RMC
Travail

Rackets sur des chantiers: "quand on commence à payer, c'est foutu"

-

- - -

Huit prévenus sont jugés à partir de ce lundi devant le Tribunal de grande instance de Marseille pour des affaires de rackets sur des chantiers de la ville. Certaines entreprises étaient notamment menacées pour embaucher des habitants des quartiers nord de la ville.

Ils sont accusés d'avoir organisé des rackets sur des chantiers de BTP… Huit prévenus, âgés d'une quarantaines d'années, sont jugés à partir de ce lundi devant le Tribunal de grande instance de Marseille pour des extorsions de fond, des destructions de biens et des fraudes sociales. Si la pratique ne concerne pas uniquement la cité phocéenne, le phénomène y a pris une telle ampleur qu'une brigade spécialisée a été créée il y a deux ans: un Groupe local de traitement de la délinquance GLTD de 10 enquêteurs baptisé "Chantier", unique en France.

Chantage à l'embauche

Ces prévenus s'étaient attaqués notamment, en 2015, à une filiale de Bouygues sur le chantier de la rocade L2, une autoroute urbaine qui traverse les quartiers Nord. Ce 26 janvier 2015, la plus grande foreuse d'Europe était incendiée sur le chantier, à proximité de la cité Picon-Busserine, dans le 14e arrondissement de Marseille, pour un préjudice évalué à 2 millions d'euros. Quelques semaines plus tôt, une filiale du groupe Bouygues avait refusé les services d'une société de sécurité locale.

C'est le gérant de cette même société de sécurité qui est accusé d'avoir incendié la foreuse, afin d'exercer un chantage à l'embauche, une pratique qui a cours qui dans les quartiers Nord. Cette fois, il aurait été ordonné à l'entreprise de BTP d'employer onze jeunes du quartier pour éviter "de nouveaux ennuis". Mais un des cadres de l'entreprise va dénoncer les faits, et briser ainsi une omerta sur ces pratiques de rackets qui ont causé jusqu'à 50 millions d'euros de préjudice par an dans le secteur, rien qu'à Marseille.

"Les gens menacés ont été la cible de tirs"

"Quand on commence à payer, c'est foutu, se désole sur RMC Philippe Deveau, président de la Fédération du BTP des Bouches-du-Rhône. Après c'est une escalade, ça encourage d'autres à prendre la même initiative. Les gens qui ont été menacés, on leur tire dessus. Ça va loin, vraiment loin. C'est quelque chose qui est très difficile à vivre sur un chantier et qui est très compliqué aussi bien pour l'entrepreneur que pour les salariés". Aujourd'hui, environ 70 enquêtes sur des problèmes de sécurité ont été ouvertes et confiées à la brigade Chantier.

P. Gril avec Lionel Dian