire du contrôle."
"On ne sait pas faire, estime Denis Reynaud. Ce n’est pas notre métier. Ce n’est pas pour ça qu’on fait ce métier. On sait que c’est compliqué aujourd’hui de contrôler l’identité, même les policiers ont du mal à le faire alors qu’ils ont la formation et tout ce qu’il faut. On fait déjà des contrôles de pass sanitaires pour sauver notre activité. (…) On est là pour vendre un moment de convivialité, sympa. Si le premier truc qu’on fait, c’est demander le pass sanitaire puis la carte d’identité. Déjà, il faut que je mette quelqu’un à la porte d’entrée pour le faire. Et on se met dans un contexte où c’est moins convivial. Evidemment, ça fait fuir."
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"Qui va payer ? Qui est formé pour faire ça ?"
Pour ce patron de bars-restaurants, l’argument de l’effort à montrer après le soutien financier de l’Etat au plus fort de la crise financière ne tient pas. "Les aides de l’Etat et le contrôle des identités, ça n’a rien à voir. Déjà, on est nombreux à avoir eu des aides qui ne couvraient absolument pas nos frais fixes. Il ne faut pas croire qu’on était en vacances pendant un an. Contrôler l’identité, ça prend deux minutes. Sauf que moi, j’ai 80 personnes par jour dans mon bar, donc ça fait 160 minutes de perdues. Qui va me les payer ? Qui est formé pour faire ça ? Moi, je fais 1m90, j’ai 55 ans. Si j’ai des types qui arrivent en face de moi, je peux leur répondre et leur expliquer. Ma petite serveuse de 21 ans, qui fait 1m55, si elle se trouve avec six mecs qui arrivent et qui ne veulent pas donner leurs cartes d’identité, je ne sais pas comment elle va gérer. Ça va faire du bruit, du désordre."
Denis Reynaud préfèrerait que les initiatives des restaurateurs pour renforcer la sécurité sanitaire soient plus mises en valeur. "L’enjeu, ce n’est pas la véracité des pass sanitaires, mais la crise du Covid. Il y a plein d’autres sujets qui ne sont pas explorés. Les mesures barrière, le masque, le gel… Nous, on a équipé nos établissements avec des purificateurs d’air, pour 10.000 euros. On change l’air sept fois par heure. On investit. On a porté ce sujet. On a écrit au président de la République, au ministre de la Santé. J’aimerais bien sûr des aides. J’ai travaillé dans l’univers du tabac. Le gouvernement a payé pour refaire les linéaires. On a un vrai enjeu de santé. On fait plein de choses. On a besoin d’aide et d’être écouté, dans un premier temps."