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Comment la série "La Casa de Papel" est-elle devenue un phénomène mondial?

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EXPLIQUEZ-NOUS - Une nouvelle saison de la “Casa de Papel” sort ce vendredi en France. Cette série espagnole est un phénomène mondial. Voici pourquoi.

C’est la première fois qu’une série qui n’est pas tournée en anglais obtient un tel succès. La Casa de Papel a été diffusée au départ sur une chaîne espagnol “Antena 3” en mai 2017. Et on peut parler d’un flop, puisque les audiences avaient été divisées par deux entre le premier et le dernier épisode.

Les Américains de Netflix achètent tout de même les droits et mettent la série en ligne fin 2017. Et là, bingo! C’est un succès mondial, sans aucune publicité ni opération markéting, juste avec le "bouche à oreille" et surtout les algorithmes de la plateforme.

Rien qu’en France, 17 millions de foyers regardent la “Casa de Papel” en quelques semaines. Et ça dure depuis 4 ans. On en est à la saison 5. La partie une est mise en ligne à 9h01 ce vendredi 3 septembre.

5 nouveaux épisodes, avant les 5 derniers, peut-être les tout derniers qui seront disponibles en décembre prochain.

Comment expliquer ce succès?

Par un ressort bien connu. Celui du hors-la-loi qui est un justicier. La Casa de Papel, c’est l’histoire d’un braqueur timide et surdoué, le "professeur" qui organise le casse du siècle. Ou les deux casses du siècle. Il attaque d’abord, la Fabrique nationale de la monnaie, puis la Banque d'Espagne.

Avec une bande qu’il a réunie, une bande de marginaux, des drogués, des paumés, d’anciens enfants abandonnés, des victimes de la vie. Ils s’appellent Rio, Denver, Helsinki, ou Tokyo, ils sont bras cassés, ils tombent amoureux, mais ils sont surtout sympathiques alors qu’en face, les policiers sont sans morale et tordus.

C’est ça le ressort. L’inversion des valeurs. Les voleurs sont du côté du “bien”, les policiers représentent “l’ordre injuste”. C’est toute l’histoire de Robin des bois qui vole aux riches pour donner aux pauvres. L'histoire de Jean Valjean dans les Misérables, poursuivi à tort après avoir volé une pomme. L’histoire d'Arsène Lupin, sympathique cambrioleur, fils de pauvre qui ne s’attaque qu'à des bourgeois toujours un peu ridicules.

La Casa de Papel serait donc une série politique?

Oui et non. Elle essaie d'être une série politique. Elle fait l’éloge de la résistance, de la rébellion contre l’ordre établi, en particulier l’ordre économique libéral. Le montant des braquages qui se compte en milliards d’euros fait référence à la folie des bulles financières.

La tenue des braqueurs, leur combinaison rouge ressemble à l’uniforme des prisonniers de Guantanamo. Leurs masques de Dali font penser au masque des Anonymous, les activistes sur internet. La série fait aussi référence aux indignés, le grand mouvement de contestation espagnol des années 2010. Et même la bande originale de la série est révolutionnaire.

Bella ciao, chant révolutionnaire italien, pour cette série espagnole, qui a donc un fond de sauce politique. Même si en réalité, elle ne l’est pas.

C’est d’abord un film de gangsters, une histoire de braquage. Le professeur et ses amis ne veulent pas changer le monde, ils veulent juste réussir la casse du siècle grâce à un plan extraordinaire.

Et tout cela est inspiré d’une histoire vraie

Les scénaristes disent que non, qu’ils ont tout inventé. Sauf qu’en 2006 en Argentine a eu lieu un braquage qui ressemble beaucoup à la série. Une bande a réussi à pénétrer dans une banque, à prendre en otage 23 personnes et à disparaître par un tunnel lorsque la police a donné l'assaut.

Les otages ont raconté que les braqueurs étaient extrêmement sympathiques. Comme dans La Casa de Papel. Leur chef se faisait appeler "El maestro", le maître, comme El professor dans la série. En partant ils ont laissé un mot qui disait : “Nous avons attaqué le quartier des richards, sans haine et sans rancune”. Dans le même esprit que les braqueurs de la série espagnole.

"El maestro", l’organisateur du casse argentin a envisagé de faire un procès aux scénaristes de La Casa de Papel. Il estime qu’ils ont volé son histoire. Mais finalement il a écrit son propre livre, qui est devenu un film. “Le braquage du siècle”, qui sort en salles mercredi prochain en France.

Nicolas Poincaré (avec J.A.)