"J'ai mis sept mois à arriver en Europe": la mesure britannique d'expulsion au Rwanda ne démotive pas les migrants

Les appels se multiplient pour exhorter le Royaume-Uni à renoncer à expulser des demandeurs d'asile vers le Rwanda. Dans la nuit de lundi à mardi, le parlement britannique a adopté une loi "historique" saluée par le Premier ministre Rishi Sunak. Son gouvernement conservateur et présente cette mesure qu'il défend depuis 2022 comme un élément-clé de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine.
Les migrants arrivés illégalement sur le territoire, quel que soit leur pays d'origine, seraient ainsi renvoyés vers le Rwanda. A charge ensuite pour ce pays d'Afrique de l'Est d'examiner leur demande d'asile. Le gouvernement rwandais, qui récupère des dizaines de millions d'euros avec cet accord bilatéral, s'est dit "impatient d'accueillir les personnes relocalisées au Rwanda".
Le gouvernement britannique espère débuter les expulsions d'ici 10 à 12 semaines, Rishi Sunak a assuré lundi que les avions pour le Rwanda "décolleront, quoi qu'il arrive".
"Pourquoi nous envoyer là-bas?"
Amnesty International au Royaume-Uni a évoqué une "honte nationale" qui "laissera une tache sur la réputation morale de ce pays". L'ONU a demandé à Londres de "reconsidérer son plan". Le commissaire du Conseil de l'Europe pour les droits de l'homme, Michael O'Flaherty, a dénoncé dans ce texte une "atteinte à l'indépendance de la justice".
Pas certain que cette décision freine la volonté des migrants qui souhaitent se rendre en Angleterre. Soltan, un Afghan que nous avons interrogé à Paris ce mardi 23 avril, tentera malgré tout la traversée vers l'Angleterre cette année. Pour lui, il est inconcevable qu'il puisse être envoyé au Rwanda une fois sur place.
"J'ai mis sept mois pour arriver en Europe. Nous renvoyer au Rwanda, ce n'est pas normal! Pourquoi nous mettre là-bas?", s'interroge-t-il.
La mesure ne dissuadera pas non plus Sabah, afghan lui aussi, d'aller vivre au Royaume-Uni. "On veut tous vivre en Angleterre. Si des migrants voulaient venir dans mon pays, je les protégerais. J'analyserais leurs problèmes plutôt que de les envoyer au Rwanda", souffle-t-il.
"Je ne vois pas ce que je pourrais faire au Rwanda... Ce n'est pas une bonne décision pour les droits de l'Homme", poursuit-il.
"On craint le pire"
L'ONU a demandé au gouvernement britannique de "reconsidérer son plan". Un projet honteux pour le fondateur de l'association d'aide aux migrants Utopia 56.
"Ils sont prêts à tout. Même donner de l'argent à des pays pour faire le sale boulot", tacle Yann Manzi sur RMC.
"On n'est pas tout à fait sûr des droits fondamentaux dans ce pays. On craint le pire", poursuit-il. Malgré tout, les premiers vols pour le Rwanda pourraient décoller d'Angleterre courant juillet.