RMC Conso
Habillement

Faut-il laver ses vêtements neufs avant de les porter?

Des vêtements présentés dans une boutique d'habillement (photo d'illustration).

Des vêtements présentés dans une boutique d'habillement (photo d'illustration). - Pixabay

Vous venez peut-être de faire de nouvelles acquisitions et vous voulez savoir s'il est important de laver vos vêtements avant de les porter? RMC Conso vous répond.

En pleine période de soldes, vous avez peut-être déniché des pièces intéressantes et vous souhaitez déjà les porter. Une question se pose alors: faut-il les laver avant de les enfiler?

L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) "rappelle aux consommateurs l’importance de laver, avant de le porter pour la première fois, tout vêtement susceptible d’entrer en contact avec la peau", affirme-t-elle sur son site. "Oui, il faut idéalement les laver surtout ceux en contact direct avec la peau, notamment les sous-vêtements", confirme auprès de RMC Conso Victoire Satto, médecin et experte des enjeux environnementaux dans le secteur de la mode.

Pourquoi est-ce si important? "Durant le cycle de vie d'un vêtement, de nombreux composants chimiques interviennent: les pesticides, les engrais, les lessives industrielles, les teintures et les 'apprêts' qui confèrent aux vêtements des propriétés spécifiques, esthétiques ou techniques, comme l'imperméabilité, le caractère anti-tâche, infroissable ou encore facile à repasser", explique-t-elle.

"Jusqu'à 1.000 produits impliqués dans un seul vêtement"

Il existe deux types de pollutions chimiques: "la pollution chimique naturelle comme les métaux lourds et la pollution chimique synthétique. Elle inclut par exemple les bisphénols, les phtalates, les hydrocarbures ou encore les polluants éternels (PFAS). Jusqu'à 1.000 produits chimiques peuvent être impliqués dans la fabrication d'un seul vêtement. Le lavage permet de réduire la présence de ces composants au contact de l'organisme. Ils se retrouvent cependant dans les eaux usées puis dans les océans", ajoute l'experte.

Certains de ces composants chimiques sont identifiés comme responsables de quatre grandes familles de pathologies: les perturbations endocriniennes, les cancers, les réactions allergiques et les troubles de la reproduction.

Pour autant, "il est très difficile d'établir une relation de cause à effet entre ces composants et leurs effets sur la santé, car nous y sommes exposés partout, tout le temps, pas seulement dans les vêtements. Il existe de plus un effet 'cocktail', c'est-à-dire que la somme des composants n'est pas égale à la somme de leurs conséquences: ces dernières se potentialisent", nuance Victoire Satto.

La fast-fashion plus concernée

Mais tous les vêtements ne sont pas concernés à part égale par la présence de composants chimiques. "La fast-fashion est hautement plus concernée, car elle produit à bas coûts. Tout ce qui est nocif se retrouve dans les produits Shein, Temu, Primark", dénonce à RMC Conso Alexane Spieser, porte-parole de la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin.

À cela s'ajoutent, "les couleurs non naturelles, les flocages, les brillants qui sont des artifices aux composants toxiques", renchérit Victoire Satto. De plus, "les pays producteurs sont loin. Les usines sont exposées aux poussières, les produits sont emballés dans des packaging plastiques et les rats urinent dessus", décrit-elle.

La seconde main, "moins impregnée" par les polluants

Ainsi, face à ces constats, il est essentiel de repenser nos modes de consommation. "Il faut faire attention aux matières d'un vêtement à l'achat et privilégier des matières naturelles, plus nobles (laine, coton...) qui sont moins concernées par les composants chimiques et où le lavage ne sera pas obligatoire. C'est mieux pour son propre confort, pour la durabilité du vêtement et pour la planète", affirme Alexane Spieser. Le mot d'ordre, "acheter moins, mais mieux".

Autres recommandations, selon Victoire Satto: les matières doivent être "certifiées Oeko-Tex à minima", un label qui certifie l'innocuité des produits textiles pour les travailleurs et les consommateurs, et "idéalement biologiques". Elle conseille également de se tourner vers la seconde main, reconnue "moins imprégnée" par tous ces composants du fait des lavages précédents.

"Contraindre les marques"

L'Anses a proposé au niveau européen une restriction pour plus de 1.000 substances en vue de renforcer la sécurité des consommateurs. Une vision partagée par Victoire Satto, qui pointe cependant la difficulté de les interdire.

"Comme les effets néfastes sur la santé ne sont pas complètement avérés, il est difficile de les réguler. Il faut des années pour en interdire un seul, tandis que des dizaines de nouveaux sont mis sur le marché tous les ans", regrette-t-elle.

Celle-ci évoque d'autres pistes. "Il faut contraindre les marques plutôt que de pénaliser les consommateurs, fabriquer des produits plus propres et aller au bout de la loi anti fast-fashion. Elle comprend par exemple un système de bonus/malus qui valorise les produits éco-conçus et pénalise les autres, développe l'experte. Et il faut également davantage utiliser l'argument de la santé pour sensibiliser tout un chacun, cela a plus d'écho. On n'y est pas encore, mais on y travaille."

Emma Forton