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Le mal-être des agriculteurs face aux pesticides: "On est montrés du doigt et ça devient très compliqué"

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Alors que les arrêtés anti-pesticides se multiplient, les agriculteurs se sentent pointés du doigt et certains essaient, tant bien que mal de changer leur fonctionnement.

La fronde contre les pesticides s'étend. Cinq grandes villes ont interdit jeudi l'utilisation des produits phytosanitaires chimiques sur leur territoire. Paris, Lille, Nantes, Grenoble et Clermont-Ferrand signé des arrêtés interdisant totalement l'utilisation de ces produits sur leur commune.

Une action surtout symbolique car depuis 2017 la loi interdit déjà l'utilisation de pesticides par les collectivités pour entretenir les espaces verts et la voirie. Mais c'est un soutien de poids pour les maires ruraux. Ce vendredi comparaît d'ailleurs la maire du Perray-en-Yvelines, devant le tribunal de Versailles, qui avait signé un arrêté anti-pesticides en mai.

"Je ne tiens pas non plus à rester dans un modèle où on s'empoisonne."

Un texte qui interdisait l'utilisation de pesticides à moins de 150 mètres des maisons. Conséquence, les agriculteurs se sentent pointés du doigt et certains essaient, tant bien que mal de changer leur fonctionnement.

"Agriculteur pollueur !". Ce slogan, Pascal y pense régulièrement à bord de son tracteur.

"La pression environnementale et sociétale, elle est là. On vous accuse, on est montrés du doigt et ça devient très très compliqué", insiste-t-il. "Je ne tiens pas non plus à rester dans un modèle où on s'empoisonne."

Pascal a ainsi décidé de réduire l'utilisation de pesticides sur ses parcelles.

"Tous ces effets des pesticides ça nous rend moins fier du métier qu'on fait. Et ça c'est touchant. le métier qu'on fait c'est pour nourrir pas pour mourir."

"C'est bien ce que tu fais mais j'ai pas envie de me casser la tête pour finalement ne pas gagner plus !"

Pour accompagner les agriculteurs dans ce changement de modèle, Jean-Bernard Lozier exploitant, dispense des formations. "On nous a vendu l'approche du tout chimique. Et ça marchait en plus!". La fierté qu'il transmet a ses élèves, avoir réduit de 65% sa consommation de pesticides sur son exploitation.

"Plus de cultures, plus de rotations, des associations de cultures, ce sont des choses qu'on avait oublié. On ne perd pas d'argent, ça c'est prouvé, mais on n'en gagne pas plus. Donc à quoi bon, me disent mes collègues. C'est bien ce que tu fais mais j'ai pas envie de me casser la tête pour finalement ne pas gagner plus !
Maintenant je pense, avec ce qu'il se passe aujourd'hui avec le problème des pesticides, que tous les agriculteurs sont obligés de le prendre en compte. Là, je pense que ça change un peu la donne."

La chambre d'agriculture de Normandie confirme cette tendance. De plus en plus d'exploitants de la région réclament un accompagnement technique et financier pour passer en agriculture biologique.

Romain Poisot (avec J.A.)