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Abattoirs: "Un type qui crève l'œil d'un mouton, ça doit se régler avec la justice"

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Le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll s'est dit mercredi sur RMC favorable aux caméras de surveillance dans les abattoirs. Une mesure qu'approuve Martial Albar ancien inspecteur vétérinaire en abattoir. Mais il estime qu'il faudrait aller plus loin et faire évoluer les techniques d'abattage pour mieux faire respecter les textes existants.

Martial Albar a travaillé pendant 12 ans comme inspecteur des services vétérinaires dans les abattoirs. Ecoeuré par la maltraitance animale qu'il y a constatée, il est aujourd'hui consultant en sécurité alimentaire. Et a cessé de manger de la viande car il ne veut plus "participer à ce massacre".

"On ne peut pas ne pas savoir que les animaux souffrent. Quand je vois le directeur d'un des abattoirs qui a été filmé dire qu'il ne savait pas, il ne faut pas prendre les gens pour des cons. On ne peut pas ne pas le savoir.

Il faudrait peut-être intégrer qu'aujourd'hui dans notre société, on ne tue pas un animal sans souffrance. Pour manger de la viande il faut forcément avoir tué des animaux.

De tous les abattoirs que j'ai vus, à tous les postes d'abattage il y a un certain niveau de maltraitance sans tomber dans ce que l'on voit dans les vidéos évidemment. Quand on voit un type qui crève l'œil d'un mouton ou écarteler un chevreau ça doit se régler avec la justice.

Les abattoirs sont souvent en périphérie des villes. Tout le monde mange de la viande sans se poser la question de sa provenance et comment elle a été abattue. On ne veut pas trop savoir ce qui s'y passe, on sait qu'on y amène les animaux se faire tuer et avec la bonne conscience qu'on a tous on va chercher une barquette de viande.

A chaque fois on voit les mêmes images. Je ne comprends même pas, après que le premier abattoir se soit fait attraper, que les autres abattoirs n'aient pas réagi. En fait c'est le quotidien des abattoirs. Ce qui me choque le plus c'est qu'entre le moment où je suis rentré aux service vétérinaires en 1996 et ce que je vois aujourd'hui, rien n'a changé!

"Aucune innovation, aucune amélioration"

Les autres secteurs d'entreprise ont évolué, dans les abattoirs on retrouve exactement le même matériel, il n'y a eu aucune innovation, aucune amélioration sur l'étourdissement des animaux. Il est quand même assez grave d'utiliser encore en 2016 un pistolet d'abattage. C'est comme si on nous enfonçait un clou dans la boite crânienne avec un marteau, c'est assez choquant mais c'est la réalité.

Et on n'a aucune certitude sur le fait que l'animal ne sente plus rien. Quand vous avez des cadences sur des chaines de bovin ou l'animal est étourdi, puis saigné dans la foulée et qu'on commence à lui couper les pattes avant, soit à retirer le masque du crâne de l'animal, il n'y a pas besoin d'être médecin pour savoir qu'il souffre. Tant qu'on n'a pas la mort totale de l'animal, ça me parait totalement fou de continuer à sectionner les pattes avant d'un animal.

"Les textes de loi existent déjà"

Il suffirait de faire appliquer la loi. On parle de faire évoluer les textes, mais les textes existent et prévoient de ne pas maltraiter les animaux. Il suffit de les respecter. Tout comme il faudrait faire respecter la loi sur les actes de torture et de barbarie envers les animaux. La sensibilité de la société fait que juger et condamner quelqu'un qui a torturé un mouton à 6 mois de prison, ça serait choquant pour l'opinion publique.

Il serait possible d'abattre les animaux sans souffrance. Il faut sectionner la colonne vertébrale, et l'animal ne sent strictement rien. Il faudrait mettre les moyens économiques pour trouver un système de ce genre applicable à l'industrie. Dans un an, ça serait appliqué mais il faut admettre que ce système soit plus lent et qu'il y ait donc un impact sur la cadence et donc sur le prix de la viande".

Paulina Benavente