"Apologie du terrorisme": deux concerts de Freeze Corleone interdits, des recours en justice

Le rappeur Freeze Corleone - YouTube (Freeze Corleone)
"Admiration" pour Hitler, "propos complotistes", paroles "antisémites": les autorités ont interdit les concerts prévus à Lille et Lyon du rappeur Freeze Corleone, visé par une enquête pour "apologie du terrorisme", des décisions contestées en justice par cette figure marquante et controversée du rap français.
Les avocats du Francilien de 31 ans contesteront ces deux décisions préfectorales jeudi: d'abord à Lille à 10h30, quelques heures avant le concert programmé à 20h au Zénith (7.000 places), puis en début d'après-midi à Lyon, deux jours avant son concert samedi à la halle Tony-Garnier.
"Freeze Corleone n'a jamais connu de condamnation pénale et ses précédents concerts se sont toujours déroulés dans le calme", a réagi son avocat, Me Sanjay Mirabeau, auprès de l'AFP.
Mais pour la préfecture du Nord, "les paroles de plusieurs chansons" contiennent "des propos complotistes, ouvertement antisémites et empreints d'une admiration pour la personne d'Adolf Hitler et le IIIe Reich", ce qui justifie l'interdiction du concert. Sont également mis en avant "des propos faisant l'apologie du terrorisme, qui font référence à l'attentat de Nice" du 14 juillet 2016 sur la Promenade des Anglais (86 morts et des centaines de blessés).
"J'arrive dans l'rap comme un camion qui bombarde à fond sur la...", chante Freeze Corleone dans sa chanson "Haaland", en duo avec le rappeur allemand Luciano, sortie la semaine dernière. Ces paroles ont entraîné l'ouverture par le parquet de Nice d'une enquête préliminaire pour apologie du terrorisme.
Déjà plusieurs interdictions
Outre les extraits mis en cause par la préfecture du Nord, celle du Rhône relève aussi "des références antisémites et faisant l'apologie du nazisme" lors d'un concert à Paris en novembre.
Freeze Corleone (Issa Lorenzo Diakhaté de son vrai nom) avait déjà fait l'objet en 2020 d'une enquête, finalement classée sans suite, pour "provocation à la haine raciale" après des clips contenant des paroles telles que "J'arrive déterminé comme Adolf dans les années 30" ou "Tous les jours RAF (rien à foutre) de la Shoah".
Dénonçant des "propos racistes inacceptables", son label Universal Music avait alors annoncé la fin de "toute collaboration" avec le rappeur, mais son équipe a assuré mardi qu'il était toujours sous contrat.
Me Sanjay Mirabeau compte mettre en avant jeudi devant la justice que les chansons incriminées ne font pas partie du tour de chant de son client. Soit parce qu'elles sont "très anciennes", soit, concernant "Haaland", parce qu'elle "appartient à un album de Luciano".
Plusieurs préfectures ont interdit ces derniers mois des concerts de Freeze Corleone. La justice administrative a finalement permis la tenue de deux concerts au Zénith de Paris en novembre, mais a validé l'interdiction d'un autre près de Nantes en décembre.
Celui-ci est pour l'heure reporté au 28 février en attente d'une décision du Conseil d'État. Ce même Conseil d'État avait fini par autoriser le rappeur à se produire à Rennes en mars dernier, en dépit d'une autre interdiction.
"Étape vers l'infâme"
Lors de son concert rennais, Freeze Corleone "a interprété des titres comportant des propos antisémites" et "empreints d'une admiration" pour Hitler, ce qu'il s'était pourtant engagé à ne pas faire, assure également la préfecture du Rhône.
Après la publication de "Haaland", Christian Estrosi, maire de Nice, avait dénoncé "une provocation ignoble" et Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, estimé qu'une "nouvelle étape vers l'infâme (avait) été franchie".
L'équipe du rappeur s'est insurgée mardi dans un communiqué contre "la condamnation de paroles imaginaires dont les dénonciateurs sont en réalité les auteurs", puisque la chanson ne mentionne pas la Promenade des Anglais.
C'est également en référence au rappeur que Jordan Bardella, président du RN, a qualifié de "repaire d'un antisémite" l'émission sur Twitch consacrée au rap DVM Show, à laquelle a participé lundi soir la ministre de la Culture Rachida Dati. Freeze Corleone, 600.000 followers sur Instagram, avait participé à une précédente émission, mais n'était pas présent lundi.