Ouragan Irma: A Saint-Martin, "on se prépare pour le pire"

Une vue satellite de l'ouragan Irma, le 2 septembre 2017. - AFP
Lloyd Saint-Léger a 32 ans. Il habite Saint-Martin depuis 1992. Patron de deux serrureries sur l'île, il raconte les heures de préparation avant le passage d'Irma, désormais classé en catégorie 5, la plus élevée.
"J'ai ma maison et mes boutiques à protéger. On a resserré toute la toiture, toutes les huisseries. Ensuite, il faut mettre des planches pour se protéger en cas d'inondation. Et relever tout ce qui est par terre. Parce qu'on parle du vent, mais il faut aussi faire attention à la montée des eaux. Quand ça arrive, on ne peut vraiment rien faire, c'est l'horreur.
On ne s'y habitue pas vraiment. C'est toujours imprévisible, on ne sait jamais ce qui va se passer. On ne sait jamais à quoi s'attendre, même si on connaît la force et la direction. Là, l'œil va passer sur nous. Ça veut dire que le cyclone va passer dans un sens, et puis dans un autre. Ça veut dire que tout ce qu'il va plier, il va le déplier et le casser. Heureusement, ma maison est assez récente, elle tient la route. Mais j'ai passé ma journée à aider des amis qui ont des magasins au bord de la plage.
"La seule panique, on la voit dans les quincailleries et les supermarchés"
Sur place, il y a ceux qui sont habitués. Ce n'est pas qu'ils le prennent à la légère, mais on sait ce que c'est. Et après il y a les autres, qui n'ont jamais vu ça et qui sont un peu dans la panique, dans le flou. Ils ne savent pas trop comment gérer le phénomène. Mais la seule panique, on la voit dans les quincailleries et les supermarchés. Là il y a du monde: les gens viennent chercher des packs d'eau, des bougies et des piles. Si j'avais eu des piles dans ma boutique, j'en aurais vendues à gogo.
J'ai deux enfants. La rentrée est repoussée à la semaine prochaine. Peut-être… Ils sont quand même habitués parce que tous les ans on a des risques. Ils appréhendent toujours mais ils savent ce que c'est. Sauf que là, les médias en parlent beaucoup, les gens en parlent beaucoup, et tout le monde a peur. Irma est censée arriver en catégorie 5, et selon certains ils pourraient même être dans une catégorie qui n'existe pas encore. Ma fille qui a 10 ans est forcément un peu plus inquiète.
"La peur est toujours un peu là, mais on est prêt"
En 1995, quand l'ouragan Luis est passé, j'avais 10 ans. On n'était pas préparé parce que personne ne savait ce que c'était un cyclone. Il y avait de la joie, parce que tout le monde s'entraidait. On s'est quand même retrouvé tous confinés dans la salle de bain. Avec mon père qui retenait les baies vitrées avec des matelas. Aujourd'hui, la peur est toujours un peu là, mais on est prêt.
Ça peut toujours être pire que ce qu'on pense. D'ailleurs, on se prépare pour le pire. C'est beaucoup de vent, mais ce n'est pas un truc qui va arriver et qui va soulever la maison. En tout cas pas la nôtre. Pour d'autres, ça craint un peu plus: ils ont des maisons plus vieilles, sujettes aux inondations, ils sont au bord de la mer. Là oui c'est dangereux".