La route solaire de Tourouvre, inaugurée par Ségolène Royal, s’éteint après des années de défaillances

C’était pourtant une innovation technologique hyper prometteuse… mais elle se termine malheureusement en fiasco. Sept ans après son inauguration, la première route solaire de France est en train d’être détruite.
Un projet enthousiasmant sur le papier, celui de routes dites “à énergie positive”, qui permettent de produire de l’électricité pour alimenter les villes en énergie. Une innovation française, inaugurée en 2016 à Tourouvre-au-Perche, dans l’Orne, par Ségolène Royal.
De nombreuses promesses...
L’idée est de transformer la route en panneau solaire géant. Une grosse surface noire exposée en permanence au soleil, cela paraissait idéal. C’est un revêtement spécial, des dalles de 7 mm d'épaisseur collées à une route déjà existante, qui captent les rayons et les transforment en électricité. Elles ont été conçues (en théorie) pour résister aux poids lourds. Les conducteurs ne ressentent aucune différence au niveau de l’adhérence.
Et sous cette route, une connectique va récupérer l’énergie produite et s’en servir pour alimenter en énergie des abribus, des feux rouges, des bornes de recharge pour véhicule électrique, mais aussi les bâtiments publics. On estimait qu’en recouvrant un kilomètre de routes, on pourrait alimenter l’éclairage public d’une ville de 5.000 habitants.
En hiver, ces plaques solaires devaient permettre de chauffer les routes, ce qui va empêcher le verglas de se créer et faire fondre la neige instantanément. Derrière cette première expérimentation grandeur nature, le groupe Colas, une filiale de Bouygues, et l’institut national de l’énergie solaire, qui voulaient se servir de la France comme une vitrine technologique avant de lancer des chantiers un peu partout dans le monde.
... Et de nombreuses défaillances
Les ambitions étaient immenses: équiper 1.000 km de routes solaires pour 2020. Sauf que la route prototype, longue d'un kilomètre, a vite montré les limites de cette technologie. La route, censée résister à tout, commence à s’affaisser (un panneau photovoltaïque ne fait pas le poids face à un tracteur). Les panneaux commencent à s’encrasser à cause des feuilles mortes et de la poussière.
Des nuisances sonores aussi, alors la vitesse a été limité à 70 km/h… Sans compter un orage qui a fait disjoncter la route. À tel point que le tronçon doit régulièrement être fermé, ce qui est assez énervant pour les locaux. Quant à la production énergétique, elle est… assez décevante. Elle devait permettre d’alimenter la totalité de l’éclairage public du village, finalement, elle ne peut fournir que trois logements.
Le problème est que, premièrement, les voitures et les poids lourds font de l'ombre, ce qui limite la production. Deuxièmement, les dalles sont à plat, là où idéalement, elles doivent être inclinées (sur un toit par exemple) pour bien capter le rayonnement solaire. Elle s’avère donc inefficace énergétiquement et économiquement…
Une leçon
Mais l’idée d’avoir des routes à énergie positive n’est pas définitivement enterrée. C’était un prototype et les acteurs du projet en ont tiré des enseignements. Clairement, la technologie n’est pas adaptée pour des routes standard où de gros véhicules roulent à grande vitesse, ce qui ne veut pas dire que la technologie elle-même est inutile.
Elle peut fonctionner avec des pistes cyclables, dont deux ont été installées aux Pays-Bas, ou encore sur des parkings. L’investissement a quand même coûté 5 millions d’euros de subventions à l’État, et beaucoup plus aux entreprises derrière cette technologie.