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Russie: Alexeï Navalny est désormais incarcéré dans une colonie pénitentiaire en Arctique

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L'opposant russe emprisonné Alexeï Navalny, dont les proches n'avaient plus de nouvelles depuis près de trois semaines, se trouve dans une colonie pénitentiaire de Kharp, dans l'Arctique russe.

En Russie, Alexeï Navalny, le principal opposant à Vladimir Poutine, a été transféré dans un pénitencier du Grand Nord. Un stratagème pour l'isoler à quelques mois de l'élection présidentielle. Il avait "disparu" début décembre. Ses proches et ses avocats étaient sans nouvelle de lui. On sait maintenant où il était: pendant 20 jours, il était enfermé dans des trains en route vers le Grand Nord. 

Le militant anti-corruption de 47 ans vient de réapparaître dans une prison à 2.000 kilomètres de Moscou, au-delà du cercle polaire. Il a pu envoyer un message sur ses réseaux sociaux. Il dit qu’il va bien, qu’il ressemble au Père Noël parce qu’il n’a pas pu se raser pendant trois semaines.

Incarcéré dans un ancien goulag en Sibérie

Le pénitencier ne donne pas envie de s'y rendre. La colonie pénitentiaire n°3 a été construite sur un ancien goulag en Sibérie. Le Figaro indique qu'elle est surnommée le "Loup polaire". Les températures sont extrêmes. La semaine prochaine, il fera -28°C.

Les prisonniers y subissent des violences physiques et psychologiques. Ils manquent de vêtements et de produits essentiels. Il y a une tradition de bizutage à l'arrivée des prisonniers: ils sont généralement sévèrement battus sous la douche par les gardiens et les autres détenus.

Alexeï Navalny a été condamné à 19 ans de détention en "régime spécial". Ce qui n'est pas le cas de la colonie où il se trouve et veut dire qu'il y a pire encore. Il y a une prison à régime spéciale juste à côté d'où il se trouve, ce qui fait peser la menace d'un nouveau transfert et de conditions de détentions plus dures.

Plusieurs condamnations pour différents prétextes

Alexeï Navalny a été condamné des dizaines de fois pour différents prétextes, notamment pour avoir organisé des manifestations. Puis, il a été condamné pour une supposée escroquerie aux dépens de l'entreprise française Yves Rocher. Et il a aussi été emprisonné pour n'avoir pas respecté son contrôle judiciaire dans cette affaire.

Ensuite, sa peine a été alourdie avec de nouvelles condamnations pour "extrémisme" et pour "réhabilitation du nazisme". Et il est sous la menace d'un nouveau procès pour terrorisme qui pourrait lui valoir une longue peine supplémentaire.

En fait, c'est exactement ce qui se passait à l'époque de Staline. Les prisonniers politiques partaient au goulag avec une petite peine mais ils étaient régulièrement recondamnés sur place et ils n'en revenaient jamais.

L'isolement pour les prochaines élections

Alexeï Navalny savait ce qui l'attendait lorsqu'il est rentré en Russie. C’est pour cela qu’il a fait preuve d’un courage extraordinaire. En 2020, il avait été victime d’une tentative d'empoisonnement.

Des agents du FSB, l’ancien KGB, qui le suivaient depuis des années, avaient mis du poison, sans doute sur ses sous-vêtements, dans sa chambre d'hôtel en Sibérie la veille d’un voyage en avion. 

Le lendemain, c'est à bord d’un vol vers Moscou qu’il s’est soudainement tordu de douleur. 

Il doit la vie au pilote qui a décidé de se poser d’urgence. Navalny a ensuite été transféré en Allemagne, où il a été soigné. Un laboratoire allemand, puis un français, ont déterminé avec certitude qu’il avait bien été victime du Novichok, poison militaire dont l’usage est absolument interdit. 

A peine remis sur pied, Alexeï Navalny a décidé de rentrer en Russie, expliquant qu’il était impossible de s’opposer au régime de Poutine depuis l’étranger. Il est rentré à Moscou en sachant qu’il serait arrêté dès son arrivée. C’est ce qui s’est passé. Et cela fait maintenant plus de trois ans qu’il est enfermé, dans des conditions de plus en plus difficiles.

Son transfert vers le Grand Nord va permettre de l’isoler encore plus pour l'empêcher de s'exprimer dans la campagne électorale qui commence. Les élections sont prévues en mars prochain.

Nicolas Poincaré