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40 ans des Restos du Cœur "On ne tiendra pas le choc, on ne peut pas faire plus", alerte son porte-parole

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Les Restos du Cœur ont 40 ans mais son porte-parole Yves Mérillon prévient ce samedi sur RMC: avec 1.3 million de bénéficiaires chaque année, "on ne peut pas faire plus", avec le risque de ne pas "tenir le choc". Et d'interpeller Sébastien Lecornu et lui demander de "préserver les personnes les plus fragiles".

"La société va mal, le taux de pauvreté n’a jamais été aussi élevé. 15 % des Français vivent sous le seuil de pauvreté. On reçoit chaque année 1,3 million de personnes. On ne tiendra pas le choc, on ne peut pas faire plus", alerte ce samedi sur RMC Yves Mérillon, porte-parole des Restos du Cœur. "Un jour ou l’autre, on sera emportés. Il y a vraiment une responsabilité de l’État et des politiques de prendre le problème de la pauvreté à la racine. Ça doit être une priorité nationale", martèle-t-il.

La situation financière de l'association s'est aggravée depuis 2022 et la crise inflationniste causée par la guerre en Ukraine. "Nous achetons et nous subissons l’inflation. On dépense encore plus car nous avons de plus en plus de gens. Et les donateurs, qui vivent eux aussi les crises de pouvoir d’achat, sont toujours aussi nombreux mais donnent moins. Le don moyen aux Restos a diminué de 10 à 15 % ces dernières années. Mais on a compensé par une augmentation du nombre de donateurs", explique-t-il.

"On fait du lien social"

Yves Mérillon insiste: "On ne fait pas que de la distribution. On fait de l’accompagnement, du lien social et de l’aide alimentaire d’urgence. Il y a des gens qui ont droit au RSA et qui n’y ont pas accès". Interrogé sur ce qu'il dirait au Premier ministre Sébastien Lecornu, il demande: "Il faut préserver les plus fragiles de la société, les retraités, les indemnités chômage, le RSA… On l’a vu dans les crises : certains basculent rapidement du mauvais côté de la barrière. Ces gens-là sont une priorité."

Si les Restos du coeur "n'ont pas à se plaindre" du nombre de bénévoles, 75.000, Yves Mérillon pense au renouvellement car beaucoup d'entre euxs sont des retraités. Mais aussi à la spécialisation et aux compétences. "On a 75 000 bénévoles. On ne va pas se plaindre, mais il y a toujours un besoin de renouvellement. Il y a beaucoup de retraités, on a toujours besoin de renouveler les bénévoles. Et puis, on a des bénévoles qui vont faire de l’accès au droit, de la recherche dans l’accès à l’emploi, de l’aide scolaire… il y a de la place pour tout le monde."

"Je ne croyais pas du tout qu'un jour, je viendrais ici", témoigne une mère de famille, à Rueil-Malmaison

Dans le centre des Restos du Cœur de Rueil-Malmaison, cette réalité prend forme. Une file de poussettes s’étire, les cris d’enfants se mêlent aux allées et venues pour récupérer lait, compotes et couches.

Ali, mère de cinq enfants, confie : "Je voyais les gens sortir, entrer, je ne croyais pas du tout qu’un jour je viendrais ici. Je me dis : peut-être qu’il y a d’autres personnes qui ont plus besoin que moi." Lamia ajoute : "Même pour trois ! Ici, la vie est chère ! Avant, avec 50 euros je faisais de bonnes courses. Aujourd’hui, avec 50 euros tu achètes deux ou trois trucs."

Pousser la porte de l’association n’est jamais facile. Narimane, les yeux embués de larmes, raconte : "Leurs conseils, leur aide… je leur dis merci beaucoup, du fond de mon cœur. C’est grâce à eux que je reste forte."

Distribution d'aide alimentaire dans le centre des Restos du Coeur à Rueil-Malmaison
Distribution d'aide alimentaire dans le centre des Restos du Coeur à Rueil-Malmaison © Marion Gauthier / RMC

Dominique, responsable du centre, confirme la hausse de la demande : "Beaucoup plus d’inscriptions que d’habitude… On en a dix par semaine depuis la rentrée. L’idéal serait qu’il y ait plus de Restos, comme avait dit Coluche. Mais le problème, c’est qu’il y a toujours des gens qui ont besoin de nous, malheureusement."

"La moitié des personnes qui viennent ont moins de 25 ans"

"Le public est très jeune, la moitié des personnes qui viennent ont moins de 25 ans. Il y a aussi des familles monoparentales, dans 90 % des cas des mamans seules avec des enfants. Et puis on a des retraités, des femmes qui ont eu des carrières hachées avec 800 ou 900 euros de retraite, des travailleurs pauvres aussi, qui n’ont pas de travail à temps complet", explique Yves Mérillon.

Depuis le 26 septembre 1985, date à laquelle Coluche lançait son appel à la solidarité et créait les Restos du Cœur, l’association n’a cessé de croître. La première campagne avait permis de distribuer 8,5 millions de repas. En 2023-2024, ce sont 163 millions de repas qui ont été distribués, soit près de 20 fois plus. Pourtant, le besoin reste immense.

L'invité du jour : Yves Mérillon - 27/09
L'invité du jour : Yves Mérillon - 27/09
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Le dernier rapport de l’INSEE confirme cette inquiétude : le taux de pauvreté en France est le plus élevé depuis 30 ans, touchant près de 10 millions de personnes. Patrice Douret, président des Restos du Cœur, a alerté sur la fragilité des associations face à l’instabilité politique actuelle en France.

Léo Manson et Marion Gauthier