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Législatives: pourquoi une cohabitation avec le RN ou le NFP serait très tendue sur l’international

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Si le Rassemblement national ou le Nouveau Front populaire une cohabitation, les questions de politique internationale et de défense risquent d’être très tendues avec Emmanuel Macron.

Que prévoit la Constitution en cas de cohabitation? Elle est très ambiguë sur le partage des pouvoirs entre le président de la République et le Premier ministre, notamment sur les questions de politique internationale et de défense. Un seul exemple: l’article 15 affirme que le président est le chef des armées. Mais l’article 20 prévoit que le gouvernement dispose de la force armée.

Alors, faute de texte clair et précis, c’est la pratique qui fait loi. Le général de Gaulle a théorisé la notion de domaine réservé. La politique étrangère et la défense, c'était lui. Et c’est comme cela depuis 65 ans, sauf en période de cohabitation… Là, cela devient plus compliqué, et il a fallu inventer de nouvelles règles lors de la première cohabitation en 1986.

Jacques Chirac, Premier ministre, a d’abord multiplié les voyages à l’étranger, les interventions à l’ONU… Mais François Mitterrand ne s’est pas laissé faire face à ce Premier ministre qu’il jugeait "vorace". Il s’est par exemple opposé à lui sur la question des missiles à roulette. Jacques Chirac voulait placer des charges nucléaires sur des camions. François Mitterrand a refusé en disant: "La dissuasion, c’est moi". Et il l’a emporté.

Finalement, le président et son Premier ministre ont compris qu’ils devaient s’entendre sur ces questions et parvenir à des compromis, pour que la France n’ait qu’un seul discours à l'extérieur. Et c’est ce que l’on a vu lors des cohabitations suivantes.

La notion de domaine réservé au président est devenue celle d’un domaine "partagé". Et cela s’est globalement bien passé. Mais demain, une nouvelle cohabitation pourrait être beaucoup plus conflictuelle, parce que la situation serait différente. Lors des trois précédentes cohabitations, les présidents et les Premiers ministres étaient globalement d’accord sur l’essentiel. Ils étaient pro-européens et atlantistes, mais attachés à l'indépendance militaire de la France.

La Russie ou la Palestine, des sources de tension

Demain, en cas de cohabitation avec le Rassemblement national, les conflits pourraient être plus violents. Parce qu’Emmanuel Macron a fait de la défense de l’Ukraine sa priorité, qu’il se positionne en champion de la résistance à la Russie, alors que Marine Le Pen est beaucoup moins hostile à Vladimir Poutine. Si demain, Jordan Bardella était à Matignon, on peut s’attendre à un bras de fer sur le sujet.

Si le Nouveau Front populaire devait l’emporter, la cohabitation pourrait aussi être agitée, notamment sur la question de Gaza. Le programme du Nouveau front populaire prévoit de reconnaître la Palestine dès leur arrivée au pouvoir. Et on sait qu’Emmanuel Macron n’y est pas favorable à court terme.

Dans ce cas-là, une Assemblée nationale de gauche pourrait faire une reconnaissance “déclaratoire”, mais le président pourrait facilement s'opposer aux conséquences concrètes de cette reconnaissance. Par exemple, à l’ouverture d’une ambassade de Palestine à Paris.

En réalité, rien n’est écrit d’avance. La cohabitation, en matière de politique étrangère, pourrait être une succession de crises. A commencer par la nomination des ministres de la Défense et des Affaires étrangères. François Mitterrand avait imposé d’avoir un droit de veto et il avait retoqué la nomination de Jean Lecanuet, le maire de Rouen, au quai d'Orsay. Rien ne dit que demain, le Premier ministre accepterait ce veto présidentiel.

Nicolas Poincaré