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Une lettre de l'ambassade américaine aux entreprises françaises: le gouvernement dénonce une ingérence

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L'indignation ne retombe pas en France après l'envoi par l'ambassade américaine à Paris d'une lettre menaçante à quelques dizaines de grandes entreprises françaises. Un courrier qui leur donne 5 jours pour accepter de se conformer à un décret de Donald Trump interdisant les programmes de diversité, d'équité et d'inclusion.

Indignation après l'envoi par l'ambassade américaine à Paris d'une lettre menaçante à quelques dizaines de grandes entreprises françaises. Ce courrier leur donne cinq jours pour accepter de se conformer à un décret de Donald Trump interdisant les programmes de diversité, d'équité et d'inclusion.

Initialement révélé par Les Echos, le courrier commence par ces mots: "Nous vous informons que le décret 14.173 concernant la fin de la discrimination illégale et rétablissant les opportunités professionnelles basées sur le mérite, signé par le président Trump, s’applique également obligatoirement à tous les fournisseurs et prestataires du gouvernement américain, quels que soient leur nationalité et le pays dans lequel ils opèrent". Les entreprises destinataires ont cinq jours pour signer un formulaire qui atteste de leur conformité.

Les entreprises françaises ne sont pas les seules concernées en Europe. Selon le Financial Times, le Corriere della Sera et El Pais, des entreprises belges, italiennes, espagnoles et basées en Europe de l'Est ont également reçu la fameuse missive.

Depuis la réception de ce courrier, les services juridiques des entreprises qui l'ont reçu essayent de déterminer ce qui se passera si elles signent, il reste encore beaucoup de flou. En attendant, le Medef clame haut et fort qu'il n'est pas question de s'incliner notamment par la voix de son porte-parole Charles Znaty.

Condamnation quasi-unanime du gouvernement

“Les questions de diversité, d’égalité, d’inclusion sont des questions fondamentales qui font partie des entreprises françaises. Si je prends un exemple, l’insertion des personnes handicapées, on ne va pas y renoncer, il n’en est pas question”, appuie-t-il.

Ce courrier est une nouvelle preuve des tensions commerciales entre les Etats-Unis de Donald Trump et l'Europe.

“C’est une forme d’ingérence. C’est essayer d’imposer un diktat à nos entreprises”, dénonce Aurore Bergé, la ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes. “En droit français, il n’y a pas de discrimination positive par contre, il y a une loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes et l’autorité salariale, et cette loi va continuer à s’appliquer”, appuie-t-elle.

De son côté, Bercy assure suivre la situation de très près pour éviter que les entreprises françaises perdent des contrats aux Etats-Unis. Le ministère qui précise que cette lettre “reflète les valeurs du nouveau gouvernement américain. Ce ne sont pas les nôtres”. Une indignation presque générale du gouvernement. Le Quai d’Orsay ou encore le ministère du Commerce extérieur dénoncent des “ingérences (…) inacceptables”.

Les Américains peuvent-ils obtenir gain de cause? C’est d’usage pour les Américains de faire appliquer leurs lois, à l’extérieur souvent au nom de ce que l’on appelle l’extra-territorialité. Par exemple, Total a payé des centaines de millions de dollars aux Etats-Unis en 2013 pour pouvoir continuer à travailler avec les Américains. L’entreprise avait investi en Iran alors que c’est interdit aux firmes américaines.

La BNP a aussi payé de lourdes amendes pour avoir contourné l’embargo américain et travaillé avec des clients cubains. Une note de l’Institut Montaigne en décembre décrivait déjà “l’Extra-territorialité” comme une carte maîtresse dans le jeu de Donald Trump pour faire pression sur l’Union Européenne. Il faudra voir si Washington arrive à tordre le bras des entreprises européennes.

Victor Joanin et Matthieu Belliard avec Guillaume Descours