RMC

La campagne de M. Hulot

-

- - -

Nicolas Hulot annoncera demain mercredi sa candidature à l’élection présidentielle, plus précisément à la primaire écologiste. Cette entrée en politique est l’expédition la plus dangereuse jamais tentée par l’animateur-candidat. Pourquoi ?

Parce que Nicolas Hulot a tout à perdre dans cette aventure-là : sa popularité, la réputation consensuelle d’Ushuaïa, son émission de TF1 qu’il va devoir abandonner. Beaucoup d’argent, aussi, parce qu’il va justement devoir mettre en sommeil son métier d’animateur et ses activités annexes ; et peut-être quelques illusions. Par exemple, il a cru que les écologistes allaient l’accueillir à bras ouverts. En fait, ils lui ont préparé une bonne primaire à la mode apparatchik : la plus rapprochée possible (fin juin) et avec le collège électoral le plus étroit possible, pour que son crédit dans l’opinion ne soit pas trop déterminant. Chez les Verts, on ne déroule pas facilement le tapis rouge…

On sait qu’il va affronter Eva Joly dans la primaire. Est-ce qu’il en devient d’emblée le favori ?

Incontestablement. Il apporte aux écolos une touche de panache et de brillant qui les dérange et qui les flatte à la fois, mais qui leur permet de rêver d’une audience bien plus large que leur assise électorale habituelle. Nicolas Hulot n’a peut-être pas le potentiel d’un Daniel Cohn-Bendit, mais il a un pouvoir d’attraction bien supérieur à celui d’Eva Joly ou de Cécile Duflot. D’après un sondage récent, six sympathisants écologistes sur dix font de lui leur favori. C’est un début prometteur. Ajoutons qu’il a quelques titres à faire valoir : en 2007, il avait fait signer aux candidats un « Pacte pour l’écologie » qui préfigurait le Grenelle de l’Environnement. Et en 2009, il a réalisé un film qui a marqué, sur l’état de la planète : « Le syndrome du Titanic ». Rien à voir, bien sûr, avec sa future campagne…

Chez les Verts, on lui reproche de ne pas être assez à gauche et pas suffisamment clair sur la question du nucléaire. Est-ce vrai ?

Il ne vient pas de la gauche ni de l’extrême gauche mais de TF1. Pour corriger cela, il a choisi de se déclarer à Sevran (Seine-Saint-Denis), une banlieue populaire dont le maire, Stéphane Gatignon, est un ex-communiste qui fait parler de lui ces temps-ci avec sa proposition de dépénaliser le cannabis, un sujet fédérateur chez les Verts… Hulot prépare un argumentaire qui lie la question de l’environnement aux excès de la mondialisation et il devrait en dévoiler les grandes lignes dans le Nouvel Obs, journal de référence de la gauche intellectuelle. Quant au nucléaire, il est certain que l’accident de Fukushima l’a poussé à franchir le pas. Comme Ushuaïa était sponsorisée par EDF, on pouvait avoir un doute mais il a dit clairement qu’il est pour la sortie du nucléaire et pour un référendum sur le sujet. C’est plus clair que le PS !

Pour qui sa candidature paraît-elle la plus dangereuse ?

A ce stade, pour tout le monde. Elle peut ringardiser les partis traditionnels, capter une partie du vote protestataire et provoquer un effet d’entraînement après la catastrophe du Japon. Pour ça, il faut que Hulot gagne la primaire sans trop s’abîmer. Ensuite, le plus dur commence : son handicap principal, c’est de ne pas être un vrai présidentiable. Donc il est condamné à s’entendre avec un des « grands » candidats pour imposer des priorités écologistes. Négocier entre les deux tours d’une présidentielle peut s’avérer plus périlleux qu’atterrir avec un ULM sur un morceau de banquise…

Ecoutez «le parti pris» du mardi 12 avril avec Hervé Gattegno et Jean-Jacques Bourdin:

Hervé Gattegno