Les légumes et salades en sachets ont la cote, mais sont-ils aussi bons que les légumes en vrac?

Un rayon salades en sachet dans un supermarché. (photo d'illustration) - PHILIPPE DESMAZES / AFP
Sept Français sur dix achètent des légumes en sachets. On entend par là légumes prêts à cuire en sachets, crudités en sachets, fruits et légumes découpés en sachets... Et bien sûr salade en sachet, qui représente 85% des ventes.
Selon le Syndicat des fabricants de produits végétaux frais prêts à l'emploi, sur les quatre premiers mois de l'année 2025, les ventes sont en hausse de 10% par rapport à la même période en 2024.
Un engouement surprenant, à l'aune des chiffres des années précédentes, qui traduisaient plutôt une forte baisse. Comment analyser ce rebond? Il semble que gain de temps et praticité triomphent désormais sur les préoccupations écologiques. Explications.
Fort engouement dans les années 1980
1984. C'est l'année de naissance de la salade en sachet. Dans les années qui suivent, plusieurs producteurs lancent leur gamme de légumes prêts à consommer, comme Émile Ryckeboer, un agriculteur de la Manche qui a raconté à nos confrères de Ouest-France qu'"au début, personne n'y croyait".
Payer plus cher pour ne pas avoir à laver et découper ses légumes, à l'époque, l'idée semble absurde. Elle fait pourtant son chemin petit à petit: dès 1986, le journal de France 3 Rhône-Alpes s'intéresse à ce nouveau phénomène et interroge les consommateurs.
"Pour les ménagères, c'est rapide, c'est frais, c'est bon," entend-on dans le reportage.
Au fil des ans, la salade en sachet s'est ancrée dans les habitudes de consommation. En l'espace de 30 ans, la production a été multipliée par cinq.
L'inflation a impacté le secteur
Mais à partir des années 2020, l'engouement se tarit. On observe une baisse des ventes de 8% sur cinq ans, selon Emily Mayer, du cabinet Circana, interrogée par TF1 en 2024. L'effondrement s'est même accéléré l'année dernière. Selon les chiffres de Circana, relayés par LSA, la baisse en valeur est de 7,2% en 2024. Au point que plusieurs articles de presse parlent alors d'une possible disparition de la salade en sachet. Bonduelle cesse carrément d'en produire...
L'explication: la crise sanitaire, qui a permis à des millions de gens de retrouver le temps de laver eux-mêmes leur salade, mais surtout l'inflation, qui a fortement impacté ce secteur.
Il faut dire que les légumes déjà lavés et découpés sont un luxe qui se paye très cher: à poids équivalent, la salade en sachet est quatre fois plus onéreuse que la salade entière, vendue en vrac. Le melon découpé en morceaux et vendu en barquette, cinq fois plus cher que le melon entier.
Mais avec le recul de l'inflation, ces produits si pratiques séduisent à nouveau. Les marques ont aussi innové pour résister. Elles ont su s'adapter aux demandes de consommateurs de plus en plus pressés, mais malgré tout soucieux de manger sainement: en mars, Les Crudettes sortaient leurs "Légum'box", une lunch box végétale à réchauffer au micro-onde, ainsi que les "légumes cuisson minute", des légumes en sachets micro-ondables.
C'est d'ailleurs sur le segment des légumes prêts à cuire que la hausse des ventes est la plus significative: +29% sur les quatre premiers mois de 2025.
Des pesticides dans les sachets
Mais ces légumes prêts à l'emploi sont-ils aussi bons que les frais, vendus en vrac? Pas si sûr.
Concernant les salades en sachets, une enquête du magazine 60 millions de consommateurs révélait en mars 2024 la présence de trop nombreux résidus de pesticides dans ces produits.
"Sur les 26 références, seules cinq sont indemnes de contamination: deux laitues et trois mâches. Pour le reste, nous avons détecté une moyenne de 3,8 résidus de pesticides par salade contaminée… sachant que nos analyses ont identifié 28 molécules différentes. Un véritable cocktail!" regrettait l'article.
Il mettait également en lumière, dans certains sachets, la présence de résidus chlorés issus du lavage intensif subi par ces salades pour assurer leur qualité sanitaire, même si la limite réglementaire n'est heureusement jamais dépassée selon les tests de l'association.
Pour ce qui est de l'aspect nutritionnel, une autre enquête du magazine soulignait la perte de vitamines induite par la découpe et le lavage des légumes en sachets ou barquettes. Selon Benoît Diagne, diététicien-nutritionniste cité dans l'article, les salades en sachet perdent jusqu'à 50% de leur teneur en vitamine C au bout d'une semaine.
"Le rinçage qu’ils subissent afin d’éliminer tout contaminant potentiel, bien plus intensif qu’à la maison, provoque en outre une perte en vitamines hydrosolubles significative, réduisant particulièrement la vitamine C et certaines vitamines B," affirme-t-il.
Un choix vraiment pas écolo
Par ailleurs, l'origine des fruits et légumes prêts à consommer n'est pas toujours clairement indiquée. Elle est pourtant obligatoire depuis le 1er janvier 2025. Mais il n'est pas rare d'apercevoir les mentions floues "UE ou non UE" sur les emballages. On trouve donc, dans ces sachets, des fruits et légumes qui ne sont pas forcément de saison et qui peuvent avoir fait le tour de la planète.
Et même si, pour la santé, mieux vaut manger des légumes en sachets que pas de légumes du tout, les emballages en plastique utilisés pour ces produits sont autant de déchets qui auraient pu être évités. C'était même l'argument utilisé par l'institut NielsenIQ en 2024 pour expliquer la baisse des ventes dans ce secteur: "Les Français sont de plus en plus attentifs à leur consommation d’emballage, quand celui-ci peut être évité."
Visiblement, en 2025, leur attention s'est détournée de ces problématiques pour privilégier le gain de temps et la praticité.