Déficit public: faut-il faire payer les retraités? "Il faut les traire comme des vaches à lait" (Estelle Midi)

Les retraités vont-ils être mis à contribution pour réduire le déficit public? Alors que le gouvernement ouvre la porte à des hausses d’impôts pour les plus aisés, certaines voix plaident aussi pour faire des économies sur les dépenses de retraites, qui ont atteint 14,4% du PIB l’an passé en France, contre 11,9% dans l’Union européenne et en Allemagne. Davantage propriétaires de leur logement, les retraités ont un niveau de vie médian qui s’élève à 1.878 euros par mois, légèrement supérieur à la moyenne nationale. Leur taux d’épargne est de 25%, contre 8% pour les moins de 30 ans. Quant au taux de pauvreté, il est de 8,7% chez les retraités, contre 14,6% pour la moyenne de la population.
Pour le chroniqueur gastronomique Périco Légasse, il ne faut pas hésiter. "J’ai un respect infini pour les séniors et ces générations passées qui ont permis à la France d’être ce qu’elle est. Ils se sont goinfrés, à juste titre parce que la situation était opulente et ils ont profité d’un système. Maintenant, on est un peu en difficulté, il faut serrer les cordons de la bourse, estime-t-il dans Estelle Midi ce lundi sur RMC. Je vais utiliser une expression violente, que j’aime beaucoup: il faut les traire comme des vaches à lait. Mais il faut faire attention. Les pauvres, on n’y touche pas et éventuellement, on améliore un peu leurs retraites. Et puis, j’en connais, il y a ceux qui sont dans une énorme aisance. Ils reconnaissent qu’ils ont plus aujourd’hui que ce dont ils ont besoin. Il y a une limite, mais certains sont disposés à rendre un peu. Il faudra que le gouvernement soit intraitable."
"Pourquoi encore taper sur les retraités?"
"Pourquoi encore taper sur les retraités?", s’interroge Marie-Louise, auditrice RMC et infirmière à la retraite dans la Creuse. "Je suis retraitée depuis deux ans. J’ai pu prendre ma retraite à 59,5 ans parce que j’ai commencé à travailler à 16 ans. J’ai cotisé toute ma vie. Et toute ma vie, on m’a demandé de payer pour les retraités. La vignette, le lundi de Pentecôte… Ma retraite brut est de 2.269 euros et on me retire déjà 304 euros, donc il me reste 1.964 euros. C’est une bonne retraite, mais j’ai travaillé toute ma vie."
Nicole, retraitée à Paris, est quant à elle "très en colère". "On tape toujours sur les mêmes, les travailleurs, les entreprises, les retraités…, dénonce-t-elle. Je suis à 1.700 euros par mois. Je suis propriétaire, mais je n’ai pas du tout le sentiment de bien vivre au regard des hausses de prix. C’est le travail qui n’est pas rémunéré à sa juste valeur. Ce n’est pas normal qu’on soit au Smic à 35 ans."
"Les retraites, c’est quatre fois le budget de l’Education nationale"
Alors, le gouvernement osera-t-il cibler cet électorat fidèle? "S’il faut réduire le déficit, la question va certainement se poser, même si politiquement c’est délicat, reconnait Mathieu Plane, économiste à l’OFCE. C’est le premier poste de dépenses publiques, plus de 300 milliards d’euros. La question de la désindexation va certainement se poser. Si on veut revenir de 6% à 3% de déficit, c’est 100 milliards qu’il va falloir trouver. Dire qu’on va épargner complètement les retraités de ce redressement, ça me semble difficile. Surtout qu’ils ont bénéficié d’une protection face à l’inflation. Depuis trois ans, il y a eu plus de 11% de hausse des retraites, ce qui n’est pas forcément le cas pour les salaires."
"Les retraités sont plus propriétaires que les actifs et au fond, en France, le niveau de vie moyen des retraités est plutôt favorable, ajoute l’économiste. On peut s’en féliciter mais dans un moment de disette budgétaire, la question va être sur la table à mon avis. Les retraites, c’est quatre fois le budget de l’Education nationale. C’est plus que l’ensemble de la masse salariale de tous les fonctionnaires. Mais je peux comprendre le mécontentement des retraités. Ça ne veut pas dire qu’ils seront taxés plus mais que leurs revenus augmenteront moins vite."