"L'irrigation, avant, on n'en parlait pas": les agriculteurs du Pas-de-Calais confrontés à la sécheresse

"La rivière en contrebas est à sec par endroits": dans le Boulonnais (Pas-de-Calais), les agriculteurs font face à la sécheresse et aux restrictions d'eau. "Je reporte mes semis à l'automne", constate dépité Nicolas Decroocq.

Maraîcher depuis six ans dans le Boulonnais, Nicolas Decroocq est dépité. "Je reporte mes semis d’automne, navets, radis… J’attends la pluie pour semer. C’est trop sec", confie-t-il à RMC. Le secteur du Boulonnais, dans le Pas-de-Calais, a été placé en alerte renforcée sécheresse vendredi. Arrosages, lavage de véhicules, remplissage de plans d’eau, irrigation agricole… Des restrictions strictes ont été imposées pour les particuliers, les collectivités et les professionnels afin de préserver la ressource en eau.

"Ma région je ne la vois pas souvent comme ça"

Chaque jour, Nicolas Decroocq doit remplir sa cuve de 1.000 litres à la source située au bout de ses terres pour alimenter le goutte-à-goutte de ses légumes. Une situation inédite qui l’inquiète. "Ma région, je ne la vois pas souvent dans cet état de sécheresse. La rivière en contrebas est à sec par endroits, même si les sources coulent encore", constate-t-il.

Le déficit pluviométrique est criant : entre mars et août, il a plu 43 % de moins que l’an passé dans l’ensemble du Pas-de-Calais. Dans le Boulonnais, la situation est encore plus alarmante, avec un manque de pluie de l’ordre de 65 %.

Face à cette sécheresse persistante, l’agriculteur songe à investir. "L’irrigation, on n’en parlait pas chez nous il y a encore quelques années. Aujourd’hui, rien que pour la partie maraîchage, il faudrait prévoir entre 40 et 50 000 euros", calcule Nicolas Decroocq.

"Puit sec"

De l’eau, il en manque aussi dans le puits de Julien Duchateau. "Puits sec", lâche l’éleveur, également président local des Jeunes Agriculteurs. Ses pâtures ont jauni. Sans eau, ni herbe, il doit déjà nourrir ses 250 bêtes avec le fourrage initialement prévu pour l’hiver.

"Ça fait un mois et demi qu’on nourrit. Le risque, c’est qu’on n’en ait pas assez pour cet hiver. Acheter, ça coûte cher, et encore faut-il trouver… si mes collègues n’en ont plus non plus", s’inquiète-t-il.

Trop de pluies d'un coup endommageraient les cultures

Dans tout le département, le lavage des voitures de particuliers est interdit en dehors des stations spécialisées, tout comme l’arrosage des jardins, à l’exception des potagers autorisés entre 20 h et 8 h. Les collectivités n’ont plus le droit d’arroser les espaces sportifs et les espaces verts. Quant aux agriculteurs, ils ne peuvent irriguer les mardis, jeudis, samedis et dimanches entre 10 h et 19 h. Une bonne partie du Pas-de-Calais est désormais placée en vigilance renforcée.

Pour que l’herbe repousse, Julien Duchateau espère 60 mm de pluie, mais répartis sur plusieurs jours. Une pluie trop brutale viendrait ajouter de nouveaux dégâts aux cultures.

Vincent Vieillard avec LM