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Affaire des sondages de l'Elysée: tout ce qu'il faut savoir à l'ouverture du procès

EXPLIQUEZ-NOUS - Le procès de l’affaire des écoutes de l’Elysée s’ouvre ce lundi devant le tribunal de correctionnel de Paris.

Cinq proches collaborateurs de Nicolas Sarkozy à l’Elysée sont jugés pour avoir commandé des sondages dans des conditions très opaques. Et le Monsieur sondage à l’Elysée sous Nicolas Sarkozy, c’était le sulfureux Patrick Buisson. Il sera la vedette du procès qui commence ce lundi.

Ancien journaliste, venu de la presse d'extrême droite, il était celui qui avait soufflé à Nicolas Sarkozy ce que l’on a appelé la ligne Buisson, c'est-à-dire une ligne très à droite qui avait assuré la victoire de Nicolas Sarkozy en siphonnant les voix du Front national. L’ancien président ne cachait pas qu’il lui devait en grande partie sa victoire, qu’il faisait partie “des rares personnes à qui il devait d'être arrivé là.”

A l’Elysée, Patrick Buisson n’avait aucune fonction officielle, mais sa société “Publifact” avait signé plusieurs contrats avec la présidence. L’un deux assurait une rémunération de 10.000 euros à Patrick Buisson pour ses conseils. Un autre garantissait à sa société 1,5 million d’euros par an pour des études d’opinion.

En réalité, Patrick Buisson avait le droit de commander autant de sondages qu’il le souhaitait. Et il ne s’en est pas privé.

On a recensé environ 250 sondages entre 2007 et 2009

Avec un triple problème. Souvent ces enquêtes financées avec des fonds publics servaient surtout les intérêts politiques ou privés du président. Il y avait des sondages sur les prestations télévisées de DSK, ou sur l’image de tel ou tel dirigeant de gauche. D’autres, plusieurs autres sondages, avaient pour but de savoir si oui ou non, les Français souhaitaient que Nicolas Sarkozy se marie avec Carla Bruni. Premier problème qualifié par le parquet de détournement de fonds publics.

Deuxième problème, ces sondages étaient commandés sans mise en concurrence des instituts, sans respecter le code des marchés publics. Cela a été qualifié de “favoritisme”.

Enfin troisième souci selon l’accusation: Patrick Buisson commandait la plupart de ces sondages à Opinionway, il les revendait à l’Elysée avec une marge de 70%, puis il les revendait une deuxième fois au Figaro. Ce qui lui garantissait d’assez confortables bénéfices. C’est de cela qu’il va devoir répondre.

Patrick Buisson ne sera pas le seul dans le box des accusés

Non, il sera notamment au côté de Emmanuelle Mignon qui était directrice de cabinet du président et de Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée. C'est-à-dire les deux principaux collaborateurs du président de la République.

Emmanuelle Mignon fait remarquer que c’est sous la présidence de Nicolas Sarkozy que pour la première fois, la Cour des comptes a été autorisée à enquêter sur l’Elysée. Ce qui est exact et c’est d’ailleurs le tout premier rapport de la Cour des comptes qui a révélé ses dysfonctionnement sur les sondages.

Avant Nicolas Sarkozy, c’est l’institut Ipsos qui a eu pendant 25 ans un quasi monopole des sondages de l’Elysée sous François Mitterrand et Jacques Chirac et Jean-Marc Lech, le patron d'Ipsos a raconté bien plus tard qu’il était payé sur les fonds secrets et qu’il repartait souvent de l’Elysée avec des mallettes de liquide.

La défense va donc faire valoir que c’était pire avant et que la transparence a progressé sous Nicolas Sarkozy.

Nicolas Sarkozy sera le grand absent de ce procès

Il est protégé par l’irresponsabilité des présidents qui ne peuvent pas être poursuivis pour les actes accomplis pendant leur mandat. Article 67 et 68 de la Constitution, d’inspiration assez monarchique.

Au départ de cette affaire, le parquet a voulu classer la plainte de l’association Anticor en estimant que cette irresponsabilité valait aussi pour les collaborateurs du président. Mais à l’issue d’un long bras de fer, la cour de cassation a tranché. Les proches du président n’ont pas d’immunité. Ils peuvent être jugés pour avoir obéi à un président qui lui est à l'abri des poursuites. Et c’est bien ce qui va se passer.

Nicolas Sarkozy, lui, avait été cité comme témoin, mais il a fait savoir dans une longue lettre au président du tribunal qu’il ne viendrait pas. Il estime qu’un ancien président n’a pas à s'expliquer devant les juges sur son action en qualité de président. Ni comme mis en cause, ni comme témoin…

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Nicolas Poincaré (avec J.A.)