"Un dialogue nécessaire": pourquoi Emmanuel Macron accueille Mohammed Ben Salmane
D’infréquentable à incontournable? Mohammed Ben Salmane, le prince héritier d’Arabie saoudite, accusé dans l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi en 2018 et souvent visé par les défenseurs des droits de l’homme, est reçu à l’Elysée ce jeudi soir par Emmanuel Macron. "Dialoguer ne veut pas dire que l'on est complaisant": c’est qu’on affirme dans l'entourage du chef de l'Etat. Et ses conseillers l'assurent: le président abordera sans tabou l'affaire Khashoggi avec Mohammed Ben Salmane, comme à chaque fois, dit-on, lorsqu'il est question de droits de l'homme. Avec le prince héritier saoudien, les échanges sont d'ailleurs assez réguliers depuis la visite d’Emmanuel Macron dans le Golfe fin 2021.
"Un dialogue nécessaire", répète-t-on au sommet de l'Etat, car il sera surtout question de la crise énergétique, sur fond de guerre en Ukraine et de flambée des prix. "Vu la crise, il faut parler avec les pays producteurs de pétrole", insiste un conseiller. Objectif: convaincre l'Arabie saoudite d'ouvrir les vannes, pour soulager le marché à l'approche de l'hiver. La semaine dernière à Paris, le président des Emirats arabes unis et Emmanuel Macron ont conclu un accord sur l'approvisionnement énergétique.
"Difficile de ne pas envisager de parler avec l’Arabie saoudite"
"Les autorités françaises sont bien conscientes que recevoir Mohammed Ben Salmane est évidemment délicat en termes de politique et de réputation, explique Francis Perrin, directeur de recherches à l'IRIS, spécialiste des questions d'énergie. Mais à leurs yeux, les intérêts en jeu pour l’Europe le valent. Ce pays a les plus importantes réserves de pétrole prouvées après le Venezuela. Dans le contexte actuel, celui de la guerre en Ukraine, il est difficile de ne pas envisager de parler avec l’Arabie saoudite."
Mais pour Jean-Claude Samouiller, président d'Amnesty international France, la question des droits de l’homme doit quand même être abordée par Emmanuel Macron. "Il y a sans doute des contrats économiques mirobolants qui vont être signés. Mais Ce qu’on voudrait, c’est que ce soit évoquée également la question des droits de l’homme, souligne-t-il. On pense évidemment au meurtre de Jamal Khashoggi, mais également à l’abolition de la peine de mort, à l’égalité entre les hommes et les femmes, à l’arrêt des bombardements sur les populations civiles au Yémen. Ce sont des choses qui sont très importantes et qui ne doivent pas passer à la trappe."