Allemagne: pourquoi les élections régionales ce dimanche s’annoncent cruciales

À la veille d’élection régionales, l’Allemagne annonce durcir ses lois sur les armes et l’immigration. Le contexte, c’est une semaine extrêmement tendue outre-Rhin. On vote dans deux régions ce dimanche, des scrutins locaux qui surviennent une semaine après l’attentat de Solingen. Une attaque au couteau qui a fait trois morts et huit blessés, revendiquée par Daesh et perpétrée par un Syrien en situation irrégulière. L’extrême droite capitalise sur le drame et le chancelier doit courir après… Berlin a annoncé ce jeudi une interdiction du port d’armes blanches, notamment dans les rassemblements populaires, mais aussi dans les transports. La ministre de l’Intérieur a également annoncé une suppression des aides pour les demandeurs d’asile entrés dans un autre pays de l’Union européenne avant de venir en Allemagne. Avant d’ajouter: "Nous travaillons pour parvenir à la possibilité d’expulser des criminels dangereux vers l’Afghanistan et la Syrie". Deux questions qui font aussi écho à des débats politiques en France.
Est-ce que l’Allemagne va plus loin que ce que l’on fait en France? Pour ce qui est des aides, c’est comparable. Depuis le vote de la loi immigration en France, l’allocation demandeur d’asile peut être suspendue en cas de manquement à la loi. Et un étranger en situation régulière doit attendre cinq ans ou justifier de deux à trois mois de travail pour bénéficier des aides au logement ou des prestations familiales. Pour ce qui est des armes blanches (couteaux, poignards), ça bouge aussi en France en ce moment. Une expérimentation est en cours dans une douzaine de juridictions. Les policiers peuvent sanctionner directement par une amende forfaitaire de 500 euros.
Deux partis "amicaux" avec la Russie
En Allemagne, dimanche, ce n’est pas une élection nationale, mais sa portée l’est et elle est même européenne. On vote dans les Land de Saxe et de Thuringe, deux petites régions d’ex-Allemagne de l’Est. Pourquoi en parle-t-on? La Thuringe par exemple, ce n’est que 2% du corps électoral allemand. Sauf que le scrutin pourrait constituer un choc politique en Allemagne. Les sondages annoncent un carton plein pour l’AFD, l’extrême droite que même Marine Le Pen juge infréquentable ici. Souvenez-vous, aux européennes, la tête de liste AFD avait osé une formulation de réhabilitation des SS.
En face, les partis de gouvernement classique sont hors-jeu, littéralement déclassés. Ils n’atteignent pas 50% des intentions de vote. C’est aussi parce qu’il y a une autre force populiste qui émerge: le BSW, un parti que l’on peut qualifier de gauche anti-immigration et pas franchement écolo. S’il grappille sur l’AFD, le BSW refuse pour autant le cordon sanitaire tendu par les autres partis. La réalité, c’est que la dynamique de ces deux mouvements isole la coalition au pouvoir du chancelier Olaf Scholz.
S’il faut attendre le scrutin, certains parlent déjà d’une victoire… de Vladimir Poutine. C’est pour ça que ce petit scrutin régional concerne l’Allemagne entière et même l’Europe. Car ce sont deux partis que l’on peut qualifier d’amicaux avec la Russie… Le BSW dénonce les sanctions imposées à Moscou, qui privent les Allemands de gaz russe. Pour l’AFD, c’est carrément pro-russes, puisque le parti estime que l’OTAN est responsable de la guerre en Ukraine. Le parti d’extrême droite est accusé d’avoir reçu de l’argent de la Russie, mais aussi d’avoir participé à la désinformation russe. Les élections de dimanche, c’est un séisme politique qui se profile. Une poussée si forte de l’extrême droite en Allemagne, ce sont les stigmates d’une réunification allemande qui n’a pas rempli ses promesses près de 35 ans après.