Activités en prison: à quoi les détenus ont-ils vraiment le droit?

Après les révélations sur la prison de Toulouse-Seysses, où des détenus ont bénéficié de massages et de soins à l’occasion de la Saint-Valentin, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a annoncé la fin des activités ludiques.
Une vingtaine de détenus, des hommes et des femmes, parfois condamnés à de lourdes peines, ont bénéficié de massages proposés gratuitement par une école. La semaine précédente, la même prison proposait un cours de danse country. L’Observatoire des Prisons a fait savoir qu'il s'agissait d'activités extrêmement rares, très marginales.
Les syndicats satisfaits
"J'ai demandé au directeur de l'administration pénitentiaire (...) qu'une instruction soit donnée à tous les directeurs de centres pénitentiaires, de toutes les prisons, pour que nous ne nous limitions absolument qu'au soutien scolaire et à la langue française, à l'activité autour du travail et à l'activité sportive à l'intérieur de la prison", a réagi Gérald Darmanin, lundi.
Une annonce qui a satisfait les syndicats de surveillants. "La prison, c'est d'abord normalement un lieu où on fait une peine. Donc normalement, ce serait bien qu'il y ait assez de surveillants avant de commencer à encadrer les activités", explique David, membre du syndicat pénitentiaire des surveillants. Ce dernier soutient le fait que les activités soient limitées:
"Passer par exemple un permis, transport en commun ou faire des CV, c'est quelque chose qui peut amener vers la sortie, quand on s'approche de la sortie, là j'en vois l'utilité."
Pourtant les activités effectuées par les détenus de la prison de Toulouse-Seysses n'ont rien d'illégal. Les prisonniers ont bien le droit à des activités culturelles et artistiques, qui font partie du protocole de réinsertion et de lutte contre la récidive. Le code pénitentiaire stipule même que c’est obligatoire d’avoir une activité en prison: l’art, la culture en font partie, au même titre que le travail, le sport, la formation, l’éducation.
Il existe un partenariat entre le ministère de la Justice et celui de la Culture, qui encadre la pratique culturelle et artistique en détention. Il couvre tous les champs culturels: la danse, le théâtre, la musique, le cinéma, les arts plastiques ou encore la lecture. Ce protocole "Justice-Culture" se décline ensuite au niveau local et au sein de chaque prison, c’est le service chargé de l’insertion et de la probation qui propose, en lien étroit avec les directeurs d’établissements, des activités, avec les acteurs culturels locaux.
211% d'occupation à Toulouse-Seysses
La décision de Gérald Darmanin inquiète ceux qui protègent les droits des détenus, dans un contexte de surpopulation carcérale. La prison de Toulouse-Seysses est considérée comme l’une des pires, avec en décembre dernier, 1.223 détenus pour 580 places, soit un taux d’occupation de 211%.
Pour la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, "ces activités ne sont pas simplement ludiques, elles réapprennent aux gens à revivre normalement". Mais pour Prune Missoffe, responsable du plaidoyer à l'Observatoire international des Prisons, restreindre l'accès aux activités culturelles est une erreur:
"C'est peut-être une des seules choses qui lui permettent de renouer avec le fait d'être un être humain pendant sa détention. Est-ce qu'on pense vraiment que ça, ça ne participe pas à ce qu'une personne retrouve une place dans la société quand elle sort ?"
Elle ajoute que ces activités culturelles permettent aussi d'apaiser les tensions entre les détenus et les agents dans les centres pénitentiaires.