"Génial" ou "scandaleux"... La suspension de la réforme des retraites divise les Français

Sébastien Lecornu a proposé mardi la suspension de la réforme des retraites "jusqu'à l'élection présidentielle" de 2027, qui portera sur la mesure d'âge et la durée de cotisation, comme demandé par les socialistes, et proposé une conférence sociale sur "les retraites et le travail".
"Aucun relèvement de l'âge n'interviendra à partir de maintenant jusqu'à janvier 2028, comme l'avait précisément demandé la CFDT. En complément, la durée d'assurance sera elle aussi suspendue et restera à 170 trimestres jusqu'à janvier 2028", a indiqué le Premier ministre.
La génération 64 gagnante
Si la suspension proposée par Sébastien Lecornu est actée, la génération 1964, qui devait partir à 63 ans, sera la première à être gagnante. Elle économisera un trimestre d'âge légal en obtenant le droit de se retirer à partir du dernier trimestre de 2026 à 62 ans et neuf mois, au lieu du premier trimestre 2027. Elle gagnera également un trimestre dans le calcul de sa durée de cotisation, puisque la réforme Borne lui en imposait 171, et non 170. Pour les générations suivantes, tout dépendra des modalités exactes de la suspension.
La suspension de la réforme, c’est une excellente surprise pour Pierre, interrogé dans les rues de Paris par RMC. Il approche de la retraite et va pouvoir partir à 62 ans et 9 mois. "C’est génial, il fallait que j’attende jusqu’à 63 ans et 6 mois, j’ai tous mes trimestres, j’ai commencé jeune."
"Il était temps", souffle de son côté Julien. Lui fête la suspension d’une réforme qu’il a toujours rejetée. "La faire passer comme par un 49.3, c’était quelque chose de terrible pour tout le monde. Je trouve normal qu’on revienne dessus, c’est juste une suspension. Après, j’espère qu’on ira plus loin dans l’abandon de cette réforme injuste." Il applaudit un compromis et espère un dialogue dorénavant plus serein entre les partis politiques…
"Il faut vraiment avoir le courage de repenser la façon dont on veut financer les retraites", plaide Cécile de son côté Cécile.
Car elle, ne croit pas du tout à cette suspension qui ne fait que contourner le problème. "Le système de retraite par répartition a fait son temps; il faudrait vraiment avoir le courage de repenser clairement la façon dont on veut financer les retraites aujourd’hui — les partis politiques ne l’ont pas." Et dénonce une tactique pour éviter la censure. Celle-ci espère une dissolution de l’Assemblée nationale et un retour aux urnes.
Même son de cloche du côté de Teddy, 35 ans et prof de maths à Chartres: "Ma retraite, je la constitue moi-même parce que le système par répartition, je n’y crois plus. C'est un très gros problème: on investit sur la mort et pas dans notre jeunesse. Je suis dans une colère noire, c’est inadmissible de suspendre cette réforme sachant que dans quelques années il faudra faire quelque chose de pire que ça", s'offusque-t-il au micro de RMC.
"De l’hypocrisie pour garder un siège"
"On va repartir encore une fois sur une présidentielle avec ce sujet des retraites qui devrait être réglé depuis des années. Les retraites coûtent un pognon de dingue dans ce pays, on n’aurait pas dû y toucher, c’est scandaleux." Ce dernier lance un message aux retraités: "Je propose une solution, chiche, vous ne toucherez pas un euro de plus que ce que vous avez cotisé."
Philippe, 48 ans, en Saône-et-Loire, préfère s'attaquer aux politiques: "Ce qui m’agace, ce sont les gens qui reviennent en arrière: il y a une hypocrisie dans l’hémicycle pour gagner un petit croûton de pain en plus", regrette-t-il.
"C’est toujours le petit Français qui travaille, se lève tôt, qui va payer les pots cassés pour récupérer les sous perdus. Je n’arrive pas à comprendre ce retour en arrière. Je n’arrive pas à comprendre les LR qui vont renier leur conviction politique, des hypocrites de première. "C’est ça la politique française ? De l’hypocrisie pour garder un siège ?", conclut-il.