Le porte-avions Charles-de-Gaulle sous le contrôle de l'OTAN: ce qui change ou pas pour la France

Une première historique. Jamais un porte-avions Français n’avait été placé sous commandement étranger, et c’est ce qui va se passer pendant deux semaines. Le Charles-de-Gaulle, qui est le seul porte-avions français, va donc participer à des manœuvres de l'OTAN en Méditerranée.
Durant quinze jours, il sera, avec le groupe aéronaval qui l’accompagne, sous le contrôle opérationnel de l’OTAN. Les avions de chasse, les avions de surveillance, les hélicoptères et la flottille qui entoure le Charles-de-Gaulle, c'est-à-dire des frégates pour le défendre, un ou plusieurs sous-marins et un navire ravitailleur. Ainsi, tout ce groupe, et environ 3.000 marins, seront à la disposition de l’OTAN.
Une décision qui divise
Mais concrètement, qu’est-ce que cela signifie? Pendant deux semaines, le fleuron de la marine française répondra aux ordres d’un Américain. Le pacha du navire, seul maître à bord, restera le commandant français, le capitaine de vaisseau Georges Antoine Florentin. Il sera sous les ordres du chef du groupe aéronaval, français lui aussi, le contre-amiral Jacques Mallard, mais ils devront obéir à un amiral américain qui dirige la manœuvre depuis un état-major de l’OTAN basé au Portugal.
Mais cela ne plaît pas à tout le monde. Jean-Luc Mélenchon, en particulier, a fait part de sa tristesse face à ce qu’il appelle “une vassalisation”. La France serait, pour lui, dans cette affaire, un vassal des Américains. C'est-à-dire un inférieur, un subordonné. Florian Philippot, l'ancien bras droit de Marine Le Pen, utilise à peu près les mêmes termes et parle d’une soumission historique aux Américains.
Le ministre de la Défense Sébastien Lecornu dénonce des mensonges et affirme que la France ne perd jamais le commandement de ses forces placées sous le pavillon de l’OTAN.
Un intérêt militaire et diplomatique
Mais est-ce que c’est vrai? La France perd tout de même le commandement en acceptant de se placer sous les ordres d’un amiral américain, mais elle ne perd pas vraiment le commandement parce qu’elle peut reprendre son indépendance à tout moment.
Autrement dit, s’il devait y avoir une grave crise au Moyen-Orient ces prochains jours, si la France voulait reprendre la main sur le Charles-de-Gaulle pour utiliser comme elle l’entend les avions Rafale qui sont à bord, elle pourrait le faire à tout moment. “En un claquement de doigt”, comme disent les spécialistes.
L’intérêt de la France, dans cette histoire, est militaire et diplomatique. Militairement, les manœuvres communes font progresser l’interopérabilité. C'est-à-dire le fait pour les militaires de l'OTAN de mieux se connaître et de mieux coopérer.
Diplomatiquement, la France envoie un signal: elle est bien dans l’OTAN, aux côtés des Américains, face aux Russes et face à toute menace en Méditerranée.
La question des armes nucléaires
Le Charles-de-Gaulle est un porte-avions nucléaire, mais cela veut dire uniquement que son moteur est alimenté par une énergie nucléaire. Pareil pour le sous-marin nucléaire d’attaque qui l’accompagne. C’est un sous-marin à propulsion nucléaire, mais qui a des armes conventionnelles.
En revanche, il y a sur le porte-avions des Rafale qui font partie de la force aéronavale nucléaire (la FANU), une des composantes de la dissuasion française. Autrement dit, il peut y avoir des bombes atomiques dans les soutes du porte-avions. Ce sont des missiles qui transportent une charge nucléaire de 300 kilotonnes, soit 20 fois la puissance de la bombe de Hiroshima.
Mais il est évident que cette force nucléaire ne passe pas sous le contrôle de l’OTAN pendant ces manœuvres. Les armes nucléaires françaises sont à la main d’un seul homme: le président de la République.