"On voit plusieurs tentatives de suicides par jour": les professionnels de santé mentale alertent sur l’impact du confinement chez les jeunes
Attention à la "troisième vague psychiatrique": c'est l'alerte lancée ce jeudi par 5 professionnels de la santé mentale de premier plan.
Ils demandent le lancement d'urgence d'une politique publique de grande ampleur pour prendre en charge l'afflux de patients dont la santé mentale s'est fortement dégradée à cause de la crise sanitaire. Selon eux, la fatigue, la sidération psychique, la peur, l'anxiété, l'angoisse, l'insomnie, la colère sont de plus en plus présent dans la société.
"En septembre, on lui a demandé de reprendre sa vie d’avant mais elle n’a pas pu"
Principales victimes, selon ces professionnels: les jeunes, dont la santé mentale a été particulièrement affectée par les deux confinements. Pas de soirée, écoles, collèges et lycées parfois fermées, absence de lien avec les amis.
Une absence de lien social qui met parfois en danger la santé de nos enfants, de nos adolescents. A la sortie du confinement en mai dernier, la fille de Frédéric, âgée de 14 ans, n'a plus grand chose à voir avec l'adolescente pleine de vie du début d'année: "Elle avait tout le temps les yeux dans le vague". Et les médecins confirment: le confinement est à l'origine de sa dépression.
"Ma fille, comme tous les adolescents, vit sur un équilibre qu’elle s’est construit. On lui a retiré tout cet équilibre en lui disant qu’on ne savait pas quand est-ce que la normalité serait rétablie. En septembre, on lui a demandé de reprendre sa vie d’avant mais elle n’a pas pu".
La jeune fille souffre d'anorexie mentale: "Elle ne pouvait plus que se nourrir avec des aliments qu’elle évaluait en terme de calories. Nous étions cet été dans un club de vacances et elle ne prenait plus de part de pizza, plus de pâtes, plus de boisson sucrée".
"Ce que les adultes ont ressenti, leurs enfants l’ont aussi ressenti"
Elle est hospitalisée depuis trois semaines, maintenant. Des cas comme ça, plus grave encore parfois, le professeur Richard Delorme en croise de plus en plus depuis le mois de septembre: "Ce matin, trois enfants de moins de 15 ans sont venus pour des tentatives de suicides".
Il dirige le service psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital Robert Debré à Paris.
"On a toujours eu un certain nombre de tentatives de suicides chez les plus jeunes, c’est à peu près un tous les 3 ou 4 jours mais là, on en a plusieurs par jour. Il s’agit plutôt des effets du mois de mars et du mois d’avril que de la situation actuelle. C’était assez stressant en terme de violences et puis ils étaient aussi très inquiets d’être contaminés et d’avoir leurs parents ou grands-parents qui pouvaient être hospitalisés. Ce que les adultes ont ressenti, leurs enfants l’ont aussi ressenti".
Il conseille donc aux parents d'être encore plus attentif aux comportements de leurs enfants, à parler avec eux des conséquences de la crise sanitaire pour préserver leur santé mentale.