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"Les industriels nous ont un peu enflés": la grande distribution pourrait se priver de certains produits

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La guerre des prix pourrait éclater entre industriels et distributeurs. Chez ces derniers, certains sont prêts à se passer des grandes marques dans leurs rayons si les premiers refusent de faire un geste sur leurs prix.

Les grandes marques chez Système U, c'est bientôt fini? Le distributeur pourrait se passer des références qui refuseraient de baisser leurs prix, afin de protéger les Français de l'inflation qui pourrait atteindre les 23 à 25% sur les produits alimentaires d'ici juin.

Une pratique déjà mise en place en Allemagne où la plus grande enseigne de supermarché (Edeka) a choisi de se passer de certaines marques les plus connues, refusant les hausses de prix jusqu'à 20% demandées par les industriels, révèle Franceinfo. Les barres chocolatées Mars ont ainsi été remplacées par des marques distributeurs. Une décision qui a un coût. Edeka pourrait perdre jusqu'à 300 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Les prix des matières premières de retour à leur niveau d'avant-guerre

Le patron de Système U, Dominique Schelcher, se dit prêt à faire de même après avoir déjà banni PepsiCo France de ses rayons. "Nous ferons des choix qui se verront. L'époque est à faire des choix plus radicaux, y compris dans cette consommation. S'il le faut, on le fera", a-t-il promis sur BFM Business.

Les distributeurs estiment que le retour des prix de l'énergie et des matières premières à des niveaux d'avant la guerre en Ukraine ne justifie plus de telles hausses de tarifs. Ainsi, les biscuits Prince de Lu ont augmenté de 25% en un an, soit 10 points de plus que la hausse moyenne du rayon biscuit. Pendant ce temps, le prix du blé a baissé de 40%.

"C'est tout à fait normal, c'est le système libéral d'économie de marché", défend ce vendredi sur RMC le critique gastronomique Périco Légasse, qui rappelle un précédent bras de fer il y a une dizaine d'années, entre Lactalis, premier groupe laitier, et le distributeur Leclerc. "Lactalis a fini par mettre un genou à terre après avoir été interdit dans les Leclerc", raconte-t-il. "Ils les ont fait revenir à genoux. La grande distribution a une puissance terrible", ajoute Périco Légasse.

"Nous avons 1,36% de rentabilité"

De nouveau confronté à une situation similaire, Lactalis se défend aujourd'hui, alors que le prix du camembert Président a augmenté de 13,5% en 2022. "Notre but, c’est de vendre les produits. Et si on fait ça (ne pas négocier, ndlr), c’est qu’on est à la limite, qu’on ne peut pas baisser au-delà", soutient ce vendredi sur RMC Christophe Piednoël, directeur général de la communication et relations extérieures de Lactalis. "Nous avons 1,36% de rentabilité, c’est extrêmement faible. On veut protéger la filière alimentaire et continuer à investir", ajoute-t-il.

"Les industriels nous ont un peu enflés", estime cependant Périco Légasse. "Sur 2022, ils ont fait des bénéfices absolument gigantesques. Le distributeur n'est donc pas obligé de prendre le fournisseur qu'on lui impose", ajoute-t-il.

Pour Thierry Moreau, ce sont "les décennies de matraquage publicitaire et de marketing" qui poussent les gens à acheter de la marque, avec l'impression d'acheter "un goût et une qualité". "Sortir de cette habitude, c'est très compliqué", alerte-t-il. Quant à la baisse des prix, il déplore que cela se répercute "toujours moins vite que quand cela augmente".

G.D.