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Explosion de la contrefaçon: ces produits qui imitent les grandes marques ne sont pas sans risques

Des contrefaçons de produits alimentaires saisies par les douaniers à la Réunion. (illustration)

Des contrefaçons de produits alimentaires saisies par les douaniers à la Réunion. (illustration) - Douane française

Mercredi 4 juin, c'est la journée mondiale anti-contrefaçon. L'occasion de rappeler que cette pratique illicite est un fléau pour les marques, mais aussi pour les consommateurs, qui s'exposent à des risques en en achetant.

Des cacahuètes enrobées de chocolat dont les mascottes sont deux personnages colorés et souriants, ça vous dit quelque chose? Non, nous ne parlons pas des célèbres M&M's... Mais des Mi&Ni, une copie de cette sucrerie, repérée sur un site chinois qui fait du commerce de gros.

Faux M&M's vendus sur un site chinois
Faux M&M's vendus sur un site chinois © Capture d'écran alibaba.com

Logo, forme, couleur... Tout est identique à l'original, sauf le nom qui diffère légèrement. Des exemples comme celui-ci, nous en avons trouvé des dizaines. Faux Ferrero Rocher, faux biscuits speculoos de la marque iconique Lotus Biscoff, qui devient "Biscofix" sur la contrefaçon, de la pâte à tartiner "chocolate" au logo qui reprend parfaitement le code couleur et la police d'écriture du Nutella, etc.

Contrefaçon de Nutella repérée sur un site chinois
Contrefaçon de Nutella repérée sur un site chinois © Capture d'écran alibaba.com

Ces contrefaçons alimentaires peuvent prêter à sourire, tant les imitations sont grossières. Mais ce véritable marché parallèle recèle de produits divers et variés, parfois tellement ressemblants aux vrais qu'impossibles à détecter.

Ils nuisent non seulement aux marques, dont le savoir-faire est pillé, mais aussi aux consommateurs qui, en les achetant, s'exposent à certains dangers ou se font arnaquer. Et participent à financer le grand banditisme. Explications.

21,47 millions de produits

La contrefaçon, c'est l'utilisation d'un droit de propriété intellectuelle, sans l'accord du titulaire, qu'elle soit totale ou partielle, selon l'INPI, l'Institut national de la propriété intellectuelle. Il peut donc s'agir de la reproduction d'un logo, d'un nom, des couleurs d'un emballage ou d'un flacon, etc. C'est un délit, puni de trois ans d'emprisonnement et 300.000 euros d'amende.

Et malgré ces sanctions dissuasives, elle explose partout dans le monde. 21,47 millions de produits de contrefaçon ont été saisis en 2024 par les douanes françaises. C'est quatre fois plus qu'en 2020. Aujourd'hui, cette pratique représente 2,5% du commerce mondial.

Par ailleurs, elle se perfectionne et est, dans certains cas, quasi indétectable. Selon l'Unifab (Union des fabricants), 40% des consommateurs ont déjà acheté de la contrefaçon, mais 34% sans le savoir. Or, elle touche tous les domaines: l'alimentaire, le textile, la maroquinerie, les chaussures, les parfums, les jouets... Mais aussi, plus inquiétant, les cosmétiques, les médicaments, les vaccins... Et même les pièces automobiles.

Le produit le plus contrefait? Les articles d'emballage. Car c'est bien sûr la manière la plus simple de faire passer un article bas de gamme pour une grande marque. Suivent les jouets, dont une saisie record a d'ailleurs été opérée il y a quelques jours près de Bayonne.

Un homme détenait dans un hangar plus de 500.000 peluches, jeux de construction, jeux de cartes etc, qu'il destinait à la vente sur des sites de petites annonces. Des sites de revente comme Vinted ou Le bon coin regorgent de contrefaçons, certains ayant développé de véritables business qui consistent à acheter ces faux produits sur des sites chinois, et à les revendre ensuite bien plus chers en prétendant qu'ils sont authentiques.

Le commerce en ligne profite aux contrefaçons

La pratique a explosé avec le commerce en ligne et les réseaux sociaux. Les marchandises issues des commandes particulières passées sur internet représentaient plus de 31% des produits contrefaits en 2024.

Très difficiles à réguler, ces sites permettent d'échapper aux contrôles et de s'échanger les "bons tuyaux". Il existe même des sites qui repèrent les "meilleures" contrefaçons de marques de luxe et recensent les vendeurs chinois, mais aussi des groupes de discussion où se retrouvent les revendeurs peu scrupuleux.

Les jeunes, particulièrement sensibles à leur image et aux marques qu'ils portent, sont des cibles privilégiées, aussi bien côté acheteurs que revendeurs. Dans un reportage, Ouest-France a notamment interrogé plusieurs lycéens qui affirment revendre sur Vinted des articles de contrefaçon achetés sur des sites chinois.

Ils ne se rendent pas forcément compte de la gravité de ce trafic qui, à l'échelle mondiale, finance le terrorisme et noue des liens étroits avec d'autres activités illicites comme le trafic de drogue et la traite d'êtres humains, comme l'expliquait un rapport publié conjointement par l'Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et Europol en octobre 2024.

À l'échelle nationale, la contrefaçon, en volant le savoir-faire des marques, entraîne des pertes financières estimées par l'Unifab à plus de 6 milliards d'euros par an et détruit 38.000 emplois.

Surtout, en achetant des contrefaçons, parfois banalisées sous des termes tels que "dupes" ou "génériques" (qui peuvent être légaux s'ils se contentent de s'inspirer vaguement, mais deviennent illicitent lorsqu'ils copient), les consommateurs s'exposent à divers risques.

Risques sanitaires

Outre celui de se faire arnaquer, lorsqu'ils acquièrent des articles bas de gamme en pensant qu'il s'agit de marques, le danger repose sur la composition de certains de ces produits de contrefaçon.

Dans le domaine alimentaire, impossible de connaître la liste précise des ingrédients de ces produits, qui ne sont soumis à aucun contrôle sanitaire: ils peuvent contenir des ingrédients interdits, ne pas respecter la chaîne du froid, être contaminés à des bactéries...

Le problème est comparable lorsqu'il s'agit de parfum ou de cosmétiques. Dans un communiqué, Emmanuel Guichard, Délégué général de la FEBEA, Fédération des entreprises de la beauté, alerte: "Ces produits peuvent contenir des ingrédients toxiques et des allergènes non déclarés qui présentent une réelle menace pour les consommateurs".

Plus grave encore, les contrefaçons peuvent concerner des médicaments. Dans ce cas, en plus de contenir potentiellement des composants dangereux, ils sont inefficaces pour le mal traité. En 2021, les autorités sud-africaines avaient notamment saisi des centaines de faux vaccins anti-COVID qui s'apprêtaient à être administrés à la population.

Repérer une contrefaçon

Lorsque vous souhaitez faire l'acquisition d'un produit quel qu'il soit, pour éviter tout risque de tomber sur une contrefaçon, la vigilance s'impose: si l'achat s'effectue en ligne, demandez au vendeur un maximum de photos du produit, pour pouvoir l'observer sous toutes les coutures.

Scrutez l'emballage: une faute d'orthographe, une différence subtile sur le logo, des coutures mal faites, un flacon dont la forme est irrégulière ou à la contenance inhabituelle, une étiquette qui vous semble étrange... sont autant de signaux qui peuvent vous mettre la puce à l'oreille.

Si vous achetez un article de grande marque, voire de luxe, exigez un certificat d'authenticité (mais attention, ce n'est pas une preuve absolue, des faux peuvent aussi être fabriqués).

Évidemment, il faut se méfier d'un prix trop bas. Si vous avez un doute, signalez l'article à la plateforme. Toutes assurent prendre le problème au sérieux et développer des outils pour repérer les contrefaçons. En 2023, Vinted assure avoir supprimé 2 millions d'annonces suspectes.

Charlotte Méritan