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Gérald Darmanin veut expulser les détenus étrangers: un coup de com' dénoncent les magistrats

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Le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, s'est adressé dans une circulaire aux procureurs et directeurs de prison. Il les appelle à repérer les détenus étrangers éligibles à une expulsion afin qu'ils terminent leur peine dans leur pays d'origine. L'objectif est de désengorger les prisons françaises. Avocats et magistrats dénoncent un coup de communication.

Gérald Darmanin appelle dans une circulaire les procureurs et directeurs de prison samedi soir à repérer les détenus étrangers expulsables. Le ministre de la Justice souhaite qu’ils finissent leur peine dans leur pays d'origine.

Il présente leur expulsion comme une solution pour désengorger les prisons françaises. Selon lui, plus de 19.000 étrangers sont en prison, prévenus et condamnés confondus, soit 24.5% de la population carcérale. Mais selon avocats spécialisés et magistrats, cette circulaire n’est qu’un coup de communication.

Le ministre de la Justice rappelle seulement les dispositifs qui existent déjà pour recenser les détenus de nationalité étrangère et permettre leur expulsion quand elle est possible. Car la procédure est très encadrée.

Pour qu’un prisonnier purge sa peine dans son pays d’origine, hors de l’Union européenne, il faut son accord. Cette circulaire n’y change rien, pour modifier les règles, il faudrait établir des conventions avec chacun des États concernés. Une démarche pour le moins complexe quand on connaît les tensions diplomatiques entre la France et certains pays.

“Il y a un peu plus de 2000 détenus, ressortissant d’un pays de l’Union européenne. Il en a un millier qui relèvent d’un pays européen mais hors-Union européenne. Cela, il n’y a pas de grande difficulté à le faire. Et puis on a un peu plus de 8000 détenus condamnés qui viennent du continent africain et là, il va falloir vérifier qu’il y a bien un laissez-passer consulaire qui est disponible pour ceux qui pourraient bénéficier de cette mesure”, détaille ce lundi matin sur RMC Didier Leschi, directeur général de l’office français de l’immigration et de l’intégration.

"Choquant" selon les magistrats

Pour les condamnés originaires de l’Union européenne, ils peuvent être transférés sans leur accord, mais seulement si la France reprend en échange ses propres ressortissants.

“Ce qui pour nous est choquant et incohérent, c’est de dire ‘ne priorisez pas selon la dangerosité du condamné que vous avez en face de vous mais priorisez en fonction de la nationalité’. Nous on trouve que c’est quelque chose qui est inentendable parce que vraiment j’abandonne mes dossiers pour aller m’intéresser à ce voleur de pomme, parce que ça peut vraiment être ça, qui a certes une interdiction de territoire français, mais quitte à avoir un loupé, je préfère ne pas louper la demande en liberté d’un grand criminel plutôt que de m’assurer que la préfecture à bien eu son papier par rapport à un voleur simple”, indique Justine Probst, secrétaire nationale du syndicat de la magistrature.

Pour toutes ces raisons, avocats spécialistes des droits des étrangers et le syndicat de la magistrature estime que cette circulaire ne changera rien à la surpopulation carcérale. Surtout quand la justice manque déjà de moyens pour traiter tous les dossiers.

Joanna Chabas avec Guillaume Descours