Boutique sans argent, Geev Shop ou Free Shop... Connaissez-vous ces magasins où tout est gratuit?
À quatre semaines de Noël, commence la course aux cadeaux. Mais alors que le budget moyen des Français consacré aux fêtes de fin d'année est en baisse, le prix reste évidemment le premier frein à l'achat des présents que nous offrirons à nos proches.
À chaque problème, une solution. Et, aussi surprenant que celui puisse paraître, pour les porte-monnaies vides (littéralement vides), il existe des magasins où l'on ne passe pas à la caisse. Des magasins sans étiquettes. Des magasins où tout est... Gratuit.
Où sont-ils? Qu'y trouve-t-on? Qui se cache derrière? Comment fonctionnent-ils? RMC Conso vous explique.
Paris, Mulhouse, Poitiers, Toulouse
Ils s'appellent Le magasin pour rien, à Mulhouse, Free Shop, à Poitiers, La boutique sans argent, à Paris... Les magasins où tout est gratuit fleurissent dans plusieurs villes de France.
On y trouve un peu de tout: des vêtements, des chaussures, de la vaisselle, des livres ou encore des jouets... Et même un peu d'high tech, nous affirme Hakim Baka, fondateur du dernier né des magasins où tout est gratuit, Geev shop, à Fenouillet, près de Toulouse.
"C'est sûr que vous n'y trouverez pas le dernier iPhone. Mais on a quelques téléphones d'anciennes générations, oui," glisse celui qui, après le succès de son application dédiée au don Geev, a décidé de se lancer dans l'aventure de la boutique "physique" au mois de septembre.
Évidemment, tout ce qui se donne dans ces magasins est issu de la seconde main. Il s'agit de dons de particuliers ou d'entreprises, faisant également de ces boutiques un réceptacle pour tous les objets en bon état que l'on stocke dans nos placards mais que l'on n'utilise plus.
Les magasins où tout est gratuit ne fonctionnent toutefois pas sur le principe du troc: on peut très bien venir y chercher quelque chose sans rien déposer en retour, et vice-versa.
Don et réemploi
Dans un système où l'on pourrait craindre les ruptures de stock, Hakim Baka assure que "les objets entrants et sortants s'équilibrent naturellement, il y a toujours quelque chose à mettre en rayons".
Il faut dire que, selon une étude menée par Ebay l'année dernière, chaque Français a chez lui 36 objets qu'il n'utilise pas.
"Le réemploi constitue un gisement inépuisable, toutes initiatives confondues on n'est même pas à 10% de tout ce qu'on pourrait sauver," abonde Hakim Baka.
Pour réguler les flux et éviter que certains ne profitent un peu trop du système, ces magasins limitent le nombre d'articles pouvant être emportés: cinq par jour à La boutique sans argent, cinq par semaine chez Geev shop.
La plupart des initiatives de magasins gratuits sont lancées par des associations et fonctionnent grâce à des subventions, des dons et des bénévoles pour tenir boutique. C'est le cas pour les magasins de Paris, Poitiers et Mulhouse.
Gratuit... Presque
Une petite contribution est généralement demandée: une adhésion à l'association, de quelques dizaines d'euros par an, ou bien le paiement d'un euro symbolique, dans La boutique sans argent. Mais le modèle est fragile: cette dernière vient d'annoncer qu'elle allait dorénavant étiqueter certains articles à bas prix, ne pouvant plus se permettre de rendre tout gratuit.
Face à l'équilibre précaire du modèle associatif, le Geev shop de Toulouse propose un fonctionnement un peu différent: rattaché à l'application Geev, il a le statut d'entreprise et est niché au cœur d'un centre commercial. Pour pouvoir venir y chercher des objets, il faut s'acquitter d'un abonnement de 40 euros par an.
Le terme de magasin gratuit peut donc sembler un peu abusif, disons qu'il s'agit d'un magasin "presque" gratuit. L'abonnement est indispensable à la survie du modèle:
"On ne fait pas des millions... Notre seul revenu, c'est l'abonnement. Nous avons eu la chance de trouver un bailleur qui a largement participé à notre installation," explique Hakim Baka.
Relancer les centres commerciaux
Pour pallier le manque d'attractivité des centres commerciaux, de plus en plus nombreux à tomber en désuétude, le Geev shop de la Galerie Espaces de Fenouillet permet d'attirer une clientèle de curieux qui, après y avoir fait un tour, fera peut-être ses courses dans le supermarché du centre. Tout en offrant à ce dernier la possibilité de redorer son image, en se présentant comme porteur d'un modèle vertueux, encourageant l'économie circulaire.
"On est aussi un service complémentaire pour les autres magasins du centre qui ont des invendus, des produits légèrement abîmés qu'ils ne peuvent pas commercialiser, etc... Plutôt que de les jeter, ils nous les donnent," ajoute Hakim Baka.
Le principe même du magasin gratuit permet par ailleurs de se délester d'un certain nombre de charges: pas de caisse enregistreuse, pas d'étiquettes à imprimer et apposer, un personnel restreint... Pour un fonctionnement optimisé, Geev shop a fait le choix de n'ouvrir que deux jours par semaine, le week-end.
Et cela fonctionne: les 2000 visiteurs hebdomadaires viennent de tous horizons. Certains y voyant un gain de pouvoir d'achat, d'autres un geste écoresponsable. Car les magasins où tout est gratuit ne s'adressent pas spécifiquement aux personnes en situation de précarité mais sont ouverts à tous.
"Notre mission première ce n'est pas la solidarité mais le réemploi. Même si notre projet a aussi, naturellement, une visée sociale. On travaille d'ailleurs avec des associations, dont Emmaüs," indique à ce sujet le fondateur de Geev shop.
Ambitieux, ce dernier souhaite ouvrir de nouveaux Geev shop dans plusieurs villes de France d'ici l'été 2025.