Le fait religieux en entreprise se développe chez les jeunes: "Une forme d'intégrisme"

Le fait religieux en entreprise est mieux accepté qu'il y a quatre ans, surtout chez les jeunes, selon un sondage publié lundi par le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) et l'Institut supérieur du travail, un organisme de conseil en relations sociales.
"On parle de pratique religieuse dans les entreprises, pas dans l'administration", souligne d'emblée ce mercredi sur RMC Bernard Vivier, directeur de l'Institut supérieur du Travail, qui évoque "15 millions de salariés concernés". "Les entreprises sont libres, il y a une diversité, c'est une richesse et on arrive avec ses convictions et ses engagements. Tout cela, on ne le laisse pas au vestiaire", développe-t-il au micro d'Apolline Matin.
Signes ostentatoires, demandes alimentaires, prière...
Les faits religieux constatés peuvent être des signes ostentatoires (croix, kippa...), des demandes alimentaires spécifiques, des demandes de congés à motif religieux, de temps de prière, voire du prosélytisme.
"On parle d'une montée d'une forme d'intégrisme religieux et une sorte d'effacement de ce que les religions peuvent être par rapport aux salariés", avance Bernard Vivier, qui évoque des "refus" de la part de certains hommes de conduire un bus après une femme, de serrer la main à un manager si c'est également une femme...
Selon le sondage, 40% des jeunes estiment aussi acceptable le refus de contact avec certains clients selon leur religion, contre 19% de l'ensemble des salariés.
"Nous avons eu le témoignage de DRH très embarrassées [...] Les entreprises sont confrontées à ce qu'il se passe dans la société, l'entreprise respire comme la société. Elle a besoin d'affirmer des règles communes. Les entreprises, pour certaines, ont monté des règlements intérieurs. D'autres ne vont pas dans cette direction", détaille-t-il.
Les jeunes acceptent beaucoup plus le fait religieux en entreprise que leurs aînés: 46% des salariés de 18-24 ans jugent notamment acceptable de refuser de s'asseoir là où une personne de l'autre sexe s'est assise, et 42%, contre 20% pour l'ensemble des salariés, trouvent acceptable de refuser d'entrer en contact avec certains clients selon leur sexe.
Pas assez de règles et de formations
"Nous avons une société, avec ces générations montantes, qui considèrent que l'expression sur le lieu du travail de pratiques religieuses est non seulement acceptable mais presque souhaitable", analyse Bernard Vivier. "Il est clair que les religions n'enseignent pas le mépris de la femme mais dans la pratique... Les entreprises sont perméables à ce qu'il se passe dans la société, faute de règles, de formation des salariés et des managers", conclut le directeur de l'Institut supérieur du Travail.
Parmi les attitudes les plus acceptées par l'ensemble des salariés, le jeûne pendant les heures de travail, à 76% contre 74% en 2021, ou la pose de jours de congés pour raison religieuse (71% contre 69%).