"Le système d'alerte fonctionne en tout cas": des tsunamis peuvent-ils avoir lieu en Méditerranée?

L'Agence météorologique japonaise (JMA) a annoncé jeudi avoir levé l'avis de tsunami émis après l'un des séismes les plus puissants jamais enregistrés, au large de l'Extrême-Orient russe. "Un méga-séisme", précise ce jeudi sur RMC Jean-Paul Montagner, sismologue à l'Institut de physique du globe de Paris.
Selon l'institut géophysique américain (USGS), le tremblement de terre de magnitude 8,8 s'est produit à 11H24 locales à 20,7 km de profondeur, à 126 km au large de Petropavlovsk-Kamtchatsky, la capitale de la péninsule russe du Kamtchatka.
Il s'agit du plus important séisme depuis celui, de magnitude 9,1, qui s'est produit en mars 2011 au large du Japon et qui a provoqué un tsunami ayant causé la mort de plus de 15.000 personnes. Dans le même pays, près de deux millions de personnes avaient été appelées à évacuer vers des zones plus élevées.
Le 26 décembre 2004, les côtes d'une dizaine de pays d'Asie du Sud-Est avaient été ravagées par un tsunami qui avait fait 220.000 morts. La puissance du séisme à son origine était équivalente à environ 23.000 bombes atomiques comme celle d'Hiroshima, selon l'USGS.
L'alerte au tsunami est "presque la plus facile"
Depuis cette date, "beaucoup de progrès ont été faits" dans les systèmes de détection et d'alerte, assure Jean-Paul Montagner. Celui-ci rappelle que le réseau, qui existait préalablement, s'est surtout ensuite développé à "l'ensemble du globe". Par ailleurs, selon lui, l'alerte tsunami est "presque la plus facile", car lorsqu'on "détecte un séisme", le tsunami met du temps à se propager jusqu'aux côtes, avec une vitesse entre 600 et 800km/h".
"Dès qu’on détecte un séisme, on détecte les ondes P, qui arrivent en premier, et qui se propagent le plus vite, autour de 8 km/s. Cela permet de déclencher une première alerte, car d’autres ondes arrivent plus tard: les ondes S, qui détruisent les bâtiments et provoquent le plus de dégâts", détaille Jean-Paul Montagner. Le sismologue évoque aussi le développement des téléphones portables, qui permettent d'informer massivement et rapidement la population.
Pour revenir aux tsunamis, le système d'alerte s'appuie "sur un réseau de six bouées de détection dans le Pacifique, mis en place par la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis. Connu sous le nom de Deep-Ocean Assessment and Reporting of Tsunami (DART), le système compte aujourd'hui 74 bouées dans le monde", explique France 24.
Problème, les systèmes d’alerte sismiques ne savent pas faire la différence entre un tremblement de terre de magnitude 7 ou 9, explique dans Libération Quentin Bletery, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement au laboratoire Géoazur, de l’Université Côte d’Azur. "Ça, c’est un gros problème parce qu’une telle différence de magnitude ne génère pas du tout la même ampleur de tsunami', dit-il.
"Effet de bouchon"
En Polynésie française, les îles sont intéressantes d'un point de vue "scientifique", pointe de son côté Jean-Paul Montanger car certaines sont entourées par un récif corallien, une sorte de "montagne verticale". "Le tsunami a tendance à contourner ces îles coraliennes".
En l'absence de ce récif, c'est "un fond d'océan qui s'enfonce doucement" et là, le "tsunami peut s'amplifier et rentrer dans les terres", poursuit l'expert. "C'est le fond de l'océan qui remonte doucement, c'est une effet de bouchon. La vague ralentit et peut déferler sur les côtes."
Quel risque en métropole?
Un tel phénomène pourrait-il se produire un jour en métropole? "Sur la côte méditerranéenne, bien sûr", fait savoir Jean-Paul Montagner, qui évoque la possibilité de tremblements de terre en "Algérie, en Italie". "En principe, le système d'alerte tsunami en Méditerrannée fonctionne mais heureusement n'a jamais été testé. Les gens peuvent être prévenus."
À son point de départ, un tsunami ne génère que des petites vagues très espacées car les masses d'eau énormes déplacées par la secousse dévalent en profondeur le long des déformations du sol marin, à la différence des vagues ordinaires qui n'affectent que la surface de l'eau.