Pas cher et rapide pour le déjeuner: pourquoi le snacking s'impose largement dans les supermarchés

Une femme fait ses courses (photo d'illustration). - THOMAS SAMSON / AFP
Sandwichs, quiches, pizzas, salades composées... Depuis quelques années, l'offre de snacking s'est multipliée et diversifiée dans de nombreux secteurs.
En France, en 2024, la consommation hors domicile représentait plus de 100 milliards d'euros, soit une hausse de 1,9% par rapport à l'année précédente, d'après une étude Circana Food service.
Parmi les secteurs les plus porteurs, il y a les boulangeries. Fait saillant de cette tendance: "le sandwich, qui était à la base le produit phare, reste en tête mais perd du terrain face à d'autres produits montants et ne représente plus que 40% des ventes", explique à RMC Conso Bernard Boutboul, président de Gira Conseil, un cabinet de conseil et d'accompagnement spécialisé dans la restauration hors domicile.
"Pour les 28.000 boulangeries en France, qui pèsent 10,6 milliards d'euros, près de 55% de leur chiffre d'affaire provient du snacking", assure-t-il.
"La queue aux caisses des supermarchés"
L'autre principal secteur qui a surfé sur la tendance du snacking, ce sont les supermarchés. Mais comme le pointe le président de Gira Conseil, "les chiffres sont assez confidentiels".
Pour autant, celui-ci évoque la partie snacking de Carrefour (rayon frais, kisoque sushis etc.) qui représenterait 10% de son chiffre d'affaires. Un chiffre "énorme" et "en hausse", selon Bernand Boutboul. D'autant que la restauration à emporter "n'est pas leur métier de base", souligne-t-il.
Le groupe Casino, avec ses enseignes Monoprix (617 magasins) et Franprix, nous avance que le segment du snacking, avec le rayon frais notamment, correspondrait à 14% de leur chiffre d'affaires.
"Au global, en comptant également les fast-food, les cinémas ou encore les stations-services, le marché du snacking est évalué à 20 milliards d'euros sur les 120 milliards que pèse la restauration. Il représente aujourd'hui 58% du chiffre d'affaires du secteur. Il y a vraiment une ultra-concurrence de la non-restauration, avec un service à table qui est devenu minoritaire. Dans le pays de la gastronomie, c'est historique", analyse le président de Gira Conseil.
Comme il le résume, "à 13 heures, la queue n'est plus devant les restaurants, mais aux caisses des supermarchés". Mais alors, comment expliquer que les supermarchés soient devenus la cantine des travailleurs?
"Une solution pratique et rapide"
La première raison du succès des supermarchés sur la pause déjeuner, c'est qu'il s'agit de lieux ancrés dans les habitudes des consommateurs qui font tous quotidiennement leurs courses, et qu'ils collent parfaitement aux attentes des consommateurs.
"Il s'agit d'un public actif et citadin, qui a un mode de vie plutôt accéléré, peu de temps pour déjeuner et qui recherche une solution pratique et rapide", affirme Bernard Boutboul.
Dans un reportage de TF1, l'un d'eux confie ainsi y venir "tous les midis quasiment", "parce que le soir je n'ai pas forcément le temps de me faire à manger".
Effectivement, "la question du repas est au cœur de tous les foyers, qui ont moins le temps de cuisiner et qui passent aussi moins de temps à table. Le snacking permet de limiter ce casse-tête en proposant des solutions de repas clés en main", poursuit Monoprix.
Dans la logique des boulangeries, les supermarchés ont aussi réussi à "ne pas uniquement viser le moment du midi", affirme la chaîne de magasins.
Ainsi, "les supermarchés sont ouverts toute la journée et proposent une offre évolutive du petit-déjeuner, en passant par le déjeuner, la pause gourmande et même le dîner", ajoute le président de Gira Conseil.
"10 à 15 références par an"
Si les consommateurs se tournent vers les supermarchés pour leur repas du midi, c'est aussi pour le choix proposé. "D'année en année, l'offre de produits s'élargit et les rayons s'agrandissent", constate Bernard Boutboul.
À titre d'exemple, "on gagne 10 à 15 références par an, juste en face de l'entrée du magasin. Quand les gens rentrent, ça les attire. Ce sont des produits qui ont une forte valeur ajoutée, on marge beaucoup dessus", affirme à TF1 James Gonzales, chef de secteur de l'Intermarché de Gattières (Alpes-Maritimes).
Franprix revendique, quant à elle, "autour de 2.000 références de restauration à emporter disponibles en magasins". Mais concrètement, comment cette offre de snacking se matérialise dans les supermarchés?
De manière assez classique, et désormais répandue, via des produits frais: sandwichs, salades, plats cuisinés, boissons à l'unité, desserts etc. Dans le cas de Monoprix, il s'agit de références avec des dates limites de consommation courtes.
Parfois, certains supermarchés proposent du snacking chaud: viennoiseries, pizzas, quiches, paninis etc. Chez Franprix, c'est à l'entrée des magasins. Récemment, le groupe a d'ailleurs noué un partenariat avec le géant américain des donuts, Krispy Kreme.
Côté Monoprix, il existe un espace boulangerie dédié. "Les produits sont faits sur place et il y a même des 'MyPay', des meubles qui permettent de maintenir au chaud les différents produits", nous décrit le magasin. La référence la plus vendue reste, encore aujourd'hui, le traditionnel jambon-beurre.
Recettes originales, restauration sur place...
L'enseigne propose également des "stands avec des barquettes en libre-service sur de la cuisine asiatique, des plats bistronomiques, de la Méditérannée. Encore une fois, tout est préparé sur place. La théâtralisation est importante pour donner envie aux clients", détaille Monoprix.
Celle-ci pointe que les plats asiatiques sont les plus performants. La deuxième référence la plus vendue au global, c'est le poulet tandori. Les fruits découpés ont aussi la cote.
Autre possibilité: de la restauration et des places assises pour manger sur place. C'est par exemple le cas du Monoprix du centre commercial Cap 3000 de Saint-Laurent-du-Var où il y a une halle gourmande et près 65 places assises. Cet espace de restauration représenterait une part non négligeable du chiffre d'affaires de ce supermarché.
Pour autant, cette option reste encore marginale dans les supermarchés. Il n'y aurait qu'une trentaine de magasins Monoprix proposant ces espaces. Et pour cause, "ils sont soumis à une réglementation. Dès 19 places, il faut des toilettes et de la vaisselle réutilisable. Donc "ce n'est pas toujours facile à mettre en place", nous pointe l'enseigne.
Certains, comme Carrefour ou E. Leclerc, ne les proposent même pas du tout "pour des raisons de sécurité, notamment pour éviter que les gens ne stationnent dans les magasins", renchérit le président de Gira Conseil.
Des prix 10% moins chers
Enfin, "le prix reste un critère de choix pour les consommateurs", affirme Bernard Boutboul. "C'est moins cher que la boulangerie et que le restaurant", assure un client sur TF1.
En effet, "les prix en supermarchés sont moins chers de l'ordre de 10% par rapport à Brioche Dorée, Paul par exemple, ce qui n'est pas négligeable", poursuit le président de Gira Conseil.
Et les enseignes l'ont bien compris, en proposant des offres adaptées aux budgets des Français, voire à des sommes inférieures au panier moyen qui s'élève aujourd'hui à 9,90 euros.
Franprix propose ainsi une formule petit-déjeuner à 1,90 euros (café et croissant) et une formule repas à 5,50 euros (pizza, boisson et dessert). Monoprix nous assure que 100% de ses sandwichs baguette sont à moins de 5 euros. En moyenne, le ticket côté repas est à 4,80 euros et à 1,80 euros pour les boissons.
L'avantage pour certains, c'est qu'ils peuvent aussi régler la note avec leurs tickets-restaurant. D'après Bernard Boutboul, "30% des titres-restaurant" sont utilisés pour cet usage.
"Le snacking est aujourd'hui devenu un mode de consommation à part entière qui touche toute la France", conclut Monoprix. L’objectif du Groupe Casino d’ici dix ans, c'est que le segment de la restauration à emporter atteigne 50% de leur chiffre d’affaires.