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Les nitrites bientôt exclus de la nourriture pour animaux, mais toujours présents dans la notre

Le nitrite de sodium est toujours autorisé dans la charcuterie destinée à la consommation humaine.

Le nitrite de sodium est toujours autorisé dans la charcuterie destinée à la consommation humaine. - CHRISTOPHE SIMON / AFP

Les fabricants de nourriture pour chiens et chats n'ont pas renouvelé l'autorisation leur permettant d'utiliser des nitrites dans leurs produits. Les croquettes et pâtées pour chats et chiens ne contiendront bientôt plus ces additifs.

Un changement qui fait réagir. Les nitrites, dont l'utilisation dans les produits d'alimentation humaine fait polémique, ne sont désormais plus autorisés dans la nourriture pour chiens et chats. En effet, contrairement à ce que nous affirmions dans un premier temps, en citant une information du Parisien qui parlait d'une décision de la Commission européenne, ce sont les producteurs eux-mêmes qui ont retiré leur demande de réautorisation de mise sur le marché pour cet additif.

Un retrait à la demande des industriels

Contactée par BFMTV, la Commission européenne explique que le non-renouvellement du permis d'utiliser les nitrates dans la fabrication de nourriture pour animaux s'est traduit par le "retrait de l’autorisation provisoire de cet additif pour les chiens et les chats uniquement". L'institution insiste sur le fait que ces mesures sont mises en place à la demande des industriels, et non pas "dans le cadre de risques avérés pour la sécurité".

En effet, les nitrates sont des additifs controversés, accusés de provoquer des risques de cancers. Et malgré le rapport rendu en juillet 2022 par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) qui confirme le lien entre cancers et charcuterie, les nitrites restent largement utilisés dans la fabrication de produits destinés aux humains.

Couleur rosée et conservation

Les sels de nitrite et de nitrate (E249,E250,E251 et E252) sont des additifs qui permettent de donner une couleur rosée et donc plus attractive au jambon qui est naturellement plutôt terne. Ils accélèrent également le processus de fabrication et allongent la durée de conservation des produits.

Pour justifier son utilisation, les industriels brandissent également un argument sanitaire. Ils affirment que ce dernier est essentiel pour éliminer des éléments pathogènes comme la listeria, la salmonelle ou encore la toxine botulique. Un argument largement controversé puisque de nombreux petits producteurs, mais aussi des marques grand public, proposent de la charcuterie sans nitrites. Cette dernière est toutefois plus chère à l'achat car son processus de fabrication est plus long.

Il convient toutefois de préciser que le nitrate et le nitrite de sodium ne sont pas des éléments cancérigènes en tant que tels. C’est seulement une fois qu’ils sont en contact avec la viande qu’ils libèrent des molécules cancérigènes.

Des mesures jugées trop frileuses

Huit mois après l’avis de l’Anses, le gouvernement a publié un “plan d'action” établi par les ministères de la Santé et de l’Agriculture. Plutôt que d'interdire ces additifs, ce dernier appelle les industriels à limiter leur usage de 20 à 25% dans la fabrication du jambon cuit et des lardons. Pour d’autres catégories comme l’andouillette et les rillettes, le gouvernement donne de six à douze mois aux fabricants pour réduire les teneurs.

Dans la foulée, les associations de consommateurs et de lutte contre le cancer sont montées au créneau pour dénoncer des mesures jugées trop frileuses. “Quatre mille nouveaux cas de cancers pourraient être évités chaque année par la suppression de ces nitrites”, a par exemple regretté Daniel Nizri, cancérologue et président de la Ligue contre le cancer.

Un "risque de cancer pour les pauvres"

En croisade contre ces additifs depuis plusieurs années, le député du MoDem Richard Ramos, interviewé par le Parisien affirme que les lobbys, bien présents dans le domaine de la charcuterie, le sont beaucoup moins dans celui de l’alimentation animale. Il appelle le gouvernement à agir rapidement pour éviter de creuser les inégalités:

“Il faut penser à la santé de nos concitoyens, particulièrement les plus modestes, car les plus aisés, eux, achètent de plus en plus des sans nitrites. Une alimentation à deux vitesses se crée et avec un risque de cancer pour les pauvres."

Un concept d'alimentation à deux vitesses également dénoncé par les associations. “Ce qui est frustrant, c’est que les industriels ont créé un marché (...) avec des gammes sans nitrites plus chères pour ceux qui ont les moyens", souligne par exemple Camille Dorioz, responsable des campagnes de Foodwatch France, dans un entretien au Monde.

En ce qui concerne la nourriture pour chiens et chats, les industriels peuvent écouler des stocks existants d’additif jusqu’au 6 juillet 2024, des pré-mélanges contenant l’additif jusqu’au 6 octobre 2024, et des petfood contenant l’additif jusqu’au 6 juillet 2025.

Sabrine Mimouni