Eau minérale, eau de source ou eau du robinet: quel est le meilleur choix?

L'eau n'a décidément pas bonne presse en ce moment. Pollution aux microplastiques, aux PFAS, aux pesticides, les scandales s'enchaînent. Le dernier en date, celui des eaux en bouteille. En janvier 2024, une enquête de Radio France et Le Monde avait révélé l'utilisation de traitements illégaux par de nombreuses marques d'eaux.
Dans le cadre de cette même enquête, une commission d'enquête sénatoriale vient de mettre au jour une contamination bactériologique sur certains forages exploités par Nestlé Waters, notamment pour l'eau Perrier. Des matières fécales y ont été détectées.
Des traitements ont été utilisés, avec la complaisance des autorités, pour purifier cette eau. Non seulement c'est interdit, mais en plus, selon le sénateur socialiste Alexandre Ouizille, le risque sanitaire n'était pas écarté malgré les traitements.
Cette affaire pose de multiples questions: est-ce sécurisé de boire de l'eau en bouteille? Vaut-il mieux boire de l'eau en bouteille ou de l'eau du robinet? Quelles différences entre toutes ces eaux? RMC Conso vous explique.
Eau de source, minérale ou du robinet
Eau de source, eau minérale ou eau du robinet, les options pour s'hydrater sont nombreuses. Au total, 172 eaux sont conditionnées et commercialisées en France. En parallèle, nous avons pourtant un excellent réseau de distribution d'eau potable. Mais celle-ci suscite de la méfiance: 86% des Français boivent de l'eau en bouteille, selon l’Observatoire Marques, imaginaires de la consommation et politique de la Fondation Jean-Jaurès.
Sur ces 172 eaux, 81 sont de source. Il s'agit d'eau d'origine souterraine, embouteillée à la source, pure et sans traitement (en théorie). Ces eaux en bouteille peuvent provenir de plusieurs sources.
87 sont des eaux minérales, qui répondent à la même définition à la différence qu'elles ne proviennent que d'une seule source. Elles ont donc une composition minérale quantifiable et stable, d'où leurs allégations santé et nutritionnelles (riche en magnésium, en calcium, etc).
4 sont des eaux rendues potables par traitement. Comme l'est d'ailleurs l'eau du robinet: une eau à 60% d'origine souterraine et à 40% en provenance des rivières, lacs, fleuves... Ces eaux dites de surface étant plus exposées aux diverses pollutions, elles sont effectivement traitées avant d'arriver à nos robinets. Des processus de filtration sont utilisés, ainsi que du chlore (en quantité maîtrisée et faible, donc sans risque pour la santé).
Eau minérale traitée, eau minérale quand même?
Le propre de l'eau embouteillée de source ou minérale est donc d'être suffisamment pure pour ne pas nécessiter de traitement. C'est la raison pour laquelle l'utilisation de procédés de filtration par certaines marques d'eau fait scandale: si l'eau en bouteille est traitée de la même manière que l'eau du robinet, quel intérêt, pour le consommateur, d'en payer le prix fort? Rappelons que l'eau en bouteille est 100 à 300 fois plus chère que l'eau du robinet.
Sur ce point, Nathalie Karpel Vel Leitner, directrice de recherche au CNRS et spécialiste des dépollutions de l'eau, contactée par RMC Conso, nuance:
"L'eau en bouteille reste à l'origine bien plus pure que l'eau du robinet, elle provient uniquement d'eau souterraine mieux protégée car prélevée à des profondeurs plus importantes. Moins impactée par l'activité humaine elle contient forcément moins de micropolluants."
"La microfiltration a eu pour but principalement de prévenir le risque bactériologique, le problème étant que si la ressource est contaminée et qu'elle nécessite un traitement, soit on autorise le traitement, soit on interdit la vente de ces eaux," affirme-t-elle.
Les eaux minérales ont malgré tout un intérêt majeur: la stabilité de leur composition minérale. "Les eaux minérales ont des compositions intéressantes pour traiter certaines fragilités et peuvent être recommandées par des médecins," explique la spécialiste. Des eaux riches en magnésium, par exemple, sont préconisées pour les problèmes de transit.
Mais attention, les eaux trop minéralisées peuvent être néfastes si elles sont consommées à trop long terme (entraîner des problèmes rénaux notamment). D'où la recommandation de varier les eaux et de choisir des eaux peu minéralisées si on n'a pas de pathologie.
L'eau du robinet, 2euros par an
L'eau du robinet peut être un bon compromis: alliée du pouvoir d'achat, elle ne coûte que 2 euros par an et est bien plus écologique que l'eau en bouteille. La méfiance persistante à son égard n'est pas justifiée selon les experts.
Car si, au moment où elle est captée, cette eau est plus polluée que l'eau en bouteille, elle "subit des traitements qui sont suffisamment importants pour être dénuée de risque sanitaire", affirme Nathalie Karpel Vel Leitner. La première contrainte étant l'élimination de toute contamination microbiologique pour éviter les maladies.
Cette eau est donc sûre, en tout cas pour une grande majorité de la population française. Il existe malgré tout des régions dans lesquelles la qualité de l'eau est moins bonne, et même quelques communes où sa consommation est interdite. C'est le cas, par exemple, à Châtenoy dans le Loiret. Pour aider les consommateurs à y voir plus clair, UFC Que Choisir a publié une carte interactive indiquant la qualité de l'eau commune par commune.
Selon Le Monde, 10 millions de Français reçoivent une eau dont la qualité n'est pas garantie en raison de la présence de pesticides. Faut-il s'en alarmer? À long terme, la dégradation générale de la qualité de l'eau est un problème à ne pas négliger et les experts appellent à la mise en œuvre de solutions.
Il est pour l'instant difficile de lier la présence de certaines molécules à des pathologies précises, mais les cancers représentent, selon Santé publique France, la plupart des pathologies associées aux polluants chimiques de l’eau de distribution observables aujourd’hui.
Nathalie Karpel Vel Leitner rappelle toutefois que c'est parce que les techniques analytiques sont de plus en plus performantes qu'on arrive désormais à détecter ces micropollutions à des seuils très faibles. Autrement dit, plus on cherche, plus on trouve. La dépollution complète est donc particulièrement complexe:
"Dans l'eau, il y a des constituants d'origine naturelle non dangereux dans des quantités 1000 fois supérieurs aux constituants issus de la micropollution, c'est très compliqué de cibler uniquement ces derniers, qui sont présents à l'état de traces."
L'eau, bien moins polluée que l'alimentation
À court terme, pour le consommateur, les bienfaits de l'eau restent évidemment largement supérieurs aux risques et l'eau reste d'ailleurs bien moins polluée que le reste de notre alimentation.
"L'eau du robinet est de très bonne qualité par rapport aux autres sources de pollution auxquelles on est exposé, dans une salade, ou un plat cuisiné...," souligne la chercheuse.
"Dans un kilo de nourriture, il y a 500.000 fois plus de polluants que dans un litre d'eau, et l'eau ne représente, selon une étude de l'Anses, que 5% de la part totale de notre exposition aux pesticides dans l'alimentation," indiquait France Culture dans une émission début mai.
L'eau du robinet est l'aliment le plus surveillé, avec une soixantaine de paramètres contrôlés. Si le chlore utilisé pour la purifier peut lui donner un goût désagréable, il est possible de l'éliminer grâce à des solutions de filtration à la maison, comme les carafes filtrantes. Mais attention à bien les utiliser: si l'on ne change pas les cartouches suffisamment régulièrement, on amène dans notre eau plus de bactéries que sans...
Eau de source, eau minérale ou eau du robinet, quelle que soit l'eau que vous choisissiez de consommer, n'oubliez pas qu'il est recommandé de boire au moins 1,5 litre d'eau par jour et par personne.