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Sandwichs, quiches, pizzas... En boulangerie, le snacking est-il vraiment fait maison?

La boulangerie-pâtisserie Roy Le Capitole, située rue de France à Nice (Alpes-Maritimes), en décembre 2024 (photo d'illustration).

La boulangerie-pâtisserie Roy Le Capitole, située rue de France à Nice (Alpes-Maritimes), en décembre 2024 (photo d'illustration). - BFM Nice Côte d'Azur

Plus de la moitié du chiffre d'affaires des boulangeries est lié à leurs produits de snacking (sandwichs, quiches, pizzas, salades, etc...). Une tendance qui ne fait que croître depuis quelques années. Mais comment s'assurer que ces produits soient faits maison? RMC Conso vous répond.

Sandwichs, quiches, pizzas, cakes salés, salades composées... Depuis quelques années, les boulangeries ont démultiplié et diversifié leur offre de snacking dans les vitrines de leurs enseignes.

Fait saillant de cette tendance: "le sandwich, qui était à la base le produit phare, reste en tête mais perd du terrain face à d'autres produits montants et ne représente plus que 40% des ventes", explique à RMC Conso Bernard Boutboul, président de Gira Conseil, un cabinet de conseil et d'accompagnement spécialisé dans la restauration hors domicile.

"Pour les 28.000 boulangeries en France, qui pèsent 10,6 milliards d'euros, près de 55% de leur chiffre d'affaire provient du snacking", souligne-t-il.

Au global, la vente au comptoir, qui regroupe notamment le snacking mais aussi les fast-food, représente 54% du marché de la restauration. "Dans le pays de la gastronomie, c'est historique qu'elle soit passée devant le service à table", assure-t-il.

D'après lui, la mutation a commencé il y a une quinzaine d'années. Le basculement s'est ensuite réellement opéré à partir de 2018, et depuis, "la tendance ne fait que s'accélérer, avec une croissance de 11% du chiffre d'affaires des boulangeries en 2024". "Un chiffre colossal, surtout en temps de crise et avec une baguette en chute libre", pointe Bernard Boutboul.

Comme il le résume, "sur l'heure de table, la queue n'est plus devant les restaurants, mais devant les boulangeries". Alors, pourquoi un tel engouement autour du snacking? Et comment s'assurer du caractère fait-maison des produits? RMC Conso vous explique.

"Un commerce d'affect"

Comment expliquer ce succès? Il y a plusieurs raisons à cela. Comme le révélait une étude d'American Express et de Statista en juin dernier, la boulangerie est le commerce de proximité préféré des Français. 75% des consommateurs s'y rendent régulièrement.

"C'est un lieu ancré dans les habitudes et qui rassure les Français", nous affirme Paul Boivin, délégué général de la Fédération des entreprises de boulangerie-pâtisserie (FEB).

Un constat partagé par Bernard Boutboul. "C'est justement parce qu'ils sont un commerce d'affect qu'ils étaient les mieux placés pour se lancer dans le snacking. En plus, ils ne partaient pas de rien puisqu'ils faisaient déjà des sandwichs."

L'autre principale raison, c'est bien sûr "les problèmes grandissants de pouvoir d'achat", poursuit-il. Et le snacking répond parfaitement à cette problématique avec des formules snack salé, dessert et boisson autour d'une dizaine d'euros.

Un budget, mais aussi une localisation qui ne laisse aucun public de côté. "Les réseaux de boulangerie se sont particulièrement développés au niveau des ronds points ou dans les zones commerciales en périphérie des villes", développe Paul Boivin. La tendance du snacking s'est également adaptée aux évolutions sociétales.

"Après le Covid, de nombreuses boulangeries se sont dotées de salles. Comme les autres lieux de restauration, les consommateurs pouvaient désormais se restaurer sur place. Et même en télétravail, c'est rapide et pratique d'aller juste chercher sa formule", décrit le délégué général de la FEB.

Finalement, les boulangeries ont adopté une véritable stratégie de montée en gamme de leurs produits. "Elles sont devenues de vrais lieux de vie avec une image très différente et plus propre que celle de la malbouffe associée aux fast-food. Elles sont ouvertes toute la journée et proposent une offre évolutive du petit-déjeuner, en passant par le déjeuner et la pause gourmande, boostée aussi par la partie coffeeshop", détaille le président de Gira Conseil.

"Rien n'oblige les boulangers à faire maison ces produits"

Aujourd'hui, les consommateurs sont de plus en plus exigeants sur la qualité et la fraîcheur des produits qu'ils mangent. Problème: "comme ils partent du principe que le pain est fait maison, ils font aussi parfois le raccourci sur l'ensemble des produits", avance Bernard Boutboul. Mais ce n'est pas forcément le cas.

"Comparé aux restaurants où c'est indiqué sur les menus notamment, dans les boulangeries, les consommateurs peuvent moins savoir si les produits sont faits maison", indique-t-il.

Et pour cause, "alors que la fabrication maison du pain est encadrée par la loi, rien n'oblige les boulangers à faire maison leurs autres produits", révèle Paul Boivin.

Des contrôles par la Répression des fraudes

Pour autant, comme le pointe le délégué général de la Fédération des entreprises de boulangerie-pâtisserie, la partie snacking est "contrôlée de près par la Répression des fraudes".

D'après lui, "les contrôles sont parfaitement aléatoires et ont été multpliés par trois", selon les remontées qu'il a eu auprès de boulangers.

"En 2024, près de 1150 boulangeries ont été contrôlées par nos services", nous assure la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Un chiffre qui peut, cependant, sembler faible face au nombre total de boulangeries sur le territoire.

Lors de ces contrôles, différents aspects sont évalués, selon elle: l'appellation "boulanger" qui interdit la congélation des pâtons, la composition et l’étiquetage des pains, l'information du consommateur sur les prix et les règles relatives à la mention "fait maison" pour les plats préparés et produits de snacking.

En effet, grâce à ce fameux logo en forme de maison, vous pouvez savoir en un coup d'oeil ce qui est fait maison de ce qui ne l'est pas. "Le professionnel doit afficher la mention 'fait maison' ou 'maison' (ou le logo dédié) pour chacun des plats concernés ou, si l’ensemble des produits de la carte sont faits maison, en affichant la mention ou le logo à un endroit unique visible par tous les consommateurs", explique la DGCCRF.

Cette appellation connaît des abus. Pourtant, d'après Paul Boivin, les boulangers n'ont aucun intérêt à le faire. "Il y a tellement de concurrence, les boulangeries n'ont pas intérêt à lésiner sur la qualité de leurs produits. De toute façon, tout finit par se savoir et les consommateurs s'en rendent vite compte. L'expérience consommateur est devenue un vrai levier. Et au final, cela créera une mauvaise publicité pour le commerce."

"Dans le cas où la mention ou le logo 'fait maison' sont utilisés alors que les conditions d’élaboration des denrées alimentaires concernées ne sont pas conformes à la définition réglementaire, la pratique peut être appréhendée comme une pratique commerciale trompeuse passible d’une peine maximale de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 300.000 euros", rappelle la DGCCRF.

Existe-t-il d'autres garanties sur le fait-maison du snacking? D'après Bernard Boutboul, vous pouvez vous fier à l'appellation "boulanger", où le professionnel a l'obligation de pétrir et de fabriquer son pain, et donc sur la qualité des sandwichs notamment. L'appellation "boulangerie", quant à elle, permet aux boulangers de travailler avec des produits congelés.

Pour le reste, certaines enseignes "pétrissent et font cuire leurs produits devant les clients, qui sont plongés dans le processus de fabrication et confrontés aux odeurs. Les boulangeries font vivre une véritable expérience aux consommateurs, c'est une manière de les rassurer sur la qualité", conclut le président de Gira Conseil.

Contrôles de la DGCCRF, logo "fait maison", pétrissage en direct... Tous ces éléments peuvent vous aiguiller sur la qualité des produits de snacking, sans pour autant vous garantir complètement la fabrication maison. Si vous avez un doute, vous pouvez toujours poser la question ou encore comparer le goût et les prix des produits d'une boulangerie à l'autre.

Emma Forton