Taxe soda: Fanta, Pepsi, Schweppes, Cola premier prix... Pourquoi ces sodas sont-ils moins chers?

Des canettes de soda (illustration) - JOEL SAGET / AFP
Une hausse qui fait mal au portefeuille. En un an, le prix des boissons sucrées a augmenté de 10% en moyenne. La principale explication: l'augmentation de la taxe soda, prévue dans le budget de la Sécurité sociale et entrée en vigueur le 1er mars.
Mais cette taxe ne pèse pas de la même manière dans le prix de tous les sodas, et certains ont trouvé la solution pour éviter la plus haute tranche de taxation. Ainsi, les hausses de prix fluctuent selon les marques et selon les gammes.
Certains sodas premier prix notamment, conservent des prix relativement stables. Et il y a une raison à cela. On vous explique.
Entre 4 et 35 euros par hectolitre
Depuis deux mois et demi, les fabricants de boissons sucrées sont redevables d'une taxe de quatre euros par hectolitre (100 litres) en dessous de 5 kilos de sucre ajouté. Pour les recettes comptant entre 5 et 8 kilos de sucre ajouté par hectolitre, le montant de la taxe atteint 21 euros. Au-delà de 8 kilos de sucre ajouté, les boissons sont taxées à hauteur de 35 euros par hectolitre. C'était, auparavant, 17,7 euros.
Cela signifie que pour un litre de Coca-Cola, qui contient 100 grammes de sucre, la taxe est désormais de 35 centimes. Soit une augmentation de 17,3 centimes. C'est la même chose pour de nombreux sodas très consommés comme l'Orangina, ou encore les jus de fruits, comme le jus d'orange ou le jus de pomme.
Ces hausses sont répercutées sur les prix en rayons. Ainsi, une bouteille de 1,5L de Coca-Cola se vend aujourd'hui 2,3 euros contre 2 euros avant le mois de mars. Néanmoins, certaines marques semblent moins impactées et conservent des prix bien moins élevés.
Lorsqu'on compare les prix d'une bouteille de Coca-Cola, d'une bouteille de Pepsi et d'une bouteille de Cola Top Budget (marque distributeur d'Intermarché), on constate une différence importante: 1,35 euros/L pour la première, 0,79 euros/L pour la deuxième et 0,37 euros/L pour la troisième.
Des édulcorants à la place du sucre
À la lecture des étiquettes, une deuxième différence saute aux yeux. Dans la liste des ingrédients du Coca-Cola, le sucre est en deuxième position après l'eau. Dans celle du Pepsi et du Cola Top Budget, on trouve aussi du sucre, mais pas que: du sucralose et de l'acésulfame K sont ajoutés.
Ces derniers sont des édulcorants de synthèse: ils donnent un goût sucré à la boisson, tout en étant sans sucre, car sans glucose. Ce sont d'ailleurs des ingrédients que l'on retrouve généralement dans les boissons "light". Ils permettent aux marques de réduire la teneur en sucre de leurs boissons, et donc de réduire le coût de la taxe soda.
Raison pour laquelle depuis quelques années, on les trouve également dans des boissons dites "regular". Suite à une première augmentation de la taxe soda en 2018, de nombreuses marques, telles Fanta, Schweppes ou Pepsi en 2023, ont petit à petit remplacé en partie le sucre par des édulcorants de synthèse, leur permettant de diviser leur note fiscale par deux ou trois.
Grâce à eux, Pepsi et le Cola premier prix sont sous la barre des 5 kilos de sucre par hectolitre, et ne payent qu'une petite taxe de quatre euros, au lieu de 35. Fanta et Schweppes, qui conservent une teneur en sucre comprise entre 5 et 8%, payent 21 euros par hectolitre (ou 21 centimes par litre) de taxe soda, 14 euros de moins que leur collègue Coca-Cola.
Moins chers et moins sucrés... Mais pas meilleurs
Les économies réalisées par les industriels qui utilisent ces édulcorants de synthèse ne sont par ailleurs pas que d'ordre fiscal. Le coût de revient des boissons à base d'édulcorants est effectivement bien inférieur à celui des boissons à base de glucose. Le sucralose par exemple a un pouvoir sucrant 600 fois supérieur à celui du sucre... Il en faut donc 600 fois moins pour obtenir la même saveur sucrée.
C'est aussi pour cela que toutes les marques premier prix les utilisent. En rayons, ces différences de coût et de taxation s'observent sur les prix, même pour les grandes marques. Fanta, Pepsi ou Schweppes voient certes leurs tarifs augmenter aussi, mais ces sodas restent en moyenne bien moins chers que le Coca-Cola ou l'Orangina.
Des sodas moins chers et moins sucrés, une bonne nouvelle pour les consommateurs? Pas vraiment... Certes, la quantité de sucre ingérée est réduite, mais les substituts utilisés sont tout aussi voire plus controversés que le sucre. De nombreuses études ont montré qu'ils augmentaient les risques de maladies cardiovasculaires, de diabète et de cancer.
"La consommation d’édulcorants serait associée à un risque accru de cancer", titrait par exemple l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), dans un communiqué paru le 24 mars 2022.
Aujourd'hui, les nutritionnistes préfèrent recommander la consommation ponctuelle d'un soda avec du "vrai" sucre plutôt que l'excès de sodas "light". Remplacer le sucre par des édulcorants permet donc aux industriels de faire des économies, mais au détriment des consommateurs qui ne sont pas forcément informés de ces changements de recettes, et ne s'attendent pas à trouver des édulcorants de synthèse dans des sodas "regular".
Vers une baisse de la consommation?
Quant aux hausses de prix sur les sodas gardant une composition "pur sucre", elles impactent le portefeuille, mais peuvent avoir un effet dissuasif et entraîner une baisse de la consommation, qui est l'objectif de santé publique recherché.
D'ailleurs, selon l'institut NielsenIQ, les ventes de sodas ont baissé de 4,2% sur les mois de mars et avril. Il est trop tôt pour en tirer des conclusions, mais des exemples aux États-Unis et en Grande-Bretagne ont prouvé qu'une forte augmentation des prix avait un impact sur la consommation.
"En deçà de 20% d'augmentation, les comportements de consommation n'évoluent pas énormément, donc il faut des augmentations de prix qui soient substantielles pour que les changements s'opèrent," expliquait à nos confrères de TF1 Céline Bonnet, économiste à l'INRAE et à Toulouse school of economics.