Chevaux mutilés: 50 ans d'affaires et de mystères
Qui en veut aux chevaux français? Le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie a annoncé mercredi la mise en place d'une équipe de spécialistes pour répondre aux craintes des propriétaires de chevaux, face aux attaques contre des équidés qui se multiplient en France. Ces derniers mois, des chevaux ont été victimes de mutilations sur plus de la moitié du territoire national. Ils sont joignables au 0 800 738 908, du lundi au vendredi de 9H à 17H.
Pourtant, ce genre d'attaques n'est pas si rares: des États-Unis à l'Allemagne en passant par la Suisse, l'histoire se répète depuis 50 ans. Des vagues de mutilation d'animaux ont déjà eu lieu provoquant parfois une psychose... et laissant un étrange parfum de mystères.
États-Unis: le FBI, les fermiers et les ovnis
Au milieu des années 1970, dans le Midwest américain, des vaches et chevaux sont retrouvés morts et mutilés dans les ranchs de la région. Un mode opératoire est identifié : les organes, notamment génitaux, semblent avoir été prélevés à l'aide d'un objet contondant.
Le FBI est mandaté pour enquêter et assure en 1975, dans un rapport déclassifié et consulté par l'AFP, que ces actes sont "le fait d'autres animaux, en particulier des renards aux dents acérés qui rappellent des coups de ciseaux". Cette thèse ne convainc toutefois pas les fermiers qui évoquent de possibles rituels sataniques et même l'intervention d'extraterrestres et l'apparition d'ovnis la nuit dans leurs champs...
La théorie des ovnis ne me convainc pas, mais peut-être suis-je trop étroit d'esprit", répond dans le New York Times, Carl Whiteside, le responsable des liaisons du FBI dans l'État du Colorado. L'enquête est close en 1980 et conclut que les quelque 10.000 bêtes concernées depuis 5 ans sont en majorité victimes de "prédation naturelle".
Royaume-Uni: 20 ans d'enquête
"Le seul trait commun de ces attaques, c'est l'inconsistance. Il ne semble pas qu'il y ait une fréquence ou une raison", déclare à l'AFP en 1993 un porte-parole de la police du Hampshire, au sud de l'Angleterre.
Entre 1983 et 1993, plus de 160 chevaux sont retrouvés mutilés en Grande-Bretagne, dans le Hampshire mais aussi le Yorkshire ou en Ecosse, suscitant une véritable psychose dans les haras.
Les enquêteurs se mettent sur la piste d'un ou plusieurs agresseurs. "Il peut s'agir d'un pervers, d'un psychopathe, d'une personne qui déteste les animaux ou la chasse ou qui a une rancune particulière", estime alors ce même représentant de la police. En vain. Une enquête approfondie menée pendant vingt ans par un expert a conclu que la plupart des blessures étaient accidentelles ou causées post-mortem par un charognard (renard, corbeau...), a rapporté le quotidien britannique Guardian en 2001.
Allemagne: le mystérieux "éventreur"
Entre 1993 à 2003, des mutilations de chevaux en Allemagne sont attribuées à un mystérieux "éventreur" sévissant notamment dans le nord du pays.
Surnommé par les tabloïds "Pferde-Ripper" (de l'allemand "Pferde", chevaux, et de l'anglais "ripper", éventreur), il aurait massacré - seul ou avec des émules - une centaine de chevaux à coups de couteau ou de lance. Et gravement blessé au moins autant d'équidés.
Une commission d'enquête spéciale est créée, des récompenses allant jusqu'à 10.000 euros sont promises en cas d'informations concluantes mais les preuves matérielles font défaut. Les limiers allemands font, là aussi, chou blanc et l'auteur n'a jamais été identifié.
Suisse: le martyre de l'âne Coca
La Suisse a elle aussi connu une série de mutilations de chevaux ou de vaches en 2005, qui culmine avec la mort de l'âne Coca à Neuchâtel. L'animal, "qui faisait chaque année la joie des enfants à Noël", est retrouvé mort, émasculé, dans son parc, se rappelle Olivier Ribaux, professeur, directeur de l'Ecole des sciences criminelles et de l'Université de Lausanne. L'autopsie montrera toutefois qu'il est mort d'une crise cardiaque et que les lacérations n'ont pas pu être réalisées avec une arme.
Ce spécialiste des phénomènes de mutilation d'animaux tire d'ailleurs la sonnette d'alarme sur un possible emballement en France.
"La police de Neuchâtel s'empare de l'affaire et démontre que ce ne sont pas des interventions humaines. Elle ne s'est pas satisfaite du contexte ambiant et des explications que l'on donnait sur cette série" de mutilations, a t-il déclaré samedi dans un entretien à la RTS.