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Police-Justice

"Je me sens tellement humilié": une victime témoigne avant le procès d'un marchand de sommeil

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Jugé ce lundi à Marseille, un ancien policier louait pas moins de 122 logements délabrés. Il encourt une peine de sept ans de prison, s'il est reconnu coupable.

L’habitat indigne est au cœur d’un procès emblématique qui s’ouvre ce lundi 13 novembre à Marseille. Un ancien policier de 49 ans est jugé pour "soumission de personnes vulnérables à des conditions de logement indignes et mise en danger d’autrui".

Pendant des années, l'homme a loué à des personnes précaires et à des tarifs exorbitants 122 logements délabrés, rongés par l'humidité, envahis par les nuisibles.

En tout, près d’une cinquantaine de familles, dont une trentaine d’enfants, sont concernées par cette affaire. Un autre prévenu est d'ailleurs appelé à la barre, un homme de main employé pour recruter des locataires et encaisser les loyers.

"L'eau tombe de partout"

L'une des victimes a accepté de témoigner de son histoire auprès de RMC. Derrière les lourdes portes noires jonchées de détritus, c'est l’entrée de l’enfer pour Enzo, qui vit ici depuis 13 ans.

"Dès que le voisin se met à utiliser sa douche ou quoi que ce soit, j'ai l'eau qui se met à couler et qui tombe de partout", raconte Enzo, en pointant du doigt le plafond, humide, de son appartement.

Il vit avec 800 euros mensuels et paye 350 euros de loyer pour 10 mètres carrés. Il attend toujours les travaux promis par son propriétaire. "Chaque jour, c'était une promesse: 'ne vous inquiétez pas monsieur, on va refaire l'appartement dans les semaines qui arrivent', mais il n'a jamais respecté ses engagements", raconte Enzo.

Le propriétaire encourt jusqu'à 200.000€ d'amende

La situation plonge ce locataire dans une grande angoisse, qui se dit "humilié" par son habitat.

"C'est ça ou la rue, je n'ai pas tellement le choix finalement. Je ne dors pas, je m'isole. Je me sens tellement humilié, tellement sale, que je n'arrive pas à envisager d'avoir une relation avec qui que ce soit", se désole Enzo.

Sans travail et à bout de force, comme toutes les victimes du procès, il veut juste vivre dignement. Maître Hélène Biville Ambert, avocate d’Enzo, parle d'un "abus total de personne en détresse, précaire". Selon elle, il faut "absolument condamner tous ces propriétaires qui sont des marchands de sommeil et qui usent des personnes en difficulté et en précarité sociale".

De son côté, le propriétaire ne souhaite pas s’exprimer publiquement avant le début du procès, ce dernier devant se prolonger jusqu'au jeudi 16 novembre. Il encourt sept ans de prison et une amende de 200.000 euros.

Estelle Henry, Yoko Trigalot