Emmener ses restes, renvoyer son plat en cuisine... A-t-on tous les droits au restaurant?

Les Français aiment aller au restaurant au moins une fois par mois, même si, avec l'inflation et la baisse du pouvoir d'achat, 42% ont baissé leur niveau de dépenses au restaurant en 2023 par rapport à 2022, selon une étude publiée en janvier par le cabinet Revenue management solutions (RMS).
On connaît l'adage, au restaurant, "le client est roi". Mais l'est-il vraiment? En réalité, même si le code de la consommation est très protecteur, certains droits sont méconnus et plus ou moins respectés par les restaurateurs.
D'autres, un peu stricts, s'assouplissent en fonction de l'usage et de la situation. Car qui ferait un procès à un restaurateur sous prétexte que ce dernier lui aurait refusé l'entrée dans son établissement ou qu'il l'aurait intimé de libérer la table de façon un peu pressante à la fin du repas?
Malgré tout, nul n'est censé ignorer la loi et il peut être très utile de bien connaître ses droits et obligations pour se faire entendre en cas de désaccord. Tour d'horizon en 10 questions de ce qui se fait, peut se faire ou ne devrait pas se faire au restaurant.
· Peut-on se voir refuser l'entrée au restaurant au motif que l'on est seul?
Non, même s'il ne reste qu'une table de quatre personnes disponible, le restaurateur a l'obligation de vous proposer cette table, quand bien même cela représenterait une perte de chiffre d'affaires pour lui.
Il serait discriminatoire de vous refuser au motif que vous êtes seul, et la discrimination est punie par la loi. De même, le restaurateur ne peut pas refuser l'entrée au sein de son établissement aux enfants.
Pour vous refuser, il faudrait qu'il puisse invoquer un motif légitime, comme un comportement inapproprié, par exemple.
· Peut-on imposer au restaurateur la présence de son animal de compagnie?
Non, le restaurateur peut interdire la présence d'animaux de compagnie au sein de son établissement.
Seule exception: les chiens d’assistance à personne en situation d'invalidité et les chiens guides accompagnant les personnes malvoyantes.
· A-t-on le droit de ne commander qu’un café au restaurant?
Théoriquement oui. Même à l'heure du repas, refuser un client au motif qu'il ne souhaite consommer qu'un café serait considéré, au sens strict du code de la consommation, comme un refus de vente.
L'article L122-1 de ce code précise: "Il est interdit de refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation d’un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d’un produit à l’achat d’une quantité imposée ou à l’achat concomitant d’un autre produit."
Vous pouvez aussi ne commander qu’une entrée, ou qu’un dessert. Dans les faits, il est fréquent qu'un restaurant débordé à l'heure du déjeuner réserve ses tables aux clients souhaitant manger. Et, à notre connaissance, personne n'a encore fait de procès à un établissement pour pareil motif... Mais si vous y tenez, sachez que c'est votre droit d'exiger cette possibilité.
· Un restaurateur peut-il m’alpaguer pour m’inciter à venir dans son restaurant?
Théoriquement non, car cela s'appelle aux yeux de la loi du racolage commercial, et c’est interdit. En réalité, la pratique est fréquente dans les zones très touristiques où la concurrence est rude. Et elle est très peu contrôlée.
· Peut-on exiger de l’eau du robinet, même dans un restaurant haut de gamme?
Que vous dîniez dans un restaurant bon marché ou dans un étoilé au guide Michelin, la règle est la même: le restaurateur a l'obligation de vous offrir de l'eau. Même chose pour le pain. C'est un arrêté qui remonte au 8 juin 1967 qui le dit. Plus exactement, l'eau et le pain doivent être inclus dans le prix du repas.
"Dans les établissements servant des repas, chacun des prix indiqués pour les plats, portions et boissons proposés comprend obligatoirement, les taxes, le couvert [...] Au sens du présent article, le couvert comporte obligatoirement, outre le pain, l’eau ordinaire, les épices ou ingrédients [...] usuellement mis à la disposition du client à l’occasion des repas," précise l'arrêté.
Alors, osez réclamer votre carafe.
· A-t-on le droit de ramener sa propre bouteille de vin au restaurant?
La loi ne le prévoit pas, mais le restaurateur peut l’autoriser moyennant ce qu'on appelle un "droit de bouchon", usuellement compris entre 4 et 8 euros bien que ce prix soit libre, censé couvrir les frais de débouchage de la bouteille, de fourniture et nettoyage de vaisselle, etc. Cette coutume venue des pays anglo-saxons n'est pas dans la culture française et a du mal à s'imposer en France.
· Puis-je exiger d’emmener mes restes?
Oui, depuis 2021, les restaurateurs doivent laisser la possibilité à leurs clients d'emmener leurs restes dans ce qu'on appelle un "doggy bag". Ils n'ont pas l'obligation de le proposer mais ne peuvent pas le refuser. Cela fait partie de la loi AGEC, dite anti-gaspillage, qui vise entre autres à lutter contre le gaspillage alimentaire. Vous pouvez aussi repartir avec une bouteille de vin non terminée si vous l'avez payée.
· A-t-on le droit de renvoyer un plat en cuisine autant de fois qu'on veut?
Oui, en cas de motif légitime: si le plat est tiède, s’il y a une anomalie (un cheveu dans l'assiette par exemple) ou si le plat ne correspond pas à la description. Si c’est juste une question de goût, vous ne pouvez pas renvoyer votre assiette.
· Peut-on me demander de partir une fois que j’ai fini de manger?
Théoriquement non. Vous pouvez rester aussi longtemps que vous le souhaitez tant que le restaurant est ouvert. Sauf si on vous a prévenu au préalable de l'heure à laquelle vous devrez quitter les lieux (et si le temps qui vous est laissé sur place est convenable bien sûr).
· Peut-on me servir un plat surgelé sans me le dire?
Oui, car afficher qu’un plat n’est pas fait maison n’est pas obligatoire. Une proposition de loi visant à l’imposer a été retirée fin mars, face à la gronde des restaurateurs, qui jugeaient cette mention trop négative. Le député Richard Ramos a toutefois déposé à l'Assemblée nationale une nouvelle proposition de loi en ce sens mi-avril.

En revanche, un logo signifiant que le plat est fait maison existe et peut être librement utilisé par les restaurateurs. Il représente une casserole surmontée d'un toit.