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Mort de l'artiste Ben: des circonstances floues et une pluie d'hommages

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Benjamin Vautier, mieux connu sous son nom d'artiste Ben, est décédé dans des circonstances encore floues et au lendemain du décès de son épouse. De nombreux hommages lui ont été rendus.

Plus connu sous le pseudonyme de "Ben", Benjamin Vautier a été retrouvé mort dans sa maison, située à Nice (Alpes-Maritimes), ce mercredi 5 juin 2024, comme annoncé par BFM Nice Côte d'Azur. Célèbre notamment pour ses slogans rédigés en lettres manuscrites blanches sur fond noir, l'artiste s'est éteint à l'âge de 88 ans. Dans des circonstances encore troubles, puisque sa femme, avec laquelle il était marié depuis 60 ans, est décédée la veille, et qu'il a été retrouvé avec une balle dans la tête.

Le parquet de la ville de la Côte d'Azur a confirmé dans un bref communiqué "le décès de M. Benjamin Vautier, né en 1935, connu sous son nom d'artiste Ben", indiquant que l'homme "a été découvert sans vie à son domicile" et que les "premiers éléments font état d'une plaie par arme à feu". Il a précisé avoir ouvert "une enquête en recherche des causes de la mort".

Un couple "fusionnel"

Selon une source proche du couple citée par l'AFP, confirmant une information de Nice-Matin, Annie Vautier est décédée ce mardi d'un AVC. Ces sources, ainsi que les premiers témoignages recueillis par BFMTV, affirment que l'artiste s'est ensuite suicidé. Il n'aurait pas supporté l'idée de vivre sans sa femme.

Le couple s'était rencontré en 1963, indique leur fille Eva sur le site internet de sa galerie. Annie était "membre du collectif Théâtre Total", organisait ses propres performances artistiques et "participait aux expositions, aux publications et aux performances de Ben" depuis leur rencontre.

"Ben et Annie, c'était fusionnel. L'un sans l'autre n'existait pas. Et si c'était Ben qui était parti avant, je pense qu'Annie n'aurait pas survécu", a déclaré sur place à l'AFP Robert Roux, ami proche de la famille et adjoint au maire de Nice délégué à la Culture.

"Ben et Annie ne faisaient qu'un. Complémentaires, mais vraiment d'une façon extraordinaire. Elle le corrigeait de temps en temps dans ses excès, lui la taquinait en permanence et on ne pouvait pas voir Ben sans Annie et réciproquement. C'est un exemple fou d'un amour vraiment étonnant, impressionnant, touchant, émouvant", selon Robert Roux.

"Un orfèvre du langage"

"C'est une énorme perte pour la ville de Nice", car "Ben ne s'était pas enfermé dans ses acquis" et "continuait en permanence à créer, à provoquer, à faire ce qui est cet esprit de provocation niçois", a aussi souligné Robert Roux.

"Ce formidable artiste qui incarne une grande part de la culture à Nice nous a quittés", a posté le maire de la ville, Christian Estrosi, sur Instagram. "Hier, j'apprenais la disparition d'Annie sa femme. Ils sont réunis comme ils l'ont toujours été", a-t-il ajouté.

"Ben n’est plus, mais son art restera à jamais dans le cœur des Niçois", a réagi le président du département des Alpes-Maritimes, Charles Ange Ginésy.

Sur son compte X (ex-Twitter), le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Renaud Muselier, a écrit que "son art lui a permis de voir grand". "Reconnu de tous, en France et à l’international, il est toujours revenu dans le Sud, chez lui! Notre région perd un de ses artistes."

"Le monde de la culture perd une légende", a réagi sur les réseaux sociaux Rachida Dati. La ministre de la Culture a aussi salué un "orfèvre du langage" aux "écritures humoristiques, parfois satiriques" et dont "l'art continuera de faire rayonner la France à travers le monde".

L'art dans la vie quotidienne

Né à Naples, en Italie, Ben vivait à Nice depuis ses 14 ans. De nationalité franco-suisse (et arrière petit-fils du peintre suisse Marc Louis Benjamin Vautier), il avait fondé "l'Ecole de Nice" avec Arman, Yves Klein et Martial Raysse. Comme le rappelle l'AFP, il se revendiquera de "Fluxus", mouvement avant-gardiste né en 1962 à Wiesbaden, en Allemagne, et inspiré du Nouveau réalisme et du "ready made" de Marcel Duchamp, qui s'est employé à désacraliser l'art.

Exposé au Moma à New York ainsi qu'au centre Pompidou à Paris, Ben défendait la présence de l'art dans la vie quotidienne, sur les objets les plus banals, bien souvent avec une touche d'humour. Ses "écritures", des courtes formules souvent tracées à la peinture blanche sur fond noir semblant a priori sorties de la tête d'un enfant, seront reproduites jusque sur les cartables, trousses et cahiers de nombreux écoliers.

Maxime Ponsot