Extradition d'Amra: "Un affront" pour les syndicats pénitentiaires qui défendent le recours à la visio

Mohamed Amra devrait être extradé de la prison de Condé-sur-Sarthe (Normandie) la semaine prochaine. Poursuivi pour "meurtres en bande organisée", il doit être interrogé par des magistrats au tribunal de Paris dans le cadre de son enquête sur son évasion, précise Le Parisien.
Le convoi devra parcourir 260 km entre la prison et le tribunal judiciaire. Des conditions de sécurité hors norme sont prévues, a assuré Gérald Darmanin.
Un transfert évitable pour les agents pénitentiaires
Les syndicats pénitentiaires sont furieux. Selon eux, le transfert du narcotrafiquant, en cavale durant 9 mois et retrouvé en Roumanie le 22 février, aurait pu être évité. Une visioconférence aurait pu être organisée. La juge aurait également pu se déplacer.
"Pour le personnel, c'est un affront. Je n'ose même pas imaginer pour les familles des victimes des collègues qui ont été blessés", affirme l'un d'entre eux au micro de RMC.
Un peu plus d'un an après la mort de deux agents pénitentiaires à la suite de l'évasion de Mohamed Amra, Emmanuel Baudin, secrétaire général du syndicat FO-Justice, estime que ce transfert aurait pu être facilement évité.
"Ca va mobiliser un tas d'agents qui auraient pu faire d'autres missions à côté si le juge avait juste accepté de prendre une petite voiture et de se rendre à Condé-sur-Sarthe pour entendre le détenu", dit-il.
"Tout le monde aurait été en sécurité, on aurait dépensé moins d'argent", ajoute le représentant.
Pourquoi faire venir Mohamed Amra ?
Emmanuel Bodin prône aussi le recours à la visioconférence qui est une option possible, mais elle n'est pas la norme. Aujourd'hui, c'est le magistrat qui décide si on doit lui présenter le détenu ou non.
La loi narcotrafic, si elle est validée par le Conseil constitutionnel, entrera en vigueur le mois prochain et doit généraliser la visioconférence dans ce type de situation. "Cela empêchera peut-être ces efforts d'argent déployés pour ce monsieur qui ne le mérite pas", a déclaré Gérald Darmanin sur le plateau de TF1, ce mardi.
De nombreux magistrats s'accordent à dire que la qualité de l'interrogatoire est bien meilleure en présentiel qu'à distance, qu'il garantit une meilleure confidentialité de l'échange. Cela évite que le procès-verbal passe par trop de mains.
La juge d'instruction pouvait donc se rendre elle-même auprès de Mohamed Amra, mais elle a préféré choisir l'extraction du prisonnier.
"La juge d'instruction a estimé que c'était nécessaire de voir Monsieur Amra dans les conditions qui sont celles du dossier", a déclaré Ludovic Friat, ancien juge des libertés et président de l'Union syndicale des magistrats, au micro de RMC.
"Il faut aussi que la justice ait les moyens, lorsqu'elle l'estime nécessaire, de pouvoir faire extraire n'importe quel détenu [...] J'entends bien que c'est quelque chose qui est lourd, qui peut être dangereux, mais il faut que force reste à la loi", a-t-il ajouté.
L'ancien magistrat glisse d'ailleurs être "choqué" que "cette information soit largement communiquée à tout le monde". Il ajoute: "On aurait envie de faire capoter cette extraction qu'on ne s'y prendrait pas autrement".
Bruno Retailleau, en charge de ce transfert, a de son côté émis le souhait que la juge d'instruction se rende elle-même sur place.