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Sécheresse: l’arrosage des golfs pointé du doigt par des élus EELV et LFI, la fédération se défend

L'arrosage d'un golf (illustration)

L'arrosage d'un golf (illustration) - sunflowerlark CC Flickr

Hendrik Davi, député LFI de Marseille, et Eric Piolle, maire EELV de Grenoble, ont tour à tour dénoncé l'arrosage des terrains de golf en cette période de sécheresse, avec des restrictions, mais aussi des autorisations dans un certain cadre. Contactée par RMC.fr, la Fédération française du golf assure qu'un arrosage minimal est nécessaire à la survie des terrains et de la filière, et que les chiffres avancés par les élus sont "très éloignés" de la réalité.

Les restrictions d'usage de l'eau gagnent peu à peu l'ensemble du territoire français en cette période de sécheresse. 90 départements sur 96 font l'objet d'arrêtés limitant notamment le remplissage des piscines privées, l'irrigation agricole, ou encore le nettoyage des voiries. Mais les restrictions appliquées aux terrains de golf sont pointées du doigt par plusieurs élus de gauche.

"Dans les arrêtés anti-sécheresse, il y a une dérogation pour permettre d'arroser les greens de golf! Alors qu'on appelle à la sobriété, les pratiques des plus riches sont protégées", a dénoncé Eric Piolle, maire écologiste de Grenoble, sur Twitter.

"Pourquoi peut-on arroser les greens de golf quand tout le monde manque d'eau? On peut dire que ça n'a pas tellement de sens" a ajouté Eric Piolle au micro de BFMTV.

"Et si on interdisait?"

Même critique du côté du député La France insoumise Hendrik Davi. "En période de sécheresse, il est interdit de remplir les piscines, mais les golfs doivent seulement réduire leur consommation de 20% et arroser entre 19h et 9h. Un 18 trous a besoin de 5.000m3 par jour, soit la consommation de 12.000 habitants. Et si on les interdisait aussi?" a-t-il questionné sur Twitter dans un message largement relayé.

La fédération de golf réplique, et assure que les chiffres sont 36.5 fois inférieurs à cela

Les chiffres sur lesquels s'appuie le député Hendrick Davi sont issus d'un rapport publié en 2003 par Gérard Miquel, alors sénateur du Lot, qui repose lui-même sur les résultats d'une étude conduite par l'Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse en 1992.

Si les golfs sont de "gros consommateurs d'eau", les quantités nécessaires varient énormément en fonction des "paramètres physiques et climatiques", comme le type de sol, la pluviométrie, ou encore l'ensoleillement, mais aussi en fonction des "options de gestion", propres à chaque terrain, comme le nombre d'hectares arrosés. La consommation d'eau des golfs peut alors varier dans une fourchette allant de "1 à 1000" par hectare, énonce le rapport.

"Un golf haut de gamme de 18 trous a une consommation moyenne de 5.000 m3/jour, ce qui correspond à la production nécessaire à la satisfaction des besoins d'une collectivité de 12.000 habitants", précise l'étude de l'agence.

Contactée par RMC, la Fédération française de golf explique de son côté que la consommation moyenne annuelle d'eau d'un golf est de 25.000m3 par tranche de neuf trous, et fait remarquer que c'est "36,5 fois" moins que les chiffres communiqués par le député Hendrik Davi.

Des autorisations d'arrosage sur les greens, zone cruciale représentant 1 à 2% de la surface totale

Les golfs sont ainsi soumis à des restrictions en période de sécheresse avec 4 niveaux de restrictions, selon un accord cadre défini avec l'exécutif. Le ministère de la Transition écologique demande à minima en "seuil d'alerte" l'interdiction d’arroser les terrains de golf de 8 heures à 20 heures de façon à diminuer la consommation d’eau sur le volume hebdomadaire de 15 à 30 %". Ce chiffre passe à 60% en cas "d'alerte renforcée", avec une interdiction d’arroser les terrains, sauf les greens et les départs (les zones les plus sensibles et indispensables à la pratique du golf).

Enfin, en cas de "seuil de crise", il y a interdiction d'arroser les golfs, sauf les greens qui peuvent toujours être arrosés à moins d'une pénurie d’eau potable. Doit alors s'appliquer un arrosage "réduit au strict nécessaire" entre 20h et 8h, qui représente moins de 30 % des volumes habituels.

Ces restrictions sont mises en oeuvre par les préfectures via des arrêtés. La grande majorité des départements y sont actuellement soumis, comme dans les Pyrénées-Orientales, où certaines zones sont placées en état d'alerte renforcée sécheresse. Seuls les greens peuvent ainsi être arrosés, sur "une plage de 4h", avec une interdiction de 6h à 20h.

Les préfets et maires peuvent également prévoir des mesures plus contraignantes s’ils estiment qu’une pénurie d’eau potable est à craindre, ou que les conditions locales l’imposent.

La Fédération française de golf a d'ailleurs précisé que les greens représentent "qu'1 à 2%" de la surface totale des golfs, et que neuf trous nécessitent au minimum 50 à 60m3 d'eau par jour pour survivre.

La Fédération déjà "impliquée dans la problématique" de la gestion de l'eau

La fédération dit être déjà "très impliquée dans la problématique" de la gestion de l'eau, et avance également des arguments économiques et sociaux pour justifier cette dérogation accordée aux golfs malgré la sécheresse. Selon elle, le golf "doit préserver son activité au risque de créer un impact non négligeable sur sa filière" économique qui représente un poids de "1,5 milliard d'euros en France et assure 15.000 emplois".

Et puisque le parcours "est l'élément numéro 1 de l'outil économique", il est nécessaire de le préserver en passant par un arrosage minimal vital [...] d'où les accords passés avec les pouvoirs publics pour pouvoir" les arroser, nous répond encore la Fédération.

Si un green venait à se déssécher en période estivale, cela conduirait "à une fermeture de la structure et une perte d'exploitation pendant six mois", a-t-elle indiqué. Et des conséquences financières mettant en péril l'équilibre des structures.

Emilie Roussey (avec J.A.)