Pollution à New Delhi: "C'est impressionnant, on ne voit plus rien, c'est de la purée de pois"

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Véronique Dieu, expatriée à New Delhi, est présidente de l'association Delhi Accueil:
"Ce genre d'épisode de pollution arrive chaque année à la même époque. Les paysans du Pendjab et de l'Haryana, des états voisins, brûlent leurs terres pour l'assainir des pesticides et des engrais et tuer les insectes qui seraient nuisibles à la production de riz.
C'est partout dans la ville. La ville de Delhi est encaissée, donc quand il n'y a pas d'air, pas de pluie et pas de vent, c'est comme un couvercle de pollution qui reste. Les Indiens continuent à vivre normalement, ils toussent un peu plus, ils crachent un peu plus et ont les yeux qui pleurent. Les expatriés sont mieux lotis étant donné qu'ils ont des purificateurs d'air à la maison. A cette période de l'année ils les font tourner 24 heures sur 24. A l'école française, il y a des purificateurs d'air dans les classes, donc ça n'a pas beaucoup d'incidence. Le proviseur surveille le taux de pollution, les enfants ne font pas de sport et certains parents un peu anxieux font porter des masques à leurs enfants même si l'on sait que ce n'est pas totalement efficace.
"Tout le monde est habitué"
La première fois j'ai été surprise mais comme ça arrivait à la suite des fêtes de Divali (la fête des lumières, ndlr) et en Inde, on fait beaucoup craquer de pétards et de feux d'artifice donc je m'étais dit que c'était la conséquence de ça.
Cette année le gouvernement a interdit les pétards et les feux d'artifice pour limiter la pollution. Une loi a aussi été passée pour ne pas brûler les terres avant de les mettre en jachère, mais les états n'appliquent pas la loi.
Tout le monde est habitué, tout le monde le sait. Quand les nouveaux expatriés arrivent, en général, ils ont été prévenus par leurs sociétés et ils ont bien vérifié qu'aucun enfant n'est asthmatique ou allergique à la poussière parce que sinon ce n'est pas le pays dans lequel il faut venir. Il faut avoir la carcasse dure pour tenir la route, c'est quand même un mode de vie assez dur l'Inde.
Les petits des rues de Delhi ont les yeux qui pleurent, mais toute la journée ils ont le nez dans le spots d'échappement donc on s'adapte. Pour eux, c'est juste l'hiver qui arrive, c'est leur quotidien.
Il y a une prise de conscience en Inde, mais on part de beaucoup plus loin parce que les pays occidentaux se sont servi de l'Inde comme d'une poubelle donc maintenant il faut demander aux Indiens d'avoir un pays nickel.
"C'est pire qu'un brouillard"
C'est exactement comme sur les photos. C'est pire qu'un brouillard parce que vous voyez pointer les rayons du soleil à travers un brouillard, là vous ne voyez rien, c'est la purée de pois. On ne voit rien, c'est comme si vous ne voyiez plus l'Arc de Triomphe pendant un mois. Ça fait 10 jours que ça dure, et ça devrait durer jusqu'à la fin du mois de novembre. On attend la pluie, on patiente.
C'est impressionnant mais il faut le prendre avec philosophie et recul. Le monde entier va évoluer comme ça, donc il faut mieux faire du yoga, respirer lentement et prendre du recul sinon on ne va pas s'en sortir. Les Indiens sont conscients de la pollution: le prix du parking a beaucoup augmenté pour que les voitures ne circulent pas pendant cet épisode de pollution. Delhi est de toute façon une ville polluée mais on a l'habitude. La force des Indiens c'est d'être toujours optimiste et de toujours garder le sourire".