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Les arrêts maladie limités à 15 jours? "Il y a des médecins qui font de la complaisance"

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L'exécutif planche sur la limitation de la durée initiale des arrêts maladie à 15 jours en ville et 30 jours à l’hôpital. "Ça fait huit ans que la Sécu n’est pas venue me voir", témoigne ce jeudi sur RMC un médecin qui dit "respecter" les consignes tandis que Georges, patron, dénonce les professionnels qui font de la "complaisance".

Le gouvernement de Sébastien Lecornu lorgne sur la durée des arrêts maladie dans son budget de la Sécurité sociale pour 2026. L'exécutif planche en effet sur la limitation de la durée initiale des arrêts maladie à 15 jours en ville et 30 jours à l’hôpital. Objectif affiché : freiner la flambée du coût des indemnités journalières, qui ont atteint plus de 11 milliards d’euros en 2024, et mieux encadrer des prescriptions jugées parfois trop longues ou peu suivies.

Dans l’Aube, Georges, patron d’une entreprise de deux salariés, ne cache plus sa colère. Pour lui, les abus d’arrêts maladie sont une réalité quotidienne. "J’ai deux salariés. L’un m’a envoyé un arrêt d’un mois et demi, et je le croise tous les jours, en pleine forme. Il me rit au nez", raconte-t-il ce jeudi au micro des Grandes Gueules, sur RMC.

Limiter les arrêts-maladies à 15 jours : pour ou contre ? - 16/10
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Alertée, la CPAM lui répond qu’un contrôle aura lieu, mais qu’il n’en connaîtra pas le résultat. "Alors j’ai fait appel à un détective privé. L’un de mes employés avait une double activité et s’est même présenté chez mon assureur pour obtenir le maintien de salaire."

Un autre dossier l’a encore davantage exaspéré : "Un accident du travail, soi-disant une entorse au poignet. Vingt-sept mois d’arrêt ! Quand je l’ai revu, il n’avait rien, pas d’attelle, pas de douleur. J’ai convoqué l’inspection du travail, demandé les feuilles de soins : aucune réponse." Pour Georges, la responsabilité vient aussi des professionnels de santé: "Il y a des médecins qui font des arrêts de complaisance, c’est tout."

"Ça fait huit ans que la Sécu n’est pas venue me voir"

De son côté, Jean-Daniel, médecin généraliste en zone semi-rurale, comprend la volonté du gouvernement de mieux réguler les arrêts, mais craint une réforme trop rigide. "Ça fait huit ans que la Sécu n’est pas venue me voir. Une agente m'a dit qu'ils 'ne disent plus rien'" à ceux qui suivent les recommandations. "Je n’ai jamais eu de remarque sur mes arrêts", explique-t-il dans Estelle Midi.

Le projet du gouvernement prévoit que la durée initiale d’un arrêt maladie ne pourra plus dépasser 15 jours en cabinet de ville. Pour aller au-delà, le patient devra revoir son médecin pour obtenir une prolongation. Une mesure censée encourager le suivi médical, mais que Jean-Daniel juge ambiguë. "Pour un patient dépressif, par exemple, on ne fait jamais un mois d’arrêt d’un coup. On le revoit chaque semaine." Selon lui, la mesure des 15 jours "n'est pas si mal" mais "limite le pouvoir médical."

Le texte du budget précise également que le motif de l’arrêt devra désormais figurer sur le document transmis à l’Assurance maladie, afin de faciliter les contrôles. Une nouveauté qui, selon plusieurs syndicats de médecins, risque d’alourdir la paperasse sans réduire les abus.

"Ce que je n’aime pas, c’est la logique globale, poursuit Jean-Daniel. J'ai du mal à garder des fonctionnaires territoriaux dans ma patientèle car il n'y a aucun contrôle." Et se souvient d’une patiente lui ayant demandé un mois d’arrêt pour "descendre se reposer chez sa fille dans le Sud".

Pour le gouvernement, cette réforme vise à responsabiliser les prescripteurs et à endiguer une dérive financière devenue préoccupante. Les arrêts maladie de courte durée ont explosé depuis la pandémie, tandis que les indemnités journalières pèsent toujours plus lourd sur les comptes sociaux.

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