Algues vertes: la justice donne 10 mois à l'État pour agir, un "petit pas" pour Eau et Rivières de Bretagne

"Les mesures mises en œuvre" par la préfecture de Bretagne "sont insuffisantes pour lutter contre les échouages d'algues vertes sur le littoral breton", a statué jeudi le tribunal administratif de Rennes.
Celui-ci a décidé d'accorder "un délai de dix mois" au service déconcentré de l'État afin qu'il renforce son action contre les pollutions aux nitrates, "notamment d’outils de contrôle permettant un pilotage effectif des actions menées".
Le même délai cours afin de mettre en oeuvre "toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice écologique résultant de la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole".
"Pour la première fois la justice reconnaît qu'il y a bien un préjudice environnemental dont la responsabilité avérée est celle de l'État", se félicite auprès de RMC Arnaud Clugery, directeur de l'association Eau et Rivières de Bretagne (ERB), qui avait saisi le tribunal administratif de Rennes en déposant deux recours contre l'État. Elle réclamait un délai d'un mois pour agir.
Pas d'amendes en cas de non-respect
"C'est un petit pas, nous aurions préféré un grand", regrette toutefois Arnaud Clugery. "On aurait voulu que le juge déclare dès maintenant qu'il y aurait des astreintes", d'un million d'euros par mois de retard. Le tribunal n'a pas donné suite à cette requête.
"Le tribunal ne s’est pas aventuré sur l’évaluation monétaire du préjudice et ne prévoit pas de sanction si l’État ne s’engage pas dans les dix mois. Il nous appartiendra de mobiliser le juge de l’exécution pour obtenir des astreintes", précise dans Ouest-France le porte-parole d'ERB Thomas Thellier.
Le deuxième recours portait sur une demande de "réparation des préjudices écologiques et moraux", le préjudice moral étant chiffré par l'association à 3,2 millions d'euros. Le tribunal a condamné l'Etat à verser 5.000 euros à Eau et Rivières de Bretagne.
Une pollution majoritairement d'origine agricole
La préfecture de Bretagne a dit "prendre acte de cette décision, disant examiner "les réponses à y apporter et les conditions d'un éventuel appel". "La lutte contre la pollution par les nitrates" est déjà "engagée" par l'Etat, avec "de nouvelles actions lancées récemment", a-t-elle estimé.
"Entre 2010 et 2023, la teneur en nitrates dans les cours d’eau a baissé de 19 % en Bretagne. Dans les bassins versants des baies algues vertes, cette baisse est comprise entre 21 % et 30 %", a-t-elle précisé dans un communiqué. ERB et la préfecture se retrouveront dès la semaine prochaine pour échanger.
Selon un rapport de la Cour des comptes de 2021, cette prolifération d'algues vertes est "à plus de 90% d'origine agricole" dans cette région où le recours aux engrais azotés a fortement progressé à partir des années 1960, et qui compte aujourd'hui 140.000 emplois dans l'agroalimentaire.