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Immobilier: faut-il assouplir les conditions d'emprunt? "La capacité d'achat a été torpillée"

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Dans l'immobilier, les taux de crédits augmentent, le volume des prêts octroyés baisse et les prix se stabilisent. Les Français achètent de moins en moins et c'est tout un pan de l'économie qui est menacé. Face à une crise qui se profile, le ministère de l'Economie veut assouplir les conditions d'emprunt mais la Banque de France veut éviter un surendettement des ménages.

Une logique implacable. Avec la remontée des taux d’intérêt, le nombre de crédits immobiliers accordés en France baisse fortement après une année 2021 record. Le volume des prêts immobiliers a chuté de 40%. Si un particulier pouvait encore espérer emprunter à un peu plus de 1 % sur 25 ans fin 2021, impossible aujourd'hui d’obtenir un prêt à moins de 3%.

Les banques et les courtiers, chargés de négocier les taux pour les particuliers, mettent en cause une réglementation trop stricte. Le problème selon eux? Un taux maximum destiné à protéger les emprunteurs mais accusé par ses détracteurs d’empêcher les banques de prêter en période de remontée des taux.

Ainsi, certains voient leurs demandes de prêts refusées malgré des revenus confortables. Car le rapport entre le montant total des dépenses liées à l'habitation et le revenu du foyer a été fixé à 35%, avec une durée d'endettemment limitée à 27 ans.

"Je ne vois plus de primo-accédants"

Mehdi, courtier en immobilier en Seine-et-Marne, estime pourtant que ce taux d'endettement maximum est "absurde". "Quelqu'un qui gagne 10.000 euros, contre quelqu'un qui gagne 3.000 euros, ne va pas manger trois baguettes de plus. Le 'reste à vivre' est beaucoup plus important. Avec ce 35%, on voit qu'on a des énarques déconnectés de la réalité ", déplore-t-il dans "Les Grandes Gueules" sur RMC et RMC Story.

"J'ai deux clients qui gagnent bien leur vie. Ils avaient, il y a un an, un budget de 1,25 million d'euros. Ils sont revenus me voir il y a 15 jours, leur budget est de 950.000 euros. La capacité d'achat a été torpillée. Et des gens qui ont acheté quand l'immobilier était haut, alors qu'il baisse aujourd'hui, qui doivent déménager, ils se retrouvent avec des queues de crédit après avoir vendu. Il y a un blocage total", alerte-t-il.

Le ministère de l'Economie veut bien assouplir ces conditions mais la Banque de France appelle à la prudence et à ne pas laisser les ménages se surendetter. Quitte à laisser d'autres aspirants à la propriété sur le carreau? "Je ne vois plus de primo-accédants", assure Mehdi, craignant un avenir encore plus sombre. "On va avoir une pénurie de biens en location sur le marché, notamment à cause des notes énergétiques", avertit-il.

Des taux d'intérêts en hausse, pas compensés par les baisses des prix

Maël Bernier, la porte-parole de meilleurstaux.com se veut plus prudente: "Il faut assouplir mais pas pour tout le monde", estime-t-elle sur le plateau des "Grandes Gueules". "La question de l'assouplissement va porter sur ceux qui ont de très bons revenus. Il faudra donc juger de qui peut dépasser ce taux de 35%. Il faut assouplir mais selon les catégories", explique-t-elle, appelant à freiner des jeunes couples déjà endettés, mais à prêter à des quinquagénaires même s'ils ont déjà des crédits.

Le marché de l'immobilier s'en retrouve peu impacté. Les prix se stabilisent mais ne baissent pas. "Les taux d'intérêt sont passés de 1 à 3%, il aurait fallu que les prix des biens baissent de 25% pour compenser", assure Maël Bernier. Si les prix restent élevés, c'est notamment parce que certains peuvent se permettre d'acheter: "Il y a des inégalités générationnelles. Les gens de plus de 60 ans revendent des biens plus grands pour acheter plus petit et peuvent acheter cash, ils n'ont donc pas besoin de crédit", conclut-elle.

G.D.